Caillou – Grand écart


J’ai tout fait.
Tout.

J’ai été gentil,
Et j’ai franchi les barrières sombres
Plus d’une fois.

J’ai été compréhensif
Et inhumain.
Ouvert
Et farouche.
Aimant
Et cassant.

J’ai tout fait.
J’ai vu la lumière
Je vois l’ombre.
J’attends demain
Ce soir
Sans attente.

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les murs ? Rien…

D’après mon ami Bruno, on est partis dans un mur écologique.
Du genre, on était une Ferrari à 300 à l’heure sur la voie de la consommation gaspillante, et sur les 30 derniers mètres, on a eu une alerte, donc on a pris conscience, mais rapidement, donc on a freiné à mort, résultat, on a percuté le mur à 280 à l’heure. En terme de bilan écologique, c’est clair : le discours officiel est rassurant, mais on s’y est pris trop tard.
Là où Bruno s’arrête, et là où je commence, c’est sur la suite.
(en fait, Bruno et moi avons bâti la suite)
Une Ferrari à 280 à l’heure qui percute un mur, elle ne s’arrête pas là. A cause de l’énergie cinétique, et de choses que je ne connais pas, mais que Bruno détaillera, la Ferrari, cette grosse vache, elle va continuer sa trajectoire de bolide fracassant.
Chance, ou plutôt, malchance, il y a un deuxième mur derrière.
Les puristes auront noté que je dis deuxième, donc ça n’est pas fini.
Bruno et moi n’avons pas le même ordre de percussion des murs, et surtout, le même nombre de murs. Je vous les livre ainsi au fil du clavier.

  • le mur financier, qui va péter grave (ah bon, il a déjà pété ? roh, chsavais pas moi, c’est pas dieu possib, il a pété ? mais que va devenir l’écureuil qui met ses noisettes où qu’il peut ?)
  • le mur économique. J’ai pas tout compris, mais selon Bruno, ça va envoyer, et Internet va disparaître. Vouê. Un grand cataclysme et le terme Big Bang étant déjà copyrighté, on appellera ça Le Syndrome Gutenberg. Y aura plus d’Internet. Tu sais, le truc qui permet de passer du temps sur Fessebouc et touiteur, eh ben voilà, y avait pas de garantie, ça va s’estomper dans les brouillards numériques.
  • Je postule aussi la fin du mur sentimental. La Ferrari aura encore un peu de vélocité, et il restera un mur, certes affaibli, quelques briques qui tiennent encore parce qu’elles sont liées. Et la Ferrari cassera ce dernier mur.

Et il restera quelques briques et une épave, Le tout en fin de course.
Ce sera le moment de reconstruire.
Avis aux amateurs, ceux qui n’ont pas peur des murs qui s’écroulent.
S’il y a des murs à reconstruire, appelez-moi.

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Electrosynchro

Une nouvelle idée de startup.

Pitch :

Encore ce week-end, j’ai rencontré ce specimen féminin : elle ne sait pas faire marcher un camescope, elle oublie de recharger son téléphone mobile, et quand elle emporte son appareil photo compact en vacances, elle a oublié (1) le chargeur (2) de recharger la batterie (3) de vider la carte photo.

Il faut aider ces pauvres bêtes.
Même moi. (moi, c’est dire). Je trouve assez fastidieux de devoir brancher mon Mac pour l’alimenter quand la batterie est en fin de course, de connecter mon téléphone portable à mes 17 ordinateurs pour synchroniser mon agenda et mes contacts, et de mettre le cable USB dans le fion de mon appareil pour récupérer mes photos.

Deliverable :

Il existe déjà dans les cartons un tapis de rechargement : on pose son mobile device dessus (ipod, tél portable, hamster) et celui-ci se recharge par induction, sans branchement de cable. Je propose l’étape suivante : on pose le mobile device sur le tapis (appareil photo numérique, puce RFID, femme) et cela recharge (par induction) et synchronise (par Bluetooth, par plasma, par exemple).

Avant : je rentre, je pose mon Nicon, j’allume le Maque, je lance iPhoto, je connecte le Nicon par USB au Maque, j’allume le Nicon, et je dis « OK, importer ».
Après : je rentre, je pose le Nicon sur le Tapis Giga Virtuel (TGV), et le Nicon synchronise les photos avec le Maque, tout en rechargeant sa batterie.
NB : marche super bien avec l’iPod aussi, et le tél portable, le cahier.

Final word :

Pas de fils à brancher. Pas d’oubli. Un monde où les femmes seront femmes et geeks, sans se rendre compte qu’elles sont geeks. Des millions d’informaticiens boutonneux me worshipperont comme un god.

