Dieu soit Loué

A propos de la virtualisation des loisirs, et de là, notre relation au monde physique (actifs, patrimoine).

Les photos étaient argentiques, elles étaient rangées dans albums. Elles sont devenues numériques, elle sont rangées sur des disques durs, et rarement développées / imprimées. Les CDs de musiques physiques sont remplacés par des pistes MP3 dans nos baladeurs numériques ou sur nos disques durs. En bref, des actifs physiques sont remplacés par des fichiers. Je pense que nous passons de dépenses d’investissement à des dépenses courantes.

  • En effet, un investissement nous donne le plus souvent la propriété d’un actif physique (j’achète un CD, une pellicule argentique)*. La notion d’investissement est donc liée à celle de patrimoine durable. Par opposition, la tendance des dernières années va plutôt dans le sens de dépenses courantes : chaque année, je m’acquitte de dépenses récurrentes pour entretenir mes actifs virtuels : disques durs, CDs à graver pour conserver mes photos et MP3. Cf. le développement des services de stockage en ligne, qui consiste juste à sous-traiter cette activité d’acquisition récurrente d’espaces de stockage.
  • Prenons un autre exemple. En dessous de 500 € d’achat, la comptabilité considère que la dépense réalisée n’est pas un investissement (une immobilisation), mais plutôt une dépense courante (charge d’exploitation). Cela signifie que vu la baisse des tarifs sur ordinateurs, l’achat d’un portable est aujourd’hui comptabilisé comme une dépense courante.

Ce changement de paradigme, qui n’est pas récent, pourrait avoir des impacts sur la notion de propriété, ou de patrimoine. Prenons quelques exemples, pour montrer que la maturité n’est pas la même sur tous les sujets.

  • Les photos, la musique, se sont essentiellement dématérialisés. On a vu émerger des solutions en ligne, où l’on paie un certain montant mensuel pour avoir le droit de télécharger / écouter en illimité. Mais le service s’arrête (les droits s’arrêtent) quand on arrête l’abonnement. C’est – littéralement – de la location de droit d’écoute.
  • Les voitures, les Vélib : aujourd’hui, un nombre croissant de personnes n’ont plus de voiture, plus de vélo, et elles louent ces actifs juste le temps de leur besoin. Mais la majorité des personnes reste tout de même attachée à ces actifs physiques – même si le calcul économique montrerait probablement que c’est plus rentable de louer, plutôt que de détenir – et entretenir – ces actifs.
  • Pour le logement, il y a des farouches tenants de la location (« je suis mobile, et je place mon capital ailleurs que dans la pierre »), mais la majorité des personnes a encore une vision très patrimoniale.
  • Dans les sociétés, autrefois, on raisonnait en intégration verticale : être propriétaire de la chaine de production, c’était maîtriser toutes les étapes de la création de valeur. On est passé ensuite à l’externalisation (la sous-traitance), voire à la délocalisation des services (ma comptabilité est réalisée en Inde). Cela induit une baisse des coûts, mais aussi une perte de contrôle. Avant, on était propriétaire de sa comptabilité, maintenant on est locataire de son information comptable (et plus globalement, de son système d’information, qui va de la paie à la gestion des stocks…).
  • Pour le travail, même, il y a deux approches. L’approche majoritaire, qui dit « je travaille pendant 40 (50) années, puis ce que j’aurai accumulé me paiera ma retraite » (approche patrimoniale, constitution d’un capital) et l’approche minoritaire, qui dit « je vais alterner des périodes de travail, et de mini-retraite, jusqu’à ma mort » (recettes et dépenses courantes).

Ces quelques exemples servent à illustrer que l’on n’a pas la même maturité sur les différents éléments de notre patrimoine, mais que l’évolution des dernières années tend vers la chose suivante : un lissage des dépenses dans le temps. L’investissement ponctuel lourd est remplacé par la dépense courante régulière. On n’est plus propriétaire, on est locataire temporaire. Et cela s’applique autant aux activités matérielles (production) qu’immatérielles (système d’information).
En poussant la réflexion, qu’est-ce qu’il y a de plus immatériel que la spiritualité, la religion, bref, Dieu ?
D’où un nouveau sens à l’expression « Dieu soit loué ».**

* Certes, il y a aussi des actifs immatériels, comme en attestent certains écrits d’avant la Nouvelle économie.
** C’est plus pour le jeu de mot : si Dieu était loué, cela signifie que l’on ne serait sous Sa protection que tant qu’on lui verserait des oboles régulières (contrat de location de salut éternel). Une sorte d’assurance après-vie. Concept à creuser, idée de startup ?

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4 réponses à Dieu soit Loué

  1. mamzelle dit :

    – Que Dieu soit loué !
    – combien?

    (pour info, Loués sont aussi ses deux Saints Sili & Cone …)

  2. Docthib dit :

    "Quand je marche dans la vallée de l’ombre de la mort, Je ne crains aucun mal, car tu es avec moi" dit David (sans Jonathan) dans son cantique, en tenant Silly Cone par la main. C’est pour ça qu’on l’appelle la Silly Cone Valley.

  3. externalisation saisie comptabilité dit :

    L’externalisation de la saisie de la comptabilité ne signifie pas tout de même perte de contrôle, le client doit toujours vérifier si les saisies sont corrects (en analysant les comptes). De plus, le respect de la qualité des prestations sont le maître mot des prestataires en externalisation de comptabilité.

  4. Docthib dit :

    Et la déontologie des prestataires en externalisation de la comptabilité leur interdit de faire de la publicité sur des billets de blog (dit le robot anti-tout). J’adore notamment le « payez-nous, nous ferons le travail, mais après, vérifiez ligne à ligne que nos saisies sont correctes ». Ou comment gagner du temps en externalisant…

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