Aloe Vera

Suite à une mésaventure récente, une de mes lecteuses assidues (mais mes lecteurs sont-ils autre chose qu’assidus, tendus dans toute leur vie vers la perfection socratique ?) me disait donc dans un commentaire : « j’espère qu’il vous reste de l’Aloe Vera ».

Il m’en reste d’autant plus que je n’avais pas encore commencé à consommer cette herbe.

Vient donc le moment d’évangéliser les foules sur l’Aloe Vera. Si je le fais, c’est parce que – à l’instar de certains thibillets déjà rédigés, en informatique souvent – j’ai fait une recherche sur le dieu Internet, et n’ayant pas trouvé de réponses satisfaisantes, j’ai décidé de poster ma synthèse, pour le googleur compulsif.

L’Aloe Vera est donc une plante, ou une herbe, bref, un végétal (Wikipedia est un peu plus calé là-dessus) qui pousse dans les régions chaudes, par exemple dans le sud de la France, où elle se ramasse à la pelle dans les chemins empoussiérés de garrigue, sous un soleil vertical et dans l’ambiance crissante des cigales.

En région parisienne, les fleuristes (en tout cas, les miens) sont infoutus de trouver des plants qui fassent plus de 10-15 cm de haut, mais on m’a dit que peut-être, chez Truffaut…

L’Aloe Vera a des propriétés réjuvénantes, émollientes et hydratantes. En bref, ça remplace n’importe quel cosmétique pour le prix de 2 verres d’eau par semaine.

Je n’ai même pas eu à l’acheter, ma professeur d’espagnol (holà, Magdalena !) m’en a offert un plant, ci-contre représenté dans la fruiterie de ma maison (entre le petit boudoir et la souillarde). Pour ceusses qui n’ont pas une professeuse d’espagnol adorable, on m’a dit que peut-être, chez Truffaut… Sinon, il y a des vols pour la Côte d’Azur toutes les heures.

Et à quoi ça sert ? Eh bien, si l’on est dans une quête bio, genre je ne consomme plus de cosmétiques du commerce et je reviens aux gestes d’antan, ça sert à s’hydrater, s’émollier, se réjuvéner.
Et comment fait-on, docteur ? Eh bien, toutes les fois qu’on est à court, on coupe une des feuilles, à la base du tronc, en murmurant quelques pensées apaisantes. Puis en saisissant un économiseur, aussi appelé épluche-légumes (vous pouvez aussi utiliser un rasoir, mais prévoyez un paquet de coton et du mercurochrome à portée de main), épluchez la feuille en sifflotant. La chair est transparente, un peu visqueuse, on dirait de la méduse végétale.
Coupez en petits dés, mettez au congélo (je mets les dés sur du papier sulfurisé) et quand c’est congélofié, mettez les cubes dans une boîtoune. Voilà, ça dure des semaines ou des mois. De temps en temps, sortez quelques cubes de la boîtoune et mettez les au frigo, ou dans votre salle de bains. Et le matin, quand votre peau agressée par le feu du rasoir, votre épiderme desséché par le calcaire, vos follicules craquelés par l’air sec vous supplieront, vous les attendrirez de cette mixture végétalo-hippie, et pendant un moment, vous aurez une pensée pour votre grand-mère qui lavait son linge au lavoir dans une provence de Marcel Pagnol.

Et avec l’argent économisé, vous achèterez des actions de fabricants d’armes, hahaha !

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Séquelles – Mondes parallèles

Comme pour le thibillet précédent, je ne cherche pas spécialement à obtenir de réactions, je veux juste écrire pour moi et partager.
J’ai du mal à sortir de cette agression (le physique se rétablit, merci, le psychologique mettra probablement plus de temps), et je me rends compte que cela change ma vision des lieux et des choses.
Je ne verrai plus jamais cette rue, et cet immeuble d’où les trois sont sortis, de la même manière.
J’y penserai probablement à chaque fois que j’emprunterai cette rue (que je n’emprunterai plus jamais la nuit, ce qui me vaudra des détours fréquents).
Je suis vigilant, voire inquiet, dès que je croise des grands mecs dans le style de mon agresseur, où que ce soit.