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Souris, montre toutes tes dents…

Comme je vis une vraie vie d’aventurier et que j’ai toujours refusé de céder à la barbarie, je me suis dit, comme ça : et si je prenais un caramel mou ?
Et parce que la vie est faites d’actions audacieuses, le caramel mou j’ai pris.
Et là, le drame.
Je me dis, « Tiens, dans ce caramel mou, il y a du dur.
Un gros morceau de sucre, probablement ! »

Nan.

A 41 ans, je dois me rendre à l’évidence : il est révolu le temps des caramels mous.
Ma consolation : je vais mettre la dent sous l’oreiller et attendre la petite souris. Parce que si des gosses de 6 ans peuvent récolter, allez, 1 euros en échange d’une dent de lait, le calcul est simple (mais je le détaille en ayant une pensée émue pour mes élèves de 1ère année qui sont en train de fouetter pour l’examen de lundi prochain) : valeur future d’un euro placé pendant 35 ans au taux complètement arbitraire de 6% l’an, mais capitalisé quotidiennement parce que c’est plus fun :
VF = 1 ¬ * (1+ 6%/365)^(35*365) = 8,16 ¬.
Ah.
Compte-tenu des coûts de dentiste, la VAN est négative.

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Caillou – 5 mn


Cinq minutes pour te dire quoi,
Dans ce bruit et ces fâcheux.

Cinq minutes ensemble,
Mais il reste les autres dans ma tête.

Cinq minutes
Où je refuse mon masque habituel.

Il nous faudra beaucoup de fois
Cinq minutes.

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Mise en abyme

De temps en temps, je reçois des mails un peu limite de la part de mes étudiant(e)s. Mes collègues me disent que je suis trop gentil, et que mes étudiant(e)s se permettent trop de choses. Mais là, c’est autre chose : il faut que je me ré-éduque.

Certes, je suis content de voir que je parle bien (…) anglais, et que je sais toujours écrire des sujets percutants qui poussent à lire le mail. Mais quand même, quelle familiarité avec moi-même, ç’en est un peu dérangeant.

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Ghost in the machine

Ce n’est pas la première fois que ça m’arrive.
J’envoie un SMS aujourd’hui. La destinataire me dit qu’elle a reçu le texte du SMS + un e-mail. Me traite de locdu, de nolife, d’anti-geek.
Tu me connais, je suis systématique.

  1. je n’ai envoyé que le SMS, et pas le mail
  2. le mail n’est pas dans mon téléphone, j’ai vérifié mon adresse pro, mon gmail, les MMS et SMS : le message n’est stocké nulle part
  3. le mail (car je l’ai retrouvé, je suis systématique) est dans les archives de mon ordinateur, et date du 2 décembre 2008. Savoir comment il se retrouve dans un SMS du 29 avril 2009, c’est autre chose…

La théorie du complot

Dans ces cas-là, je suis prompt à dégainer : c’est la faute de Microsoft. J’ai un ami qui avait envoyé un document Word par mail. Il avait oublié que le document était protégé par mot de passe. Les destinataires ont essayé d’ouvrir le doc avec un éditeur de texte classique. Ils ont eu accès non seulement au texte du document, mais aussi à un autre texte, qui n’avait rien à voir, et qui faisait partie d’un autre fichier de cet ami. Le tout dans un fichier Word censé ne contenir que le texte initial. Big Brother.
Je veux bien aussi blâmer SFR, ça leur fera les pieds. Mais même si j’ai récupéré le mail de décembre sur mon mobile à l’époque (ce dont je ne me souviens plus), ça supposerait qu’ils l’ont gardé en cache sur un serveur, et qu’ils m’ont assaisonné mon SMS du jour avec un vieux mail. Y a des joueurs, chez SFR.

Je le répète, ça n’est pas la première fois que ça m’arrive.
Y en a-t-il parmi vous à qui ça arrive d’avoir un fantôme dans la machine ?

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La course commence au 30ème km…

Voici donc le compte-rendu de mon Marathon de Londres, couru hier.

L’histoire a commencé par de la peur et de l’appréhension. Je le rappelle pour ceux qui ne sont pas familiers de ces pages, notamment la rubrique Courir : sur les 6 marathons que j’ai courus, 4 se sont terminés dans une grande souffrance. Pour des récits détaillés, voyez par exemple ici ou .
Depuis que je cours 2 marathons par an, je vois la différence. Mes marathons d’automne (Berlin, Athènes 1 et 2) sont arrivés après un entraînement d’été, au soleil, et ce sont les deux marathons où je n’ai pas eu trop de difficultés. Par opposition, mes marathons de printemps arrivaient après un entraînement de janvier à mars. Imaginez début janvier, la nuit, le froid, et la nécessité de se motiver pour caler des entraînements. Ajoutez à cela le travail et son stress. J’arrive souvent aux marathons de printemps en ayant eu un entraînement allégé.
C’était donc ma perception vendredi : les mois d’hiver avaient été durs, j’avais sauté des entraînements. Mais à l’opposé, j’étais aiguillonné par une certitude : plus jamais la souffrance des marathons où je finissais détruit, en trottinant péniblement au gré de mes douleurs.
C’est assez comme intro, passons à la course de dimanche.

