Locataires

Nous sommes les locataires de nos vies, nous sommes les locataires de nos corps.

Comme un appartement, nous y entrons, pas vraiment sûrs de ce que nous allons y trouver. Certes, il n’y a pas de caution à l’entrée, mais on ne récupère pas de caution à la sortie non plus, pas de plus-value à la revente, car nous ne sommes que locataires de nos vies, locataires de nos corps.
Nous apprenons à vivre dans ces espaces, nous y faisons des aménagements, et cela devient confortable. Mais cela oscille souvent entre le trop et le trop peu.

Parfois, nous partons ailleurs, plus ou moins longtemps, nous quittons cette vie, nous quittons ce corps, nous ne sommes pas vraiment partis (car toujours locataires), mais nous sommes ailleurs. La période peut durer. Et puis il arrive que nous revenions dans notre vie, dans notre corps, et nous les voyons différemment, avec l’oeil de la personne qui a vu qu’il existait d’autres vies, d’autres corps, d’autres appartements. Parfois aussi, nous en apprenons plus sur l’histoire de l’appartement, d’où il vient, ce qui est resté imprégné dans les murs, dans l’ambiance du lieu où nous vivons, et qui peut remonter à plusieurs générations. Locataires d’un lieu qui ne nous appartient jamais totalement.

Quand vient la fin, nous rendons la vie, nous rendons le corps, après un état des lieux qui indique « état d’usure ». Nous rendons la clé, et nous partons, sans valise.

Nous sommes tous des gens du voyage.

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Paradoxe pédagogique

J’aimerais faire une petite histoire dessinée dans le style de Boulet (je suis en train de relire toutes ses Notes). On voit un homme qui travaille le soir, qui prépare des trucs sur son ordinateur. Quand il se couche, il s’endort en préparant ses séquences. Le matin, il se lève, et tout en buvant son thé vert, il réfléchit à l’ordre des présentations, à telle notion qu’il pourrait illustrer comme ceci, à telle idée. Il monte doucement en régime et en activité. Pendant son trajet, une bulle de pensées tourne autour de sa tête. Et quand il arrive en salle de cours, il est chargé à bloc, plein d’énergie, et il a envie d’en découdre. Et il se retrouve face à des élèves à peine réveillés et amorphes. Contraste.

Je vais la dire autrement, pour ne pas sonner comme « Bande de petits ingrats, je me casse les amandons depuis 25 ans pour vous et vous ne daignez même pas m’admirer ! », car ce n’était pas mon propos.

En fait, quand j’étais étudiant, et que j’arrivais mal réveillé et amorphe dans ma salle de cours, je n’aurais jamais imaginé le processus intellectuel et physique qui animait la plupart de mes profs depuis l’aube, voire la veille… Cela tient du feu sacré, mais aussi du baptême du feu, et du spectacle. There is no business like show-business.

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Réflexions sociologiques sur fond d’Air France : réseaux sociaux, mails et immédiateté

Voici donc le troisième thibillet d’une série (le premier est ici, le deuxième là) concernant ma galère à l’aéroport de Figari avec Air France. En résumé, j’ai proposé que ceux qui le souhaitaient m’envoient leurs cartes d’embarquement par mail, pour que je fédère les plaintes en une plainte collective.

Nous sommes donc dimanche matin, 30 juillet. La nuit a été courte, puisque j’étais chez moi (retour de Roissy) à 2h du matin, et réveillé à 7h. Dès 8h30, je suis attelé à la rédaction de ma lettre de plainte, publiée vers 10h45 sur la page FB d’Air France. Je double cette publication par l’envoi d’un mail collectif aux passagers qui m’ont contacté (4 familles, à ce moment-là), en mentionnant les liens vers les statuts Facebook « et si vous n’arrivez pas à lire » (ou s’ils ne sont pas inscrits sur Facebook), je mets dans le corps du mail l’intégralité de ma lettre à Air France. Le sujet du mail est lui-même parfaitement explicite (« AF 4257 // Publication de ma plainte – Faites suivre sur Facebook, Twitter »). J’en profite pour donner aux passagers deux liens sur les demandes d’indemnisation.

Vient alors le temps de l’attente. On est dimanche matin, fin juillet, et les principaux protagonistes (le Community manager d’Air France, les passagers qui m’ont écrit) sont encore en sommeil.

1. Pour ce qui est de ma publication Facebook :

Dans l’ordre, Air France répond en premier, 4h30 après ma publication. Pas génial, en terme de réactivité. Certes, nous sommes dimanche, mais sur un week-end de fortes perturbations / annulations de vols.