Tout cela passera, plus ou moins vite, mais ça passera, parce que le cerveau humain a cette capacité géniale de gommer les choses, d’aplanir, de réparer les bleus à l’me.
Quand même, je pensais que nous vivons, mon agresseur et moi, dans des mondes parallèles. Comme dans la science-fiction, deux mondes se côtoient, et de temps en temps une porte s’ouvre pour communiquer entre les deux mondes, et puis elle se referme. Quand je suis parti pour travailler ce matin, mon agresseur dormait probablement encore. Mais quand je dormais cette nuit, si ça se trouve, il était dans une rue, ou un bar, ou une voiture, éveillé et actif. Quand je travaille, il regarde la télé, ou fume, ou boit. Quand je me repose en famille, il est dehors sous la pluie, à se battre ou à tchatcher (non, pas sous la pluie, ces gars-là sont comme nous tous, personne ne reste jamais longtemps dehors quand il pleut).
J’avais eu cette même impression de mondes parallèles il y a quelques années. Un ami avait proposé qu’on se prenne un pot / apéro à son bureau, puis qu’on aille dans un bar-boîte juste à côté, La Favela Chic. On y avait passé une excellente soirée. Ce qui m’avait frappé, c’était qu’on était mardi soir, et que des personnes étaient venues pour y faire la fête, en habits de soirée, et semblaient parties pour danser et boire et rigoler toute la nuit. Un mardi soir.
En partant pour me trouver un taxi, je me disais que je n’y avais jamais pensé : tous les soirs de la semaine, à Paris, il y a des gens qui étaient magasinier, ou secrétaire, ou comptable adjoint dans la journée, qui s’habillent façon flash ou smart et qui sortent pour faire la fête, jusqu’à pas d’heure, la plupart d’entre eux travaillant probablement le lendemain, mais c’est juste qu’ils sont jeunes, ou fun, ou endurants, ou qu’ils ont un boulot chiant qui ne demande pas beaucoup de concentration. Je ne m’étais jamais rendu compte qu’à côté de mon monde, qui est quand même très planplan, il y avait le leur, qui n’ouvre pas aux mêmes heures, ne contient pas les mêmes personnes, et n’a pas les mêmes valeurs, les mêmes soucis, et la même histoire.
Je reviens à mon gars et à son monde parallèle. Nous sommes presque en opposition de phase. Je suis dans le clair, il est dans l’obscur. Mais c’est la même rue. Le même quartier. Et quand nous nous sommes croisés, quand la porte s’est ouverte temporairement entre nos deux mondes, c’était dans cette heure de clair-obscur.

Sans le savoir, il y a plusieurs années, j’avais rédigé un thibillet prémonitoire : même rue, ou presque ; même parallélisme entre les mondes ; même conclusion vigilante.

[edit] effet magique de la sérendipité, ou de l’aéropage, je viens de me rendre compte que j’avais lu la semaine dernière une nouvelle de Jack London qui s’intitule South of the Slot (Au Sud de la Fente) et qui parle de deux mondes, avec un homme qui passe de l’un à l’autre et qui a une identité distincte dans chacun.[/edit]

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Fesse-Bouc et vous, frères humains

Sur les conseils d’un collègue prof de droit, j’ai mis sur ma page Facebook une fausse date d’anniversaire. Son argument (j’y connais rien en droit), c’est que dans la législation de certains pays (dont les US), le simple fait de donner sa date de naissance vaut acceptation de certains contrats. J’ai donc mis la date de l’assassinat de Kennedy. Résultat, aujourd’hui, je reçois un SMS d’une cousine « Joyeux anniv ! »
C’est mignon.
Je l’ai détrompée, ce qui m’a permis de me rajeunir de 5 ans (il ne faut jamais rater ces occasions).
Que ce thibillet vous permette d’avoir une pensée à la mémoire de John Fitzgerald Kennedy, homme politique célèbre, grand visionnaire et grand inspirateur, tombé tragiquement sous les balles d’un mystère jamais totalement élucidé. Certes, l’histoire a dé-doré le blason de cet homme sur quantité de points, mais je reste néanmoins fidèle au souffle qu’il a su donner au monde à son époque.
R. I. P.

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Fait divers

Hier soir, j’ai été agressé physiquement. Comme dit Woody Allen, « je me suis défendu vaillamment, et je les ai mis en fuite, en leur tapant sur les poings avec mon nez ». En fait, j’en suis quitte pour une joue qui a doublé de volume et une mchoire douloureuse. (j’ai même rêvé cette nuit que j’avais perdu une dent).
Je suis partagé entre deux envies : je ne veux pas en parler ; je veux en parler.
Pour la première, c’est plutôt : je ne veux pas qu’on m’en parle. Parce que je dois raconter à nouveau toute la scène, répondre aux questions et que cela m’est pénible : l’analyse, je l’ai déjà faite, et peu me chaut que mes interlocuteurs comprennent là où j’en suis arrivé en terme de conclusions.
Pour la deuxième, c’est parce que, comme toujours dans ces cas-là (j’avais vécu ce genre de chose, sans agression physique, il y a quelques années), cela me tourne dans la tête les heures et les jours (et les nuits qui suivent). Et qu’une manière de dégonfler le ballon, de vider le cerveau, c’est d’en parler. Mon analyse, la voilà. Il y en avait trois, mais il y en avait juste un qui voulait se battre. Peu importe la raison, il cherchait toute occasion. Et je lui en ai donné très peu, ne répondant quasiment pas à ses provocations et insultes et continuant à avancer. Je pense que c’était la seule solution, car la dialectique de ce genre de personne, à ce moment-là, c’est « je t’insulte, tu réagis, je m’énerve, tu me pousses, je t’agresse, la preuve, j’étais en état de légitime défense puisque tu m’avais poussé ». René Girard n’est pas loin, c’est l’escalade de la violence. Et ce que j’ai donné, au contraire (par instinct ? par réflexe intellectuel sans que l’intellect ne soit sollicité ?), c’était l’inverse : le refus de rentrer dans ce schéma pré-établi. Mais lui, en face, il ne connaissait que cette manière de communiquer sous forme de conflit, d’action-réaction. Il en est venu, pendant un moment, à avoir une posture beaucoup plus humble, il voulait savoir pourquoi je refusais de lui parler, et sa voix était, sinon suppliante, du moins demandeuse, sincère. Et puis le déchaînement de violence après, quand il a vu que je restais dans un schéma qu’il ne comprenait pas.
Deux réflexions :
– cela fait des années que je pense aux possibilités d’agression, et aux réactions que je pourrais « préparer ». C’est assez illusoire, parce que sur le coup, probablement comme beaucoup de personnes, j’ai eu un grand blanc. Le cerveau ne réagit plus rationnellement, on n’est plus capable de raisonner ou de se souvenir de la to-do liste de l’agressé 😉 En même temps, c’est intéressant, parce que je pense que toutes ces années de réflexions et de discussions sur l’être humain m’ont donné quelques réflexes intégrés, des manières de se comporter dans ce genre de crise qui ne sont peut-être pas optimales, mais qui limitent la casse.
– ce gars cherchait en fait du dialogue. Mais dans certaines existences, on n’a plus que le conflit et l’opposition pour « dialoguer ». Il était dans son monde, dans son système de « dialogue », mais évidemment, il n’en est pas du tout satisfait. Il dira « je m’en foutais de ce gars » alors que pas du tout, même s’il a obtenu apparemment ce qu’il voulait (une bagarre), il a dû être frustré de ne pas obtenir ce qu’il cherchait vraiment (un échange). Un échange, fut-il de coups de poings, c’est un succédané fruste de l’échange de mots, qui lui-même peut être souvent un succédané fruste de l’échange de sentiments ou de l’échange de confiance. Mais c’est toujours un échange.