L’aube

Réveil dimanche matin avant que le réveil ne sonne, Laurent et moi avons préparé toutes nos affaire la veille, mais nous descendons d’abord petit déjeuner. Surprise très agréable : le ciel est bleu, il y a un rayon de soleil. Pour une météo qui annonçait du gris et de la pluie, nous y voyons un signe : à part Berlin, tous les marathons que nous avons courus ont été baignés de soleil. Du thé, du pain complet, du jambon. Retour à la chambre, douche, préparation. La préparation vestimentaire s’apparente à celle du toréador ou du samouraï : plusieurs rituels correspondant au torse, aux pieds, aux parties sensibles, le souci de tous les détails (piles de rechange dans la poche du short, gels au glucose sur l’avant bras, pommade sur les pieds, bracelet avec les temps de passage au poignet, pansements et crème là où ça frotte, casque de baladeur autour du cou…).
Nous nous retrouvons tous dans le hall, départ en métro, il suffit de montrer notre dossard pour que les préposés nous ouvrent les portillons.
Trajet ensemble, à plaisanter en riant un peu jaune, je respire profondément, le stress est là mais je le maintiens à distance à grands coups d’inspirations.

Le départ

Nous arrivons et marchons au soleil avec les milliers d’autres coureurs. Nous débouchons sur une énorme étendue de pelouse, allons déposer nos affaires au vestiaire, puis c’est l’ultime pipi pour ceux qui en avaient besoin, et on se retrouve dans le peloton. 36 000 coureurs qui attendent, ça parle, ça se tait, ça visualise, ça écoute les hélicoptères qui tournent, les haut-parleurs qui crachent leurs encouragements. Le départ a été donné devant, le temps que le mouvement arrive jusqu’à nous, je prends mon premier gel au glucose. Nous marchons, un dernier coup d’oeil, un encouragement, et ça commence à trottiner. Je vois la ligne de départ qui se rapproche, j’ai l’impression de flotter dans une chaussure : je m’arrête sur le bas-côté, je relace la chaussure posément, mieux vaut le faire avant de passer la ligne de départ qui déclenchera mon chrono officiel.
Départ. La foule est très dense, on n’arrive pas à prendre son rythme. Plusieurs fois de suite, le peloton s’arrête et on est obligés de marcher. Frustration : comment se mettre dans le rythme de la course, si on en est réduits à marcher. Mais après quelques arrêts, ça démarre doucement. La voie est étroite, il faut faire attention à ne pas se faire bousculer, le rythme de course n’est pas du tout idéal, tout le monde est ralenti. Un ou deux miles s’écoulent comme ça, on regarde le dos du gars devant, on s’essaie aux zig-zags. Pour ma part, je respire profondément, j’attends le bon moment sans stress.
Peu à peu, le peloton s’étire, et même si la foule de coureurs reste dense, on commence à pouvoir courir. Au bout de 2-3 miles, je suis à mon allure fixée, 5’30 » au kilomètre. Je sais que c’est ambitieux, j’ai vraiment la trouille que ça me fasse exploser en vol vers le km 25 ou 30, mais j’ai décidé ça vendredi soir, je vais tenter cette allure.