Puis une passagère commente à 20h (9h après) et Air France lui répond en 42 mn.

Une autre passagère partage la publication à 23h30 (13h après)

Je relance Air France par un commentaire 24h après, et encore 2 passagers commentent, l’une 1,5 jours après publication de ma lettre, l’autre 2 jours après.

Donc pour Facebook : une lettre publique, 4 passagers qui commentent (rappel : à ce moment, 6 familles, soit 23 passagers, étaient dans la boucle d’information). Et mes quelques incursions sur Twitter ne donnent aucun résultat (pas de retweet).

Mes commentaires et analyses sur Facebook :

Rappelons une évidence : les réseaux sociaux sont les réseaux de l’instantanéité. Vite publié, vite oublié. Donc si l’on veut faire « caisse de résonance », il faut faire un battage médiatique très rapide, pour créer un effet d’accumulation. Ici, je qualifierais l’effet d’accumulation (= commentaires, partages) comme « raisonnable » : pas déshonorant, mais pas non plus mirifique. Cela peut s’expliquer par des raisons extérieures (qu’on peut résumer par « faible disponibilité des passagers », et j’y reviendrai en fin de ce thibillet), mais aussi internes à moi-même. Je me rends bien compte que j’étais là dans une situation que beaucoup connaissent bien : quand on a rédigé quelque chose d’important, qui nous a pris du temps, et qu’on s’attendrait à une réaction immédiate (qui a parlé d’e-mail ?)

2. Pour ce qui est de mes mails aux passagers (familles) :

Voici à nouveau quelques éléments de mesure pour réflexion.

Mon premier mail, ciblé sur 4 familles : 2 personnes ont répondu.

Mon deuxième mail, récapitulatif des premiers résultats, envoyé à 6 familles : 4 personnes ont répondu.

Mon troisième mail, copiant le message reçu d’Air France qui s’engageait sur un dédommagement, envoyé à 7 familles : aucune personne n’a répondu.

(Ce qui fait, par exemple, qu’une des familles n’a jamais réagi à aucun de mes mails).

Depuis, j’ai été contacté par des mails individuels d’autres passagers : 4 en tout. Je leur ai envoyé l’ensemble des mails précédents, pour leur information, en disant que je transmettais leurs cartes d’embarquement à Air France. Sur ces 4 mails individuels, j’ai eu 2 réponses.

Et anecdotiquement, sur ces 4 personnes, voici le message de l’une d’entre elles :

[Pas de formule de politesse] Voici la photo de ma carte d’embarquement pour le vol AF4257 qui a été annulé de Corse à Paris, le 29 juillet. [Pas de formule de politesse, Signature]

On ne peut pas faire plus sec.

Mes commentaires et analyses sur ces mails :

Je vais aller au plus simple : si j’avais été « en face », c’est-à-dire un passager de ce vol annulé, et qu’un des passagers s’était proposé pour coordonner la plainte, et que ce passager m’avait tenu au courant de ses efforts, avec 3 mails détaillés, il me semble que j’aurais répondu à chacun des trois mails, avec remerciements et encouragements (et ça peut tenir en une phrase, pas besoin d’en faire une lettre de château). Certes, on peut avancer les arguments qu’on veut sur le mois d’août et la supposée déconnexion des personnes, mais toutes ces personnes ont tout de même souhaité m’envoyer un mail au départ, donc elles avaient jugé que cette affaire méritait une connexion.

J’ai quelques tentatives d’explication :

  • l’effet « passager clandestin ». Comme je l’ai expliqué dans ce thibillet, ça ne coûtait (presque) rien de m’envoyer un mail au départ avec copie des cartes d’embarquement, et l’espérance de gain (remboursement) augmentait, donc c’était une loterie gagnante. À partir de là, beaucoup de personnes ont la tentation d’agir en passagers clandestins : je profite d’un transport en commun sans contribuer individuellement. Cela marche quand tous les autres passagers paient, et cela marche moins bien quand il commence à y avoir beaucoup de passagers clandestins (passifs) par rapport aux passagers payants (actifs). Pour information, un autre passager à répondu à un de mes mails groupés, en mettant tout le monde en copie :  dans un mail détaillé et informé, il avançait des arguments juridiques et indiquait des pistes d’action. Il n’a eu aucune réponse à son mail.
  • l’effet « amnésie d’un mauvais souvenir ». Confrontées à ce genre de crise, beaucoup de personnes n’ont qu’une envie, c’est d’oublier la situation. C’est notamment là-dessus que peuvent compter les compagnies aériennes : une fois la crise passée et le problème résolu, on ne souhaite pas se replonger dans la situation en remplissant un dossier. Cela dit, mon intuition ici, c’est que tous les passagers ont effectivement rempli un dossier de demande de compensation…
  • l’effet « post-rationalisation égoïste ». C’est un discours que j’ai pu entendre quelques fois, et qui procède ainsi « Ouais, mais si Untel se charge du dossier, c’est parce que ça lui fait plaisir et/ou il est doué pour ça, donc en fait, il n’y a pas besoin de le remercier ».
  • l’effet « amnésie des mails ». On reçoit un mail, on n’y répond pas tout de suite, et puis on en reçoit d’autres qui viennent se mettre au-dessus de la pile (en terme d’attention), et puis d’autres… C’est notamment pour ça que j’essaie toujours de faire en sorte que mes mails à traiter ne dépassent pas une taille d’écran, car tout mail ancien qui disparaît de l’écran… disparaît de la mémoire.