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Tu tangues, Irlande !

Dans mon rêve de cette nuit, j’étais au travail. Je devais aller aux toilettes, et j’en parlais à un de mes collègues, qui me mettait en garde : « avec les travaux, tu vas voir, c’est l’horreur ». J’y allai quand même. En effet, les toilettes du 5ème étage (département finance et Mastères Spécialisés) étaient dans un état descriptible, mais impraticable. Toutes les portes avaient été retirées ; des brassées de fils électriques pendaient du plafond ; il y avait des flaques d’eau, des carreaux de faïence cassés et du mastic par terre. Un seul des toilettes était en service, et il était… comment dire… souillé abondamment.
Je décidai de descendre aux toilettes du 4ème étage (département marketing). L’escalier était tortueux, lui aussi encombré de gaines électriques, méga lombrics de plastique, mais j’arrivai à passer. Je poussai la porte. Et là, à la place des murs carrelés blancs et du carrelage, je tombai sur une antichambre désuete. Du tissu sur les murs, quelques gravures de chasse [edit]à courre[/edit]. A l’emplacement du toilette n°1, on voyait l’entrée d’une chambre à coucher, lambrissée, avec des rideaux épais encore à demi-fermés, un lit en désordre, quelques vêtements épars. On devinait qu’il y avait une salle de bains plus loin, et que l’occupant était en train de se préparer à aller au travail à l’étage. Le toilette n°2 était aussi tapissé de tissu couleur beige, le trône était en délicate porcelaine peinte à la main comme les assiettes de grand-mère, il y a avait une chasse à chaînette avec une poignée en bois, tout cela sentait bon l’antan, la bourgeoisie cossue, le confort séculaire.
Rappel : c’était un rêve, toute ressemblance blablabla.
Mais je ne sais pas si je dois en tirer une allégorie sur les rapports entre le marketing et la finance.

Quant au titre de ce thibillet, il est un peu à l’aune de « L’automne à Pékin » de Boris Vian. Je sentais comme une obligation morale, voire patriotique, de participer au grand déferlement médiatique sur la main et le ballon, le coq et le trèfle, bref, l’Eire de rien, montrer que, moi aussi, j’avais une opinion, des sentiments, et que j’étais sûr que tout le monde était passionné d’entendre mon point de vue sur l’affaire AZF (As ou Zéros de France).

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Note to self : Gilles Cluzel, manager de transition / directeur de projet – ne pas embaucher

Cela fait des mois que je suis régulièrement spammé par un être humain (Gilles Cluzel, manager de transition / directeur de projet / directeur des opérations / DG délégué), sur plusieurs adresses professionnelles que je détiens. Je ne suis pas une société, mais ce monsieur arrose large, semble-t-il. Je lui ai écrit la première fois, pour lui dire que je n’avais aucunement sollicité ses mails. Pas de réponse. Lors d’un nouveau spam, je lui ai réécrit. Pas de réponse. Les fois suivantes, je l’ai signalé à Signal-Spam (plusieurs fois) et au service Abuse de wanadoo / orange. Ce service a ses limites, me semble-t-il, puisque je n’ai reçu qu’une réponse me demandant les en-têtes complets du message. Je me suis exécuté, et maintenant, après 4 mails de plaintes auprès de ce même service abuse@lauremanaudoo.fr, je n’ai toujours aucune réponse.
Je passe donc à une autre solution, qui consiste à l’écrire ici : si je devais embaucher un manager de transition (dieu m’en préserve), ou encore un directeur de projet / directeur des opérations / DG délégué (pour caler mon armoire) je n’embaucherais certainement pas ce Gilles Cluzel qui n’a visiblement pas compris ce que signifient l’éthique et la déontologie, fut-ce sur Internet.
Et maintenant, je vais laisser Google et ses amis faire leur travail d’indexation de ce thibillet.
« Et que ceci serve d’exemple à ceux que le Diable écarte du droit chemin » (Joe Dassin, Tagada Tagada voilà les Dalton)