Le déroulé

Nous sommes dans une banlieue de petits cottages, le soleil brille, et la foule est déjà amassée sur les côtés, c’est très différent des autres marathons que j’ai courus, où l’on démarrait dans une indifférence totale.
Je découvre l’intérêt de courir en miles : il y en a moins, on n’est pas dans l’impatience de voir le prochain panneau. Nous arrivons bientôt au Mile 3, c’est le moment de prendre mon deuxième gel. Le stand de boissons n’est pas loin derrière, je dilue tout ce sucre sans m’arrêter, tout va bien. Il y a beaucoup de foule, il faut signaler quand on double, c’est dense. Je jette de temps en temps un oeil sur ma montre, histoire de corriger l’allure. Rien de grave : de temps en temps une petite pointe de vitesse, par moments un ralentissement, allez, on n’est pas des machines, je peux tolérer un certain flou autour de l’objectif. On passe les miles 4, puis 5. Je consulte régulièrement mon bracelet de temps de passage : je suis en avance sur l’objectif de 4h (rappel : mon record date de Berlin 2007, 4h18 sur un marathon réputé très plat) mais je sais par expérience que l’enthousiasme du début peut se transformer en souffrance à la fin. Je me cantonne à mes 5’30 » au km, ça durera ce que ça durera. Il y a des ravitaillements en eau tous les miles, c’est trop, je décide de ne boire que tous les 2 miles. Le tout sans m’arrêter.
Il y a des orchestres, des coureurs déguisés, ou des vrais professionnels. Je passe un pompier qui court, un vrai pompier, avec son manteau de cuir épais, son casque d’intervention, sa bouteille d’oxygène attachée dans le dos et – détail qui tue – ses grosses chaussures en cuir, on dirait des chaussures de chantier, pas vraiment ce qui est recommandé pour courir 42 km. Un coureur l’interpelle « You’re not serious ?! » Il répond sans douter « Oh yes I am ! »
Grande ambiance populaire.

La foule

Nous ne sommes jamais seuls. Quel que soit le moment, il y a des vingtaines de personnes de chaque côté, pressées sur plusieurs rangs, pour nous voir passer et nous encourager. Et tout ça à 10h du matin, un dimanche, dans un quartier éloigné de Londres. Que sera le centre ? L’ambiance est en même temps bon enfant et passionnée : la foule interpelle ceux qui avaient leur prénom imprimé sur le T shirt, les spectateurs brandissent leur bière (à 10h du matin…), les orchestres jouent à plein volume. J’arrive au Mile 9, je prends mon troisième gel. Les petites rues sont tortueuses, je lis les dos des T shirts devant moi : quasiment tous courent pour une cause, une charity. Du coup, je me sens à l’aise : avec nos 18 300 € de dons levés uniquement sur ce marathon, nous faisons partie intégrante de
ce mouvement. Le soleil tape, l’asphalte est dur, mais pour l’instant, tout cela fonctionne bien. Je suis toujours en avance sur le programme de 4h, je décide de ne plus regarder mon bracelet, je connais trop bien les effets de l’enthousiasme, et la somme qu’il faudra payer cash après coup, au moment où les forces m’abandonneront.

La moitié

Nous subissons quelques petites côtes, où, conforme à ma stratégie d’Athènes apprise après l’échec cuisant de Turin, je ralentis l’allure. Je me fais doubler sans angoisse, cela m’aide à conserver cette énergie qui me sera indispensable à partir du Km 30. Aux ravitaillements, il faut vraiment être attentif. Certains coureurs passent en force en bousculant. D’autres laissent tomber leur bouteille derrière eux, juste dans les pieds des suivants. Tout est une question de vigilance. Et je sais que la vigilance baissera avec la fatigue.
Je continue à mouliner des gambettes, à l’économie, les pieds rasant le sol, le torse qui ne bouge quasiment pas. Régulièrement, je convoque le Regard Qui Tue, le regard qui fixe l’horizon, et surtout, au-delà de l’horizon, le regard qui dit : bientôt, je serai Là-Bas, et rien ne m’arrêtera. Gel au Mile 12 + eau.
Tower Bridge. Cette vue me remplit de joie, c’est superbe, ce pont suspendu qui nous attend. Certes, ça monte, mais la foule vibrionnante des deux côtés, la Tamise et tous les monuments que l’on aperçoit, font que cette traversée du pont est un grand moment. Il y aurait eu 5 000 spectateurs sur ce pont que cela ne m’étonnerait pas.
Sortie du pont, retour à la vie, retour à la course.
J’approche du Mile 13, presque la moitié du parcours. Je vois un T-shirt « 5marathons » devant, je me rapproche progressivement, c’est Marcin, le copain de Maciej. Je le rejoins, on échange quelques encouragements, puis je continue à avancer. J’arrive au 13, j’attends encore quelques centaines de mètres, jusqu’à être sûr d’avoir passé le semi-marathon, puis je mets mon casque : c’est la seconde partie de la course, ça va se faire en  musique. J’ai une inquiétude : je me sens fatigué des jambes. Au semi-marathon, c’est préoccupant. Le premier morceau que j’entends est Sting, « Brand new day ».
You can turn the clock to zero, honey
I’ll sell the stock, we’ll spend all the money
We’re starting up a brand new day

