Je ne vais pas faire un thibillet de fond, embrassant les perspectives et les âges. Je l’avais en tête, mais il est tard.
Je voulais juste parler du marché de l’occasion.
Avant Internet, comment faisait-on ? Quand on avait des livres en trop, des mixers en trop, des lecteurs ZIP en trop, qu’en faisait-on ?
- On les donnait ? Non, qui voudrait d’un lecteur ZIP…
- On les vendait ? Oui, mais ça veut dire : s’inscrire à une brocante, payer les 2 mètres linéaires, installer le stand dans le petit matin froid, gérer les embrouilles (PV sur la voiture, client pas content, problème de monnaie…) – vous pouvez sentir le gars qui l’a fait au moins une fois dans sa vie…
- On les jetait ? Oui, mais mauvaise conscience : je jette un truc qui marche, et qui va polluer les nappes phréatiques (ta mère)
Depuis Internet : je reste le cul sur ma chaise, et je mets en vente sur eBay, ou PriceMinister. Accessoirement, j’achète aussi sur ces sites. Pour les achats, c’est génial : ça tombe directement dans ma boite aux lettres. Pour les ventes, c’est un peu plus galère : il faut aller à la poste pour envoyer son colis. Mais avec un peu d’organisation (lchons le mot : de productivité), on y arrive raisonnablement bien…
Bilan :
- c’est un véritable marché de l’occasion qui se met en place. Avant, quand je voulais acheter d’occasion, je n’avais que les bouquinistes, les dépôts-vente, les brocantes. J’étais limité géographiquement. Maintenant, ma brocante, c’est la France entière (et même, les pays limitrophes participent aussi à ce système). Autant j’avais peu de chance de trouver une BD de Valérian en Ile de France, autant je tape sur Price Minister, et 30 BDs tombent. Après, peu me chaut que le vendeur soit à Albi : en 3 jours, la BD est dans ma boite aux lettres…
- Il y a un côté « machine à remonter le temps ». Je vais vous parler d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître. J’ai été élevé par mes grands parents. Mon premier souvenir de cinéma est lié au film que mon grand-père m’a emmené voir, à Auteuil Bon Cinéma (ça ne s’invente pas), et c’était « Le fantôme de Barbe noire ». Certes, ça ne s’invente pas non plus, c’était un film Disney avec des vrais acteurs, du genre (pour ceux de ma génération ou d’avant) « L’espion aux pattes de velours ». Bref, je vous parlerai une autre fois du fantôme de Barbe-noire, avec sa grande scène mythique, celle qui a résumé tout le cinéma à jamais pour moi. Mon propos est le suivant : ce film date des années 1975. Impossible de le retrouver en DVD à la Fnac. Mais je voulais avoir à nouveau cette scène mythique. Eh bien la solution était simple : Priceminister, mot clé « fantôme de barbe noire » et je suis tombé sur la cassette VHS du film, vendue par un particulier. Cela fait maintenant un an que j’ai chez moi une copie du film que j’ai vu il y a 30 ans, et qui n’est jamais sorti en DVD. Merci Internet.
- Corollaire : le problème du recyclage est réglé : ne jetez plus rien, tout a une valeur pour les vieux amateurs. Si vous avez un vieux lecteur ZIP, sur PriceMinister, il trouvera peut-être preneur… Ou un écran cathodique. Ou une vidéo VHS d’un film obscur. Ou un vieil iPod.
- Ce qui nous amène au dernier point : il faut quand même avoir un contrôle. Le contrôle, ici, porte sur l’évaluation des acheteurs. Exemple, tiré au hasard, et sans animosité : j’ai acheté un iPod d’occasion. 1/3 du prix neuf. Le gars disait « Bonne (sic) état, mais la batterie se décharge de temps en temps ». J’ai reçu l’iPod ce soir. On ne peut pas le faire marcher, point. Branché sur le secteur : nada. Sur le port USB : nada. Bonne état, des nèfles. Juste après ce thibillet, je vais maraver l’évaluation de ce vendeur. Que même sa mère le reconnaîtra pas dans la sixième dimension.
Autre exemple : la semaine dernière, j’ai vendu des billets de train sur eBay. Lundi, j’ai rencontré l’acheteur, il m’a payé, je lui ai donné les billets. En 2 mn c’était réglé, et le soir même, je l’évaluais en tant qu’excellent acheteur (ponctuel, correct, sympa). Je viens d’aller voir sur eBay : lui m’évalue en tant que « Transaction parfaite – très bon ebayer – highly recommanded ».
Internet devient un marché de la réputation. De même que les dirigeants d’entreprises, ou les cabinets d’audit, fonctionnent sur leur réputation, les acheteurs et vendeurs d’Internet font de même. Et si la solution à nos problèmes environnementaux et sociaux n’était pas, tout simplement, de profiter d’un tel réseau ?