[edit]
Voilà ci-dessous les derniers spams de Gilles « spam » Cluzel (car je ne les ai pas tous gardés. Le plus ancien conservé date du 12/07/2009 – il faut dire que Gilles Cluzel m’a envoyé 12 spams ce jour-là, à la même heure. Je ne savais pas que Gilles Cluzel et spam, c’était synonyme) :
le 29/10/2009, spam de Gilles « spam » Cluzel, manager de transition
le 06/11/2009, spam de Gilles « problème d’éthique » Cluzel, DG délégué
le 09/11/2009, dans le monde des spams, Gilles « spam » Cluzel, directeur de projet m’envoie un spam
le 17/11/2009, spam de Gilles « spam » Cluzel, directeur des opérations qui utilise linkedin, viadeo, mais surtout le spam
le 21/11/2009, Gilles « spam » Cluzel, manager de transition m’envoie un spam
le 25/11/2009, spam de Gilles « spam » Cluzel, DG délégué
le 28/11/2009, Gilles « manque d’éthique » Cluzel, directeur des opérations, m’envoie un spam (le vingtième ?)
le 01/12/2009, spam de Gilles « problème d’éthique » Cluzel, directeur des opérations / manager de transition (linkedin, viadeo, spam…)
[/edit]

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Nouveau Mac transportable

Dans sa dernière conférence, Steve Jobs a présenté la dernière bombe d’Apple : le BigMac.

Quelques informations sur ce qu’il y a sous le capot :

  • Souris avec double roulette, pour scroller sur toute surface
  • Double antenne wifi (norme 802 w) qui sert aussi de poignée de transport – on reconnaît là le sens du design de la firme de Cupertino
  • Habillage en titane camouflé plastique, pour tromper les voleurs albanais
  • Disque dur de 2,1 péta-octets (2 x 1 024 téra-octets)
  • Mémoire vide de 2 téra octets, extensible à un péta
  • Système de refroidissement par bière

Nul doute que plus d’un geek souhaitera avoir le BigMac sous son sapin ! (prévoir un grand sapin)

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Yoda vs Data

Hier soir en sortant de la piscine, je repensais à Maître Yoda, la première fois qu’on le voit (dans l’épisode 5, l’empire contre-attaque).
Il a piqué une barre de céréales dans le sac de Luke Skywalker, et comme R2D2 veut récupérer la barre de céréales (mais que peut faire un droïde d’une barre de céréales ?) , Yoda lui donne des coups de canne. Et je me disais « pourquoi un Chevalier Jedi, qui maîtrise l’espace et le temps, qui peut influencer les esprits faibles rien qu’en faisant des petits gestes avec les mains, qui peut soulever les pierres et les vaisseaux un peu comme Jane Grey dans X-Men, donc, pourquoi il donne des coups de canne à R2D2 ? »
Je trouve cette scène un peu pathétique, ou attendrissante.
Bon, il y a la première explication, sans fantaisie, qui est de dire « dans le scénario, les gars ne savaient pas que 20 ans après ils allaient tourner l’épisode 1, puis 2, là où Yoda fait le Yamakasi en combat singulier contre le Comte Do(o)ku(u). »
Et puis, il y a la réflexion plus avancée. Les humains se défient des machines. Les vrais, bons, êtres humains, « ceux qui marchent debout », ont compris très tôt que la seule matière malléable, c’est l’être humain et son cerveau. Ainsi, Yoda travaille sur lui-même, et il n’est pas interdit de penser que quand il soulève un rocher, en fait, il influence notre perception de la réalité (un peu comme le ferait un hypnotiseur), plutôt que de pratiquer réellement la télékinésie. Cf. dans Matrix : quand le cerveau croit que l’on reçoit des impacts de balles, le corps meurt.
Je préfère encore une troisième version. Yoda peut manipuler les objets à distance. Il pourrait donc éteindre R2D2 et consommer sa barre de céréales tranquilou. Mais il est à ce point « anti-machines » que sa réaction est viscérale (je vais taper cette boite de conserve) plutôt que raisonnée.
On retrouve la défiance des machines qu’on avait dans Dune (les mentats, ordinateurs humains, remplacent les machines calculatoires) ou encore dans cette nouvelle de Philippe K. Dick, l’homme variable.

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Marathon de New York – un autre compte-rendu

Mon ami Laurent avait lui aussi rédigé un compte-rendu. C’est différent, dans la mesure où lui court plutôt en 3h15 (mais il ne prend pas de photos, voilà, ça explique la différence).
Son récit est ici.