Face aux champions

A partir du Mile 13, le parcours fait une boucle. Cela signifie que l’on voit, de l’autre côté de l’avenue, ceux qui reviennent de la boucle. Ce sont les rapides, ceux qui vont courir en 2h30. Ils sont peu nombreux, très distants les uns des autres, et – mirage oculaire – ils ne me semblent pas courir plus vite que nous (alors qu’il courent à 20 km/h. Eux.)
Là, on rentre dans le trou noir. Pendant 2 miles (c’est-à-dire très longtemps), je ne vois plus les panneaux de miles, et je ne sais plus où j’en suis. J’attends le prochain panneau pour faire le point, en attendant, je prends les tournants, je surveille mes vis-à-vis, je double ou je ralentis quand il le faut. C’est dingue, on en est au Mile 15, plus de la moitié de la course, et on ne peut toujours pas courir librement, il faut zig-zaguer, éviter, ralentir, passer de côté…
Le poteau arrive enfin : Mile 16, ouf.
Je me rends compte que c’est le moment de prendre mon gel du Mile 16, j’attends le prochain ravitaillement, et hop, c’est fait.
Je zappe toutes les musiques qui me gonflent, ou qui ne sont pas adaptées (Paul Personne, Me laisse pas tout seul, c’est super, mais qu’est-ce que ça fout sur ma playlist de marathon ?), ma vitesse tombe souvent à 5’40 » au km, je respire, je consulte ma fréquence cardiaque : comme je l’ai souvent observé, il suffit que je me focalise sur ma respiration pour faire redescendre mes battements de coeur. Émotif que je suis.

« La course commence au Km 30 »

On arrive au Mile 19. Celui-là, je l’attendais plus que le semi-marathon. Car comme dit Pierre Couvreur, notre gourou, l’homme aux 40 marathons, le record à 2h42, « La course commence au 30ème km ». Par là, il ne veut pas dire qu’avant le 30ème, on n’a rien fait. Il veut juste souligner que c’est là que ça va devenir sérieux, et difficile.
Je prends mon gel du Mile 19, je respire, je reviens à 5’30 », j’écoute Eric Clapton, je fixe un regard au laser sur l’horizon, putain, va pas falloir me faire chier, je suis là pour aller jusqu’au bout, et sans mollir.
La foule est partout. J’écoute ma musique à fort volume, mais j’entends bien les acclamations : la foule est une vraie foule de supporters, c’est un vrai plaisir de courir au milieu de ces personnes qui rendent vraiment hommage à notre effort. Plusieurs fois, je me détache du milieu de la route et je cours le long des barrières en tendant la main : tous les enfants tendent la main pour je tape dedans, ça me booste, je finis régulièrement à 5’00 au km, jusqu’à ce que je me calme en me disant que je ne vais pas arriver à tenir ce rythme jusqu’au bout, et je ralentis.
Et puis arrive le morceau de musique.
A Berlin, je me souviens, ça avait été Men in black, j’avais commencé à doubler tout le monde en zig-zaguant.
Là c’est Why Aye Man (Mark Knopfler). Le morceau démarre avec son intro et ses premiers couplets un peu soft, on sent bien qu’on attend l’implosion. Et puis le refrain. Bon sang, là je démarre au quart de tour, je me mets à accélérer, mes semelles sont sur un coussin d’air, je pulse comme un vent du Colorado.
Je crois que je reverrai toujours cette avenue du Mile 20, et la foule, le soleil et les ombres, et Why Aye Man dans les oreilles.
Mais tout à une fin, et un autre morceau passe (je le zappe) puis un autre (je le zappe) et Clapton à nouveau.

La jonction

La boucle se termine, je repasse de l’autre côté, et comme tout à l’heure je voyais les rapides qui couraient en 2h30, je suis désormais à leur place et je vois en face tous ceux qui sont derrière moi (8 miles derrière…), il y a des vieux, des jeunes, des marcheurs, des gros, des grands, des femmes, des déguisés, et je me dis « mais comment vont-ils faire, quelle horreur » et je continue à courir, je repense juste à Hemingway :

« Qu’est-ce que je raconte ? pensa-t-il. Voilà que je déraille. Faut garder la tête froide. Garde la tête froide et endure ton mal comme un homme. Ou comme un poisson. »
(Le vieil homme et la mer, Ernest Hemingway, 1952).