Voici pour le thibillet de ce jour. Il me reste un ou deux thibillets à écrire : un thibillet plus court sur Air France et Internet ; et peut-être (pas sûr), un ultime thibillet sur mon vécu personnel de toute cette expérience sociologique.

 

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Petites observations sociologiques sur fond d’Air France : dynamique de l’engagement (2/…)

Comme je le disais dans mon précédent thibillet, suite à une annulation de vol Air France, je suis allé voir tous les passagers que je reconnaissais dans l’aérogare pour leur donner mon adresse e-mail. Mon propos était : « envoyez-moi une copie de vos cartes d’embarquement, nous aurons plus de poids si nous faisons une plainte collective » (et je rajoutais « je suis un passager comme vous, je vais faire ça sur mon temps libre »).

1. La dynamique de l’engagement

En faisant cette proposition, j’obéissais à deux principes. D’une part, ma logique de philosophie de l’action (cf. thibillet précédent), et d’autre part, un intérêt personnel : je savais que ma demande d’indemnité à titre individuel serait probablement ignorée superbement par Air France, tandis qu’une class action collective aurait plus de chances.

J’avais aussi deux limitations en tête : premièrement, je ne voulais pas que cette histoire me prenne trop de temps à gérer ; deuxièmement, il fallait que je convainque les passagers de partager leurs informations pour constituer le dossier.

J’ai donc opté pour la solution qui répondait à ces deux critères : au lieu de leur demander leur adresse e-mail pour les recontacter après (supplément de travail pour moi + méfiance de leur part à me confier leur précieuse adresse e-mail que je pourrais revendre à des sociétés de spam), je leur ai donné mon adresse mail, à charge pour eux de m’envoyer leurs documents de voyage (je suivais en cela le conte sur l’avare qui se noie).

Sur la trentaine de familles à qui j’ai pu dire ces choses, tous ont pris mon adresse mail, sauf une dame, qui avait l’air de se demander quelle entourloupe se cachait derrière ma proposition. Comme pour les autres, j’avais conclu ma proposition devant elle par « si vous êtes intéressée, venez me voir avec de quoi noter mon adresse e-mail », mais elle n’est pas venue…

Donc, première observation : même dans un groupe uni par la même crise, un engagement collectif peut se créer, mais il est très fragile au début. En effet, le premier calcul qui vient à l’esprit est un calcul individualiste : « si je vais vite négocier tout seul dans mon coin avant que les autres ne bougent, je m’en sortirai (et pas eux) ». Et mon expérience de la nature humaine m’amène à penser que dans ce genre de situation, la propension à l’individualisme augmente au fil du temps, du stress et de la fatigue.

Donc pour créer un engagement, il s’agissait de trouver un moyen « sans engagement » : je donnais mon adresse mail, et je disais que j’allais m’occuper de la plainte collective, donc je créais un espace « coût-bénéfice » où le coût était faible pour la famille (envoyer un mail *et c’est tout*) et le bénéfice potentiellement élevé (une probabilité plus importante de recevoir quelques centaines d’euros de compensation par personne).

2. La dynamique de l’instant présent

Devinez combien j’ai reçu de mails, sur la trentaine de personnes qui avaient pris mon adresse mail ?

Quatre avant que j’envoie ma lettre de plainte « collective » sur Facebook, puis deux de plus depuis.

Trois d’entre eux ont été envoyés dès le samedi soir ( = au moment même où j’avais fait ma proposition, heure zéro), et le quatrième a été envoyé tôt le dimanche matin.