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New York, New York… (Part Two)

Nous nous sommes quittés au début du marathon de New York, juste après le Pont du Verrazzano, sur cette phrase :

« J’essaie de maintenir un rythme à 5:15 au km (11,5 km/h), ce qui, si je le tiens toute la course, me mènera vers un nouveau record. »

La course commence à peine, mais je suis chaud. Le ciel est gris, l’air est frais et humide, mais en quelques miles, je suis en T shirt et short. Le rythme est bon, le moral aussi, on arrive au premier ravitaillement (Mile 3, presque 5 km). Enfer, ce sont des gobelets en carton. Jeune impétueux que je suis, j’essaie de boire le gobelet en courant. Après m’être aspergé d’eau glacée, vieil imbécile que je suis, je décide de m’arrêter pour boire. C’est mieux. J’en profite pour prendre une photo de situation.

Nous sommes dans Brooklyn, direction Park Slope. Il y a déjà du monde dans les rues, mais il est encore tôt, il fait frais, donc l’ambiance est sympa, sans être hystérique.

Les petits immeubles, associés au ciel gris, ne font pas ressentir l’effet « New York », mais plutôt l’effet « banlieue de ville américaine ».  Cela pourrait être assez déprimant, mais j’ai d’autres choses sur lesquelles me concentrer, et même si je ne vais pas très vite, les bords de rue défilent régulièrement.

Mile 5 (km 8), premier gel, avec un gobelet d’eau. J’ai vu que certains coureurs pincent le haut du gobelet pour boire tout en courant. Je teste. OK, aspergé à nouveau, moi je dis, quand on a deux mains gauches, on ne joue pas au cacou et on s’arrête au bord du trottoir pour boire.

Et c’est reparti. Nous sommes sur Bedford Avenue, qui va durer pendant des kilomètres. Brooklyn commence à devenir plus attachant : des arbres, des petites boutiques, on sent que le quartier chic de Park Slope se rapproche.
Un rétrécissement de chaussée nous ralentit un peu, rien de grave, de toute façon il y a une côte, alors on ralentit. C’est très agréable de monter sous les arbres, même si ça monte…

Comme pour le Marathon de Londres, et contrairement aux marathons méditerranéens (Italie, Espagne, France), les coureurs affichent une cause pour laquelle ils courent. Leucémie, cancer, enfants handicapés, un parent malade : rares sont les T shirts qui ne portent pas de mention humanitaire. Quant à nous, nous courons pour la même cause que sur les 5 marathons : le syndrome de Williams-Beuren, dans sa version américaine (Williams Syndrom Association, WSA).

Dans le cadre de cette course, je verrai plusieurs handicapés. D’abord des « coureurs » handisport dans leur fauteuil roulant qui ont dû avoir un problème. En effet, les handisport partent toujours 20 à 30 mn avant les coureurs ‘sur jambes », et ils ont une vitesse qui assure habituellement qu’ils ne seront pas rattrapés. Sauf problème.
On passe ainsi des fauteuils roulants escortés par des bénévoles qui leur facilitent le passage. Et puis il y a une association de sportifs handicapés, Achiles. Ces coureurs sont escortés par des guides en T shirt rouge qui flanquent le coureur et le protègent. Je verrai ainsi un aveugle, et surtout, un homme amputé des deux jambes. Il a – j’apprendrai le nom dans le New York Times –  des Cheetah feet, c’est-à-dire des pilons se terminant par une lame flexible, comme un patin de ski, et il sautille pour courir, dans un geste assez gracieux, mais qui doit être véritablement épuisant. L’homme est baraqué, il a JESUS marqué dans le dos, et quand je le dépasse, vers le Mile 8, il a l’air en pleine forme. Je n’ose pas l’encourager, c’est idiot.

Il y a aussi des déguisements, mais de manière très exceptionnelle, beaucoup moins qu’à Londres, où les super-héros se comptent par dizaines. Je croise néanmoins un Flash et un Marquis de Lafayette. Quand je le prends en photo en me retournant, un coureur voit les drapeaux français sur mon visage et me lance un « allez les bleus ! » avec un bon accent américain, c’est sympa.

L’ambiance est donc bonne, on entend toutes les langues, on voit des prénoms de toutes les nationalités, et la foule est désormais bien compacte, bien chauffée. Les encouragements fusent, les orchestres poussent la sono à fond, on est dedans.

Mile 10 (km 16), deuxième gel. Le rythme est bon, j’oscille entre 5mn et 5mn30 au km, mais je tiens la moyenne. Mon bracelet « 3h45 au marathon » m’indique que j’ai 1 minute d’avance sur l’horaire prévu, je continue en espérant pouvoir maintenir la même cadence.

Bedford Avenue. On a pris un virage à l’ouest, Manhattan se voit au fond, ça fait du bien de voir des gratte-ciels au loin. Je continue, et j’arrive ainsi au semi marathon, 13,1 miles soit 21,1 km en 1h51 minutes. C’est plutôt bon signe, car – je m’en rendrai compte après – c’est mon meilleur temps sur cette distance. Mon record au semi-marathon de Paris était de 1h56, et je n’avais eu « que » 21,1 km. Là, j’ai été plus rapide, mais j’ai encore la même distance à couvrir…

C’est le moment où traditionnellement, je commence à écouter de la musique, pour m’encourager sur la deuxième partie du parcours. Je place mes écouteurs, j’allume le baladeur. Et là, par hasard, je tombe sur la BO de Rocky, la musique du thème (gonna fly now). L’intro à la trompette, le rythme qui monte, génial, je suis dans mon élément, la vie est belle !