La famille de Laurent et la mienne nous attendent « au Mile 24, mais regardez à partir du Mile 22 ». Alors je regarde. Je passe des milliers de visages, rivé sur le côté droit, en me disant « je vais les rater, c’est pas possible, dans toute cette foule, c’est impossible de reconnaître quelqu’un. » Je prends l’avant-dernier gel, celui qui contient des excréments d’abeille et de la poudre du Sahara, et je continue à courir. C’est la première fois que je me suis arrêté pour marcher, prendre mon gel et boire de l’eau. Nous traversons de longs tunnels d’obscurité, la foule est éblouissante quand on ressort, et toujours la musique dans mes oreilles.
Mile 23. Je n’arrête pas de regarder la foule du côté droit, il y a trop de monde, trop de bruit.
Mile 24. Je n’ai vu personne. Je passe dans un long tunnel sombre. Je me dis « S’ils sont devant, je ferais mieux d’arrêter la musique ». J’enlève mon casque et
je me baigne dans les bruits de la foule. 300 m plus loin, je sors du tunnel, un peu ivre, un peu ébloui. Je continue vers la barrière devant moi. J’entends « Christophe ! » Je me retourne et là, à la perpendiculaire, dans un renfoncement que je n’avais pas vu, ma famille, celle de Laurent, avec des drapeaux, des T shirts. On a fait la jonction. Je vais tous les embrasser, et eux me disent « Mais vas-y, continue à courir, vas-y ». Alors j’y vais, j’y retourne, il reste juste… 2 miles.

When we were Kings

Nous courons le long de la Tamise. En face, loin, Westminster. La foule, toujours amassée contre les barrières, nous encourage avec un enthousiasme que je n’ai vu qu’à Madrid. Mais là, il y a dix fois plus de monde.
Cela fait longtemps que j’ai abandonné ma vitesse de croisière de 5’30 ». Je suis à 6’00, souvent 6’30 » au km. Mais il suffit d’une chanson, ou d’un détour par les barrière pour taper dans des mains, pour que j’accélère à nouveau à 5’40 », voire 5’30 » au km. Ce n’est plus très important : je me donne à fond dans cette course, mais je profite aussi. Je sais, je sens, que je suis en dessous des 4h. Je veux juste maintenir cet avantage, mais pas au point d’exploser et de ne plus pouvoir finir.
Mile 25. Je passe devant Westminster, les arbres sont verdoyants, la foule fait du bruit, la chaleur est omniprésente, il y a des portions de parcours qui ne font pas plus de 3 mètres de large, et nous passons tous, en sueur, épuisés, moulinant inlassablement le même rythme de nos jambes fatiguées. Je prends mon dernier gel, celui qui est un coup de fouet, qui contient de l’uranium enrichi, du venin de scorpion, de la poussière d’étoiles. Plus besoin de ravitaillement en eau, ça ne sert plus à rien à ce niveau de la course, je continue à travailler des jambes, je pousse le volume de ma musique, zappant impitoyablement tous les morceaux trop mous. Et puis arrive ce morceau, en même temps très classique et toujours plein de souffle. Je monte le volume à nouveau, et j’accélère.
Mile 26. Je ne le vois pas, car il n’est pas indiqué. Mais je vois d’abord un panneau qui dit « 400 m ». Je vais taper dans des mains, les spectateurs ont l’air aussi fatigués que moi, j’ai du mal à obtenir des mains qui se tendent, mais j’en ai besoin. Et puis je vois un panneau, juste avant une arche d’acier. 385 yards. ça veut dire que l’arche est au Mile 26. Je passe sous l’arche, je tourne à droite, et là :
Au loin, très loin, trois arches jaunes, avec le chronomètre officiel. Je vois 03h58’49 » et je commence à accélérer. Je sais que j’ai passé la ligne avec du retard sur le chrono officiel, donc mon temps réel est en-dessous de ce qui est affiché. Mais 385 yards, c’est long, surtout après 42 km. Je sens que je ne peux pas sprinter sur la distance. Je régule. Je me déporte sur la gauche et je vais taper dans des mains . Puis je me recentre, allez, encore quelques foulées, et je passe la ligne. Pas du tout comme Athènes, et j’étais arrivé en criant mon cri de guerre. Mais finalement, une fin de course à l’image de cette ville : j’ai fini en tapant dans les mains de ceux qui m’avaient soutenu sur toute la course.

3 heure 54 minutes 46 secondes.
23 minutes de mieux que mon meilleur temps (Berlin, septembre 2007, 4h18).
Mon 7ème marathon.
Mon 3ème marathon sans « mur », sans effondrement, sans souffrance terribles. J’apprends, peu à peu.

Et surtout, la chose la plus importante : 19 000 euros de dons récoltés pour la recherche génétique sur le syndrome de Williams-Beuren.
19 000 euros. Je sais pourquoi je cours.
Merci à tous.

PS : et que s’est-il passé dimanche soir ?
Tonight we’ll drink the old town dry
Keep our spirit levels high
Mark Knopfler, Why Aye Man

PPS : pour les vrais aficionados, il y a 3 versions différentes de Why aye man dans ce thibillet.