Certes, il faut tenir compte du fait que :

  1. Nous n’avons pas tous la même accessibilité à la technologie : ceux qui ont envoyé le mail samedi soir l’ont fait depuis leur téléphone, en joignant leurs cartes d’embarquement, ce qui nécessite un niveau d’ouverture technologique que tout le monde ne possède pas.
  2. Plusieurs passagers avaient leurs téléphones déchargés au bout de toutes ces heures passées à attendre, téléphoner et se connecter à Internet, donc il ne leur était pas possible d’envoyer le mail tout de suite (il y avait tout de même des possibilités de chargement dans l’aéroport, notamment au comptoir d’information).
  3. Il ne s’est écoulé que 24h depuis ma proposition. Certaines familles sont peut-être encore en transit. Mais mon hypothèse, c’est que plus le temps va passer, moins je vais avoir de probabilité de recevoir de nouveaux mails. À ma connaissance, personne n’a dormi dans l’aéroport (qui ferme la nuit), donc tous ont trouvé un hébergement, donc tous ont rechargé leur téléphone / ordinateur dans la nuit. C’est d’ailleurs ce qui explique le mail reçu ce matin.
  4. Il existe plusieurs hypothèses alternatives (pouvez-vous deviner lesquelles ?) que je développerai dans un thibillet suivant).

Sur ces premières observations, je m’arrête là pour ce thibillet, pour ne pas allonger la sauce. Il y aura une suite et fin, si j’ai le temps de noter mes autres réflexions.

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Petites observations sociologiques sur fond d’Air France : introduction (1/…)

Hier, j’ai eu des soucis sur mon vol retour avec Air France. Nous étions 200 passagers débarqués sans information, et le vol a été annulé quelques heures après (lien vers la page Facebook où j’ai posté ma lettre). Je développe ici cette histoire (qui est toujours en cours à l’heure où j’écris), car elle me permet de faire quelques expériences et observations sociologiques – sans grande prétention, c’est plutôt pour nourrir ma propre réflexion – et vos commentaires sont les bienvenus, comme toujours. L’ensemble des réflexions étant long, j’en livre juste la première partie (introduction) ici, en attente de la suite…

1. La philosophie de l’action

Hier, quand nous avons été débarqués du vol, il y a eu les réactions typiques, j’en cite ici quelques unes :

  • ceux qui vont au comptoir d’information pour obtenir de l’information
  • ceux qui vont au comptoir d’information pour gueuler, soit pour établir un rapport de force (dans la croyance que « si j’attaque le premier, alors j’aurai droit à des compensations »), soit pour évacuer sa frustration (« je vais me payer un responsable, et je m’en fous s’il n’est pas responsable »)
  • ceux qui commentent à haute voix, en petit groupe, de manière désabusée, sur la faillite du modèle français
  • ceux qui appellent un proche pour lui raconter
  • ceux qui attendent
  • ceux qui bougent

Dans ce genre de situation, j’ai constaté que le fatalisme désabusé (asseyons-nous et attendons) a tendance à me déprimer encore plus, car j’ai le sentiment de ne plus rien maîtriser. Aussi, ma philosophie dans ces cas-là, c’est de bouger avant tout : me déplacer, aller écouter, revenir, discuter, passer aux toilettes pour remplir une bouteille d’eau, revenir, écouter, échanger. En fait, peu importe que certains mouvements ne soient pas « efficaces », il s’agit plus de me maintenir en action – aussi futile soit cette action. En revanche, c’est tout de même une philosophie de l’action, c’est-à-dire que chaque geste a un objectif visant à résoudre le problème ou une partie du problème. Aussi, par opposition, je ne me vois pas appeler un(e) proche pour lui raconter mes malheurs et qu’on ergote ensemble sur la splendeur passée du service à la française. En revanche, remplir une bouteille d’eau, c’est contribuer à s’hydrater, et si ça ne résout pas totalement le problème, c’est tout de même une gestion active de la situation. En d’autres termes, bouger m’aide à maintenir ma motivation.

2. Les initiatives personnelles et la coordination collective

Un des passagers m’a inspiré par son action. Comme beaucoup d’entre nous, il a appelé les services d’Air France, et comme beaucoup d’entre nous, il patientait sur un message sirupeux qui se terminait 9 fois sur 10 par « Tous nos conseillers sont actuellement en ligne, merci de rappeler ultérieurement ». (Rappel : 35° dans l’aérogare, plusieurs vols annulés, soit un millier de personnes dont beaucoup d’enfants en bas-âge). Mais ce monsieur a persisté, il s’est entêté à rappeler, et au bout de de quelques euros (car il faut rappeler que ces appels sont facturés par Air France, y compris le temps d’attente qui représente 90 % du temps de conversation total), il a eu un conseiller en ligne, et lui a exposé la situation. Certes, à l’autre bout de la ligne, le conseiller s’est contenté de dire qu’il allait transmettre à ses chefs (et la suite a montré la priorité toute relative que ses chefs accordaient à un millier de personnes en rade), mais au moins, il avait agi.