Et puis un truc étonnant : la clameur de la foule est telle que, même en montant le volume de mon baladeur à fond, le plus souvent, je n’entends pas bien ma musique, tant l’ambiance est assourdissante. Tout Brooklyn est dans la rue.

Hasard de la lecture aléatoire, j’entends plusieurs morceaux de Rocky, et cela me fait toujours un bel effet. On quitte enfin Brooklyn, et on passe dans le Queens par un petit pont quelconque. C’est plus calme, car on est dans la partie juive traditionnelle, et la plupart des passants ignorent délibérement les coureurs. J’arrive au Mile 15, 3ème gel que j’essaie d’avaler en même temps que je tiens mon gobelet, bref, jamais deux sans trois, je m’asperge copieusement le torse, c’est glacé, bravo, là je dis bravo…
 
J’ai pourtant intérêt à rester frais. On arrive au Pont de Queensboro, un des points chauds du parcours. Faisant plusieurs miles, reliant le Queens à Manhattan, c’est un énorme pont couvert, favorable à la claustrophobie.

3 miles de pont, avec au moins 2 miles de montée, c’est long. Chacun s’accroche comme il peut, on essaie de gérer correctement ce paradoxe : ne pas ralentir trop, mais ne pas trop brûler d’énergie non plus, car il y aura encore 10 miles à s’avaler après.

Je sens des courbatures, mes abdos et mes épaules me tirent, le corps commence à souffrir. Je n’ai jamais été très bon en côte, ça se confirme, il faut s’accrocher et attendre que ça passe.

Cet endroit, c’est paradoxal, parce que Queensboro Bridge aboutit la 59ème rue, à Manhattan, c’est donc « le pont de la 59ème rue » de la chanson de Simon et Garfunkel (The 59th street bridge song, que beaucoup connaissent sous le titre Feelin’ groovy). Et cette chanson, elle est charmante, sautillante, fraiche. Et le pon
t est très beau, vu de l’extérieur. Mais là, j’en aurai désormais une autre vision : celle d’un oesophage en côte, des vertèbres d’acier qui nous entourent, nous surplombent, nous étouffent, et nous, fourmis trottinantes, crampies, moulues, qui nous accrochons dans la pénombre.

Nous surplombons enfin l’Hudson River, Manhattan est superbe sur le côté gauche, la côte est enfin terminée, le pont commence à descendre vers Manhattan, nous allons entrer dans le coeur de l’action. Nous avions été prévenus : il paraît que la clameur de la foule, massée à la sortie du pont, est assourdissante. Et je l’entends avant de la voir : un grand tumulte de cris, d’encouragements, une vague sonore impressionnante. On y arrive, on les voit : des flots de personnes massées sur les côtés, qui crient, applaudissent, claquent leurs ballons ou criquettent leurs crécelles. C’est énorme. Je n’ai vu ça nulle part, jamais entendu ça, c’est une vague d’énergie qui nous pousse tous vers l’avant. (La vidéo ici aide à peine à se rendre compte).

Le trajet fait un virage complet, retourne sur ses pas ce qui permet d’admirer le pont qui nous a tant fait souffrir. Et là, pendant quelques centaines de mètres, grosse angoisse. Tout à coup, ma cheville droite (celle qui a eu une entorse il y a un an) se met à me lâcher. Elle me fait mal, et je la sens fragile, prête à craquer. Je boitille, je déporte tout mon poids sur l’autre jambe, j’en suis presque réduit à sautiller à cloche-pied.
Grosse angoisse : ça me fait mal, je suis en train de me déséquilibrer, et je ne vais pas pouvoir continuer à cloche-pied pendant 10 miles !
Je continue ainsi pendant plusieurs dizaines de mètres, et puis je décide d’inverser le propos, un peu à la manière de l’école de Palo Alto : au lieu de protéger la cheville en réduisant mon effort sur elle, au lieu de m’angoisser, je décide de la mettre à contribution. Je me rééquilibre, je la sollicite à nouveau, mais cette fois complètement, en déroulant bien le pied et la jambe. Je continue pendant quelque temps en respirant… jusqu’à ce que je me rende compte, quelques centaines de mètres plus loin, que je m’étais mis à penser à autre chose et que ma cheville ne me fait plus mal… 

On aborde la 1ère avenue. La 1ère avenue. Une étendue mythique, parce que presque aussi large que les Champs-Elysées, alors imaginez ce que ça donne sans une seule voiture, une gigantesque largeur d’asphalte, des coureurs au milieu, et une foule déchaînée sur les côtés.