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London Baby

Athenes Pour préparer le Marathon de Londres, je reprends ma check-list du Marathon d’Athènes et je l’améliore. Je vais modifier ce thibillet en live jusqu’à mon départ (vers 19h30 ?) [edit] 20h04 en fait. I’m gone, baby, gone.[edit]

Avant de partir pour Londres :

  • Billets de train, coordonnées de l’hôtel – check
  • Passeport – check
  • Mouchoirs en papiers – check
  • Playlist pour le lecteur MP3 – pas changée
  • Téléphone rechargé – check
  • Boules quiès pour l’hôtel + masque – check
  • Ibuprofène + huile de massage à l’arnica – check
  • Citrate de bétaïne pour digérer la choucroute de la veille au soir – check
  • Mon carnet de notes et de croquis – check
  • Copies à corriger
  • Mon carnet de pouèmes – nan
  • Mon journal – check
  • Sunglasses – nan
  • carte européenne d’assurance-maladie – check
  • recommander mon âme à Dieu – plus tard, coco…
  • prendre le petit coeur en bois que je n’emporte pas assez souvent – check
  • Faire un dernier point sur les donations et poster sur www.5 marathons.com
  • Prévenir sur www.5 marathons.com que silence radio entre ce soir et lundi soir

Nécessaire pour le jour de la course :

  • Réveil matin – check (en fait, c’est ma montre cardio-fréquencemètre)
  • Faire des courses (alimentaires) à Londres pour petit-déjeuner
  • Short moule-à-gaufres – check
  • T-shirt respirant bleu-du-site-web aux couleurs de l’école (et propre!) – check
  • Chaussures, chaussettes (propres), semelles orthopédiques, slip sans coutures (propre) – check
  • Brassard pour mettre les gels pendant la course – check
  • Sparadrap pour mettre sur les tétons !! – check
  • Crème pour les pieds et les parties délicates (Nok) – check
  • 8 doses de gel au glucose pour les kilomètres 20, 30 et 40 miles 3 ; 5,6 ; 7,43 ; 8,931 ; ah merde avec ce système à la con !!! – check
  • 4 épingles de sureté pour le dossard – check
  • Cardio-fréquencemètre et accéléromètre – check
  • Lecteur MP3 + écouteurs Sennheiser qui vont bien ! – check
  • piles chargées – check
  • Sac poubelle pour m’enrober avant la course (super pour la motivation, « je suis une ordure, un résidu, un déchet »), éventuellement vêtements pour la pluie – check : mieux que ça : couverture de survie
  • Vêtements + petit sac à laisser au vestiaire, pour la caillante avant le départ – check, prévu par les organisateurs

Conseils pour avant la course :

  • Boire beaucoup (de l’eau), 2-3 litres par jour avant (Si pipi pas transparent, Toi boire encore des torrents) – thé vert, thé rouge Rooibos, eau, pastis sans alcool 🙁
  • Manger des pâtes, des pâtes, des pâtes (et d’autres sucres lents) – check
  • Faire le régime dissocié scandinave – check
  • Ne pas boire d’alcool (quelques semaines avant ?) – 15 jours – check
  • Prendre la température des copains qui courent, échanger conseils et insultes – neverending, ça va chauffer dans l’Eurostar demain
  • Jeter un oeil au relief de la course, et réfléchir – check, et à suivre
  • Calculer mon temps moyen au kilomètre, en fonction du chrono – pas encore totalement fixé
  • Me coucher avec un bon livre sur le Zen, ou des poésies – mathieu ricard +  jean-claude izzo + haruki murakami
  • Bien dormir – check
  • Ecouter la B.O. de Rocky en me préparant

Retour lundi soir tard. Pas sûr d’avoir de la connexion pendant le WE.

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Joe La Pasta

L’autre jour, j’entendais un analyste dire que sur certains titres boursiers, il fallait bourrer la cabane.

Voilà une expression qui me plaît bien, tiens, « bourrer la cabane ».

Alors voyons : 500 g de spaghettis secs, ça fait… ah ouais, je me suis enfilé 1,5 kg de pâtes cuites. Tu m’étonnes que j’en sois à prendre une tisane maintenant. Et après avoir bossé un peu, hop, je vais me boire mes nouilles liquides (mon sperm bull, comme disent mes amis (?) coureurs) dont l’étiquette me précise obligeamment que 150 g de poudre blanche diluée dans 1 litre d’eau et ingurgitée progressivement, c’est l’équivalent de 650 g de pâtes.

Bourrer la cabane…

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2h plus tard…

Back home.