Et il avait apporté un argument intéressant dans sa conversation : 200 passagers, ce sont 200 appels téléphoniques individuels ; mais s’il y a un problème dû à la déshydratation (il y avait des personnes âgées, des enfants voyageant non accompagnés, des bébés), cela se transforme en plainte collective.

Du coup j’ai eu une idée : je suis allé voir les gens de mon vol, et je leur ai proposé de m’envoyer leurs cartes d’embarquement pour faire du nombre. Une sorte de Class Action (recours collectif), en d’autres termes.

Et c’est là que l’expérience sociologique commence.

(suite dans un prochain thibillet…)

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Ubuntu – Heureuzeul

Heureuzeul : n. m. (être en …) état d’esprit qu’on peut avoir quand on écrit « PROUTS » à Ruzzle, et que le logiciel répond « Bravo ! Continuez comme ça ! » Sentiment mêlé de honte et de fierté.

Par extension : dans une réunion, se voir attribuer la bonne idée d’un autre (et ne pas démentir, prendre un air modeste).

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April 20th: Isaac Newton made a +100% profit on this day, almost 300 years ago

Dear readers and finance enthusiasts,

Price is not value…

on this day (April 20th), but in 1720, Sir Isaac Newton decided he could no longer bear the frenzy of the markets around the South Sea Company shares (first IPO in England), and decided to sell them, thus making a whopping +100% profit in the operation!

Alas, and this is a reminder that past performance is not a guide for future performance, Sir Isaac Newton would then enter the game again, and lose much much more in the end… More info here, and on Wikipedia and thanks to Jason Zweig (WSJ) for bringing this to our attention today.

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Passe-temps

tux_clockIl y a longtemps, Christian R. m’avait dit que le montage vidéo était une des activités (sinon l’activité) qui avait le pire rapport entre le temps (énorme) qu’on y passe et le temps (relativement minime) de la vidéo finale. Un rapport effort/résultat, en gros. Et ces derniers jours de vacances, j’ai testé autre chose : les trucs qui bouffent du temps sans qu’on s’en rende compte. C’est-à-dire, par exemple : je vais au cinéma, pendant la première heure, je suis totalement dans le film, la 2ème heure aussi probablement, donc je ne me rends pas compte du temps qui passe. En revanche, si le film dure 2h20 comme les derniers Marvel, il y a un moment où je me rends compte du temps qui passe.

Je viens de trouver l’activité où je ne me rends absolument pas compte du temps qui passe. Linux. Déjà l’informatique en général, améliorer des choses, télécharger des petits programmes pour gagner du temps, optimiser, ça me prend du temps et je ne m’en rends pas compte, je pourrais rester 1/2h sur l’optimisation d’un fichier de configuration du clavier sous LibreOffice. Mais Linux, alors là… C’est de très loin le grand gagnant de « je ne me rends plus compte de l’heure qu’il est ». En deux jours, j’ai testé Lubuntu 16-04, AntiX, Puppy Linux, Slitaz, Toutou Linux, Arch Linux. Et là je me mets à apprendre à écrire des scripts pour me bricoler un programme d’expansion de texte. La journée et la nuit vont passer vite…

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De (Lockheed) Constellation à (Omega) Constellation

Zeno_Dichotomy_ParadoxCette semaine, j’aurai passé mon temps dans les aéroports. Je sais que, comparativement à certains de mes camarades travaillant en entreprise, mes statistiques seront dérisoires, mais 4 vols en 5 jours font que je connais désormais intimement le terminal 2F de Charles de Gaulle. Nous nous tutoyons presque.

Et je viens soumettre ici un problème scientifique à la sagacité de mes lecteurs / -euses vaguement intéressé(e)s par les énigmes calculatoires. Il se trouve que la compagnie sur laquelle je voyage prend soin de communiquer abondamment avec moi. Je ne peux pas mentionner le nom de cette compagnie, pour des raisons évidentes de confidentialité, il vous suffit juste de savoir que c’est une très grosse compagnie aérienne française, la plus grosse, je pensais même que c’était la seule, mais en fait non, j’en apprends tous les jours sur le niveau de mon ignorance.