L’ambiance est folle. Un exemple parmi des milliers : je vois une grosse fille qui brandit deux pancartes avec énergie. La première dit « Keeping on running is your only fucking option ! » et la seconde dit « It’s OK to cry ». Tous les types d’encouragements possibles sont à New York.
Des drapeaux français, norvégiens, péruviens, texans, chinois.
Des pancartes, des slogans, des bannières, des mots d’amour.
Des gars qui encouragent gentiment ceux qui marchent (« allez, recommence à courir, vas-y ! »).
Un gars qui s’est détaché de la foule, il n’a pas l’air content, et il engueule copieusement un marcheur (j’espère qu’il le connaît), du genre « Mais bouge-toi, pauvre tache, bon sang, allez, redémarre, et vite !! »
C’est de la folie, c’est New York.

Je sais que les amis de WSA nous attendent à la 96ème rue. C’est tout l’avantage des quadrillages des cités américaines : je compte les rues une à une, 62ème, 63ème, c’est plus rythmé et plus fréquent que d’attendre le prochain mile, ça permet de maintenir sa motivation.

J’arrive à la 80. Puis à la 90.
La 95. La 96.
Je cherche, et vite, je repère le groupe WSA, des T shirts verts pour les adultes, dorés pour les enfants. Stephanie et Mary me voient et piaillent des Oh My God !!! (j’apprendrai plus tard qu’elles brandissaient une pancarte « Vivre Christophe !!! » constellée de marques de rouge à lèvres…). Je vais vers le groupe WSA, je voudrais m’arrêter un peu, ou leur dire quelques mots, mais un gars robuste en T shirt vert me met d’autorité une bouteille d’eau dans la main, me pousse en me disant « go, go, go !! » et je repars dans la course.

Je passe le Mile 19 (km 30). Je l’ai déjà mentionné pour Londres, « la course commence au km 30 ». C’est là où on est fatigué, où le corps commence à refuser, où c’est difficile de maintenir le même rythme. Et il reste encore 7 miles, 12 bornes, c’est-à-dire une distance risible quand on est frais du matin, mais difficile quand on a déjà 30 bornes et trois ponts dans les pattes.
D’autant plus qu’on passe East Harlem et qu’on arrive dans le Bronx.
Moins de personnes, beaucoup, beaucoup moins d’ambiance, des paysages plus gris. On nous avait prévenus, c’est la partie moralement difficile, celle où l’on aurait besoin du support de la foule, mais hélas, hasard du parcours, cela va être le tronçon le moins vivant. Et  pour couronner le tout, un méchant petit pont tapissé de moquette détrempée, et allez donc, encore une petite côte. Rien de grave, certes, mais désormais, chaque sollicitation nouvelle, chaque variation du relief, fut-elle faible, se paye cher.
D’ailleurs, pendant un bon moment, je ne vais plus prendre de photo, je n’y pense plus, ou je n’ai plus envie.

Je n’ai plus trop de souvenir du Bronx. J’essayais de maintenir mon rythme de 5mn15 au km, je m’abreuvais à un ravitaillement sur 2, j’ai pris mon gel du 20ème mile, et pour le reste, c’était mettre un pied devant l’autre et recommencer.

La boucle, le grand virage, on comprend qu’on est en train de retourner, de redescendre à Manhattan. Sentiment de libération. Mile 21, Harlem, on commence à retrouver de la foule, de l’ambiance.

Et la 5ème avenue. L’avenue chic, celle qui descend vers Central Park, là où se terminera le marathon.
L’avenue traître. Celle qu’on descend sur la carte, car elle orientée nord-sud. Mais en fait, la 5th, c’est un grand, méchant, persistant, vicieux faux-plat. Des miles et des miles de montée. Pas une côte, non, plus démoralisant encore : un dénivelé constant qui grignote les genoux, l’énergie et le moral.
Le coup de grâce, quoi. Le truc inattendu. Comme le dit Georges Arnaud à la fin du Salaire de la peur « tu as fait ce que tu devais, mais là, c’est le croupier qui a triché ».
L’avenue s’étend sur une distance infinie. Ma vitesse baisse à 5mn30, 6mn, je donne des coups d’accélérateur, mais ça ne sent plus la jeunesse, je repasse péniblement à 5mn40, parfois 5mn30, il faut se battre pour ces poignées de secondes.
Heureusement, la foule est là, plus présente, plus bruyante, mais c’est comme pour la musique que j’écoute : j’ai la sensation d’être émoussé, plus rien ne me motive, je cherche l’énergie d’accélérer, mais en fait, je n’ai qu’une envie. Que ça s’arrête. Que je m’allonge pour dormir et oublier tout.

Mais je n’ai pas attendu 4 ans, je n’ai pas bâti ce rêve pour en rester là. Ce n’est pas un sursaut d’orgueil, parce que je ne suis plus dans l’état d’avoir un sursaut. On ne peut pas parler de flambée, d’énervement, ou de feu aux poudres, j’en suis bien loin. C’est juste un entêtement tenace. « Keeping on running is your only fucking option ».
Alors je ne vais pas m’arrêter, et personne ne va m’empêcher de terminer. A ma vitesse, à ma manière, je grignote péniblement cette côte avec mes genoux émoussés, mes mollets durs, mes cuisses crispées et douloureuses.