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Usine à glycogène

Voilà, je vais clôturer la première phase de mon Régime Dissocié Scandinave. Depuis 15 jours, je ne bois plus d’alcool, et depuis lundi, je n’ai mangé que des protéines (jambon, poulet), du gras (fromage) et des légumes verts (courgettes, haricots verts). Pas un seul gramme de sucres lents (pain, pâtes, patates, pâte à tarte…). Normalement, mon foie et mes muscles ne doivent plus contenir beaucoup de glycogène (le carburant du sportif), et je m’en vais aller faire un ultime vidage en trottinant 40 mn pour brûler ce qui reste d’énergie.
Puis je passerai à la phase agréable de ce régime : un méga-gavage de pâtes à midi (1 kg ou plus) avec du pain complet, yeah, le tout histoire de saturer le foie qui va être en manque pendant les prochaines 8h. Si cette phase se passe comme prévu, je vais tripler la quantité de glycogène stockée dans le foie et les muscles… et retarder ainsi le fameux Mur des 30 km, dont j’ai souffert dans 4 marathons sur 6.
Ce régime (détaillé ici, par exemple) est réputé pour être dur (la première partie, surtout), et plusieurs personnes s’en plaignent sur les forums de course à pied. Les reproches sont « les 3 premiers jours étaient trop durs à tenir ». Cela m’étonne un peu, sachant que ce n’est pas la mort, et que courir 42 km, c’est autrement plus douloureux…
Allez, je m’en vais aller vider les réserves, avant de me gaver. Si vous n’avez pas de nouvelles dans les 2h, c’est que je suis mort d’hypoglycémie quelque part le long de la Seine. (Mais ça m’étonnerait, parce que je ne peux pas mourir).

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5 marathons.com – site mis à jour

Ce soir, j’y ai encore travaillé, et le site 5 marathons.com commence enfin à ressembler à quelque chose.
Dynamisé par le don vespéral d’une sautillante créature elfique, je vous encourage, que dis-je, je vous exhorte à faire des tas d’économies d’impôts en donnant pour l’association Autour des Williams, qui est notre cause, notre graal, pour le Marathon de Londres, 26 avril 2009, 4ème étape de nos 5 marathons sur les 5 campus européens de notre école. Ecole qui vient de changer de nom, d’ailleurs. Bref, cliquez ci-dessous, sortez la carte de crédit, et bénéficiez très rapidement de merveilleuses économies d’impôts !

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Vous pouvez aussi accéder directement à la page de collecte

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Donjon et biftons

Je n’étais pas au top de mon humeur baguenaudeuse, là, et c’est un euphémisme, mais l’ami Boulet me sauve avec une proposition marketing qui m’ a fait rire (il était temps), pour changer nos relations avec les banques. Alors achetez ses albums, pour combler son découvert de -XXXX.

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En vrac – Fumée sur les braises, pensées dans la nuit

Conversation samedi soir avec Sardar, en surveillant le barbecue.

  • Le Soufisme. Discipline, pensée, philosophie. Zoroastre, et les pensées du bouddhisme qui sont liées.
  • Frank Herbert. Dune et les Zensunni. Il a réalisé un syncrétisme de pensées. Néo dans Matrix n’en est pas loin. En résumé : les objets ne sont qu’une apparence, si on les prend comme tels, on devient esclave. Ce n’est pas exactement « there is no spoon », c’est « the spoon is not a spoon ».
  • J’aimerais bien écouter à nouveau de la musique Gnawa.
  • Il faut que je rachète la saga de Gilgamesh, que Sardar m’avait prêtée, et qui est un livre fondateur.
  • Le bouddhisme est imbitable. Essayer de faire simple, pour expliquer ce que je comprends du bouddhisme, en tant qu’occidental. C’est pas donné.
  • Les Koan sont des énigmes dont la réponse est toujours personnelle. Celle qui fait résonner ta personnalité, celle qui te satisfait.
  • Selon Sardar, La vie sexuelle de Catherine M. est un traité mystique. Donner sans recevoir.
  • Quand tu fais preuve de compassion, et qu’il n’y a pas de réponse (en clair, en langage d’occidental : et que tu te fais entuber), montre qui tu es. Moi, j’avais compris par « montre qui tu es » : venge-toi. Les autres m’ont dit : mais non, c’est : défends ta place. Et moi, je comprends finalement : ce n’est pas une question de place. Défends tes idées. Quand tu fais preuve de compassion, et que tu n’es pas compris, explique. Si tu es volé, explique. Si tu es bafoué, explique.
  • Suites pour violoncelle de Bach, par Rostropovitch. Variations Goldberg par Glen Gould.
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Caillou – Danaé


La nuit dernière
Trois petites filles face au cerisier
Enneigées de pétales qui tombent dans la brise.
Voilà le printemps.

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