Donc, ladite compagnie aérienne m’écrit plusieurs mails pour me dire que je peux m’enregistrer en ligne. Après quelques avanies, qui sont probablement de ma faute, car je ne suis pas très doué avec l’Air Inter Net la télématique, j’arrive à m’enregistrer. Voilà alors la séquence chronologique des messages d’amour que la compagnie aérienne m’envoie :
12h30 aujourd’hui – enregistrement en ligne. Heure de décollage prévue = l’heure initiale = 18h25.

13h – Texto = départ décalé à 20h10.

15h50 – Nouveau texto = départ décalé à 20h40.

15h55 – 3ème texto = départ à 20h20.

16h05 – 4ème texto =départ à 20h35.

Il va donc falloir raisonner par dichotomie. Est-ce qu’un(e) de mes lecteurs/euses pourrait appliquer un algorithme par itérations pour estimer mon départ ? J’ai l’intuition que le départ sera quelque part entre 20h20 et 20h35, mais je ne sais pas comment intégrer la pondération des horaires précédents dans la dichotomie. Et j’ai la vague intuition qu’un 5ème texto pourrait tout bouleverser : imaginez qu’il mentionne 23h, ou – joie – 18h26 ? Bref, je suis perplexe.

[edit] Finalement, après une sorte de communication stroboscopique (annonce de l’embarquement à 20h15, puis 20h, puis 20h05, puis 20h10, puis 20h…), le décollage a eu lieu un peu après 20h55. Donc l’algorithme devait tenir plus de la théorie du chaos que de la loi normale… [fin d’edit]

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Combien de timbres mettre ?

StampsNote pour moi-même, et pour éventuellement d’autres qui ne s’en sortent jamais avec leurs timbres :

Ce système, simplifié à retenir, marche pour les tarifs Lettre prioritaire (l’ancien tarif normal), Lettre verte (l’ancien tarif lent), Ecopli.

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Batana – Skryzer

Scrabfr1Skryzer : v.t. Avoir un Scrabble, et ne pas arriver à placer les lettres sur le plateau.

Par extension : quand on te raconte une discussion où tu n’étais pas, penser à un jeu de mot qui aurait juste été génial à ce moment.

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Ubuntu – Slivover / Batana – Slivover

Slivover : v.i. Cocher enfin une tâche de la ToDo list qui attendait depuis des mois, et regarder avec fierté le résultat en se disant « ça c’est fait »

Par extension : passer un coup de fil à un(e) ami perdu de vue, et tomber d’accord pour dire qu’ « on devrait se faire ça plus souvent ».

Slivover : v.i. se rendre compte que toutes les tâches de la ToDo list ne requièrent pas la même énergie. Certaines cases (« poster un chèque ») demandent si peu d’énergie que la case cochée apparaît à peine comme une formalité ; d’autres cases (« corriger mes copies ») sont tellement titanesques que quand on les coche finalement, on s’attend à une explosion de joie, un déferlement d’hormones, des trompettes célestes, des jeunes filles vous offrant des fleurs, des adolescents vous dédiant un solo de guitare tandis que des cuisiniers vous servent un cassoulet fumant et que des anges vous caressent noblement le front. Se rendre compte que terminer une tâche ne déclenche rien de tout ça. Slivover.

Par extension : envoyer un rapport qui a demandé des jours de travail, et ne pas recevoir de réponse.

Ousse-slivover : ou recevoir une réponse du type « Bonjour, il y a une typo p. 47. Merci de faire le nécessaire. »

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Ils vont tous mourir… et nous aussi

Skeleton David Bowie, Prince, Billy Paul… Mais aussi Umberto Eco, Michel Delpech… 2016 est, selon certains, une année terrible. Et pour que la liste soit exhaustive (et à jour), autant se connecter sur Wikipedia et son compteur funèbre. À chaque annonce de décès, les réseaux sociaux s’enflamment (plus ou moins) de « RIP » et d’images / vidéos / articles de commémoration.

Voici ma pensée du jour : ils vont tous mourir. Tous. Et nous aussi.

Voici donc quelques réflexions personnelles sur le sujet :

  • Attendre qu’une personne meure pour la re-découvrir, c’est vraiment dommage. Cette pensée, peu originale, vaut aussi bien dans la sphère personnelle que dans la vie publique. Donc qu’est-ce que je fais depuis des années ? Je me dis qu’Eric Clapton va mourir un jour, et Bruce Springsteen, et moi (dans cet ordre). Ce qui me fait écouter Eric Clapton tant que je peux, tant que je veux, dès maintenant. C’est ce que j’ai fait avec JJ Cale pendant des années (j’ai même eu la chance de le voir en concert au Grand Rex), et puis il est mort, et je continue à écouter du JJ Cale.
  • Les artistes ont le droit de vieillir, et de changer, et de mourir. Ils ont le droit, et même le devoir de se renouveler, de ne pas toujours faire la même chose, quoi qu’en souhaitent leur fans. Quand je regarde Paul Personne ou Renaud, je trouve leurs parcours superbes et touchants et humains. Et je n’attends pas d’eux une perfection de stars à chaque moment. J’espère que ceux qui ont entouré David Bowie et Prince ont su aimer l’être humain qui était caché par la lumière aveuglante de la star.
  • Enfin, je paraphrase Philippe Djian : dans son roman Echine, le narrateur se fait apostropher par sa petite amie :
    • « Mais pourquoi tu ne lis que des écrivains morts ? »
    • Et il lui répond superbement :
    • « Ah, parce que tu penses qu’un mec comme Richard Brautigan peut mourir ?! »

C’est ce que j’ai prévu de répondre le jour où l’on m’annoncera qu’Eric Clapton est mort. D’ici là, j’écoute sa musique, les interviews qu’il peut donner, je profite du moment. Et après sa mort, je continuerai probablement.

La vraie mort, c’est l’oubli des autres. On va tous mourir, mais je ne vous oublierai pas.

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Novlangue ou désuétude ?

DictionaryJe suis en train de corriger des cas (encore), mais il fait beau, donc tout va bien (merci de demander).

Je n’ai pas d’opinion sur le déferlement d’informations sur Salah Abdeslam, sinon qu’il faut laisser la justice faire son travail (qui va être long…). En revanche, j’ai les oreilles écorchées par le terme « transfèrement ». Ne pouvait-on pas simplement dire « transfert » ? Et je pensais au  néologisme hideux « dangerosité » qui a remplacé « danger » (qui faisait pourtant bien son travail, merci pour lui).

Je commence donc à écrire mon coup de gueule scrogneugneu, et tout à coup, un doute me saisit : ai-je bien raison ? Un coup de Wiktionaire, et voilà la réponse : transfèrement est parfaitement valide, car c’est un terme juridique déjà employé au XIXème siècle. Paf dans ma gueule.

En revanche, dangerosité est bien une création très tardive et (à mon sens) superfétatoire, il n’y a qu’à voir la liste des quasi-synonymes (nocivité suffit, non ?)

C’était la minute de Monsieur Encyclopède, retour aux corrections de cas.

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Le bon mot de l’ascenseur

L’autre jour, je prends l’ascenseur à mon boulot, et je croise une collègue.

Je lui tourne un compliment galant, et elle me répond « Je ne suis pucelle que tu crois. »

Joli…

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Mon semi marathon de Paris 2016

Voici donc le compte-rendu de mon semi-marathon de Paris 2016, notamment pour celles et ceux qui m’ont encouragé par un don à la Fondation ESCP Europe (cf. liste en bas).

Quelques mots sur la préparation :

  • Mon mois de janvier a été marqué par un lumbago + une grosse crève = au moins 15 jours d’arrêt de la course à pied. Si l’on compte la fin d’année festive, ça faisait plus d’un mois sans courir, et j’ai redémarré de zéro (ou quasiment) vers la mi-janvier, d’abord par des petites distances (car vigilance au retour de lumbago), puis par 1 à 2 sorties par semaine.
  • La semaine au ski a été sans course à pied et avec énormément d’excès de bouffe (charcuterie, fromage, pâtes…)

Je partais donc pour ce semi avec une attitude mitigée : je ne visais pas un temps, mais j’étais inscrit dans les dossards « 1h50 », ce qui était un objectif raisonnablement ambitieux pour un vieux de presque 48 ans avec un entraînement passable.

Le matin même

Réveil 6h30, thé vert et pain complet, tenue de sport enfilée, je suis à 7h30 dans la rue. Il fait 1°C.

J’arrive à Vincennes vers 8h30 et je rejoins Fabien de la Fondation ESCP Europe qui fait le pied de grue avec les T Shirts rose fuschia (cf. preuve #1) et surtout un Thermos de café. Je le bénis abondamment en buvant mon café chaud. Il doit faire 2°C maximum, et je grelotte malgré2016-03-06 Semi T Shirt mes 3 couches de vêtements (T shirt technique du marathon de new york + polaire + T shirt rose fuchsia de la Fondation). On papote un peu et je rejoins mon sas à 9h10.