La suite se raconte en peu de
mots. L’avenue est très longue, nous nous mettons à longer Central Park, la foule est de plus en plus dense, de plus en plus excitée et proche. Même si je n’ai plus la même vitesse, j’arrive à limiter les dégâts : je ne dégringole pas à des 8 ou 9mn au km comme dans d’autres marathons, j’arrive à me maintenir à un rythme de 6 mn au km (10 km/h) malgré tout ce que je ressens dans les pattes. 
Et puis je vois soudain deux tours au loin, la foule nous crie que ça y est, on va y arriver.
Tout au bout de cette avenue, la foule est excitée, il y a un virage un peu sec, se pourrait-il que ce soit l’arrivée ? Je décide de couper ma musique et de me laisser porter par l’ambiance.
Un panneau que je vois, mais que je n’enregistre pas bien : Mile 23 (km 37).
Il reste 3 miles, 5 km, mais je n’arrive plus à visualiser, je crois que c’est tout proche, que c’est réglé. Alors que ce sont 3 longs miles, les plus longs du parcours.

Je mets ce qui me paraît être un temps infini à atteindre la banderole Mile 24. A tel point qu’il vient un moment où je me dis que ce n’est pas possible, que je l’ai ratée, que la prochaine banderole sera une bonne surprise, ce sera déjà le Mile 25.
Et au bout d’un temps très long, je vois une banderole au loin. Mile 24. Je soupire. Je ne suis pas prêt de voir le Mile 25. La foule nous encourage tous, j’entends des dizaines de fois « Allez la France ! », nous sommes tous à souffrir, les coureurs devant, derrière, à mes côtés, nous sommes tous cuits, mais la foule ne se lasse pas de nous encourager, nous pousser, nous soutenir. Des côtes. Des descentes. Des montées.

Mile 25, enfin.
Plus qu’un mile.
Enfin, c’est ce que je crois.
Des familles, des enfants, des buissons, des arbres, des plans d’eau, et mes talons qui rentrent dans mes genoux, mes genoux qui rentrent dans mes hanches.
Descente. Montée. Virage. Descente.

Mile 26.
Almost there.
Plus que 0,2 à parcourir, ça y est, on y croît.
Mais 0,2 ne signifient pas 200 mètres.
C’est 0,2 miles.
320 mètres.

Là, enfin, je consulte à nouveau ma montre. Je la consultais régulièrement pour mon allure, mais je n’avais pas regardé mon chrono depuis le semi-marathon. Elle m’indique 3h52.
Et là, ultime coup de fouet : mon record, pour l’instant, c’est 3h54 à Londres. Je suis à 2 mn en dessous, à 300 mètres de l’arrivée.
J’accélère.
Je voudrais passer la ligne avant le temps que j’avais fait à Londres.
C’est super dur d’accélerer, c’est tout sauf un sprint. Comme le dit le cow-boy à Buzz l’éclair, « je n’appelle pas ça voler, j’appelle ça tomber avec grâce ».
Bref, je mets dans la balance les quelques réserves que je ne croyais plus avoir, et j’envoie le tout.
300 mètres, c’est très long.
Je regarde ma montre régulièrement.
3h53.
Je respire, je souffle, j’allonge la foulée en essayant d’éviter de tomber.
3h54.
Un dernier coup d’énergie.
Je passe la ligne, j’arrête mon chrono.
Cela ne sert à rien de le regarder, je ne sais pas 3h54 et combien de secondes j’avais fait à Londres.
Ce ne sera que le soir-même que je découvrirai que j’ai réalisé un nouveau record, battant de 3 secondes seulement mon temps de Londres.
ça me fait sourire, ce petit grignotage.

« If I can make it there, I’ll make it anywhere »

Après la ligne d’arrivée, je me suis senti bien mal pendant plusieurs dizaines de minutes. Vidé, titubant, n’ayant qu’une envie, m’allonger. Et puis j’ai bu. J’ai marché. J’ai mangé. Et peu à peu, très lentement, je suis revenu à la vie.

Et je peux maintenant commenter et conclure ce long récit (j’ai pris les 7h de vol retour pour le rédiger).

  • La comparaison entre Londres et New York ne tient pas. Mon temps à New York est bien meilleur que mon temps à Londres, pour les raisons suivantes :
    • New York a des variations de relief bien supérieures (Pont du Verrazzano, Pont de Queensboro, 5th avenue, Central Park).
    • Le gagnant de New York met 2h09. Celui de Londres met 2h05. Cette différence, rapportée à mon allure, ce n’est plus un différentiel de 4 mn, mais probablement de 10 mn, peut-être plus.
    • Je me suis arrêté pour prendre des photos.
  • New York est un marathon génial pour
    • l’ambiance, exceptionnelle
    • les vues de tous les quartiers et la découverte de cette superbe cité
  • New York est un marathon assez contraignant car, même en regardant à l’avance le relief du parcours, on ne se rend absolument pas compte des difficultés à venir. C’est vraiment une course où le terme gérer sa course prend tout son sens. Et c’est difficile à faire quand on fait le parcours pour la première fois.

En conclusion : 5mn15 au km, sur 42 km, est un objectif ambitieux, mais probablement tenable sur un marathon plus plat.

Par exemple, au hasard, Paris en avril 2010…
🙂

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