S’ensuivent alors 30 minutes d’attente dans le froid et le vent, je trompe l’ennui en envoyant quelques textos à des copains, et mes doigts tremblent tellement que j’ai du mal à taper les bonnes lettres. Dieu qu’il fait froid.

Puis vient enfin le départ.

Les 5 premiers kilomètres : allégresse et rôdage progressif (5’28 au km, soit 11 km/h)

Le passage de la ligne de départ me déclenche une grande émotion, comme très souvent. Je suis une midinette qui s’émeut de ces moments de lancement, de cet effort collectif, je trouve ça beau, et tant pis si tu me prends pour une poupée Barbie.

Le panneau du km 1 arrive au bout d’un temps assez long, me semble-t-il, je suis encore en train de me chauffer, et comme j’ai choisi de ne pas prendre de montre, j’en suis à courir à la sensation, en espérant ne pas être parti trop vite (un peu d’essoufflement, pouf pouf).

Le panneau du km 2 arrive dans le soleil, je me dis « encore 10 fois ça ». Les jambes tournent, le souffle est calé, et le peloton commence un peu à s’étendre (traduire = c’est encore dense, mais on commence à ne plus trop zig-zaguer pour éviter les autres coureurs).

Je me laisse porter par ma musique, par mes pensées, et le temps passe, foulée après foulée.

Au bout d’un moment, je me dis « tiens, j’ai pas vu le panneau du Km 3, c’est cool, je suis en route pour le Km 4 ». À ce moment, passe le meneur d’allure « 1h50 ». Je décide de le suivre, pour essayer de faire la course en 1h50. Ça m’occupe un peu, car sur ce genre de course, on peut très vite se laisser distancer, d’abord quelques mètres, puis 10, puis 30 mètres, et après, bonne chance pour rattraper le meneur. En fait, au fil de la distance, je me laisse progressivement distancer, sans me forcer à remonter. Je n’en suis qu’au début de la course, et je garde le souvenir cuisant de marathons où j’ai trop brûlé mon énergie au début, et je l’ai payé très cher sur la fin. Donc je laisse le drapeau du meneur d’allure danser à 30 mètres devant, et tant pis pour le temps.

En fait, j’arrive ainsi directement au panneau Km 5, ce qui me fait bien plaisir : allez, un quart de fait.

Les kilomètres 5 à 10 : vous allez voir ce que vous allez voir ! (5’13 au km, soit 11,5 km/h)

Je continue et j’accélère progressivement, pour ce qui va être mon tronçon le plus rapide. Il fait beau (mais froid, l’ai-je déjà mentionné?) et la musique me coule fluidement dans les oreilles. Ma playlist historique a évolué, même si j’en garde quelques morceaux. Là, depuis quelques mois, je tourne sur les derniers disques de David Crosby, Mark Knopfler, Suzanne Vega et Paul Personne. Au kilomètre 6, c’est Paul Personne, Un peu jaloux qui m’accompagne.

Et j’arrive au ravitaillement, un peu par surprise : tout à coup, je vois une contraction du peloton, tout le monde se presse sur la droite, et je mets quelques secondes à comprendre. On n’est qu’au 6ème kilomètre, je décide de zapper l’eau et de continuer. Du coup, je repasse devant le meneur d’allure « 1h50 », l’espoir est encore possible.

On arrive à Bastille, gigantesque place quand elle est sans voitures, avec la foule des supporters, et les coureurs qui passent dans les deux sens (aller, et retour). Soleil, pavés, foule, orchestres qui jouent.

Km 7. Rue de rivoli. Un panneau du semi-marathon : « C’est pas le moment de penser au shopping », qu’est-ce qu’ils sont drôles…

Le meneur d’allure « 1h50 » me dépasse à nouveau, avec sa garde rapprochée de coureurs qui s’accrochent, je le vois s’éloigner progressivement devant moi.

Vers châtelet, on tourne à gauche, et hop, c’est le Km 9 et on tourne encore une fois : on a fait demi-tour, retour vers Vincennes, mais c’est le Km 9, donc nous ne sommes pas encore à la moitié du parcours. Il n’empêche, rien qu’à me dire que je retourne vers Vincennes, je me sens dans la deuxième moitié de la course.

Le Km 10 est un portail blanc gonflable en bord de seine, avant qu’on ne bifurque à nouveau.

Les kilomètres 10 à 15 : pensées diverses et petit coup de mou (5’48 au km, soit 10,4 km/h)

Bastille à nouveau, mais dans l’autre sens. La place est toujours aussi grande, soleil, rues de Paris avec les pompiers qui disent, comme toujours, « allez les filles ! ».

Quand je cours, j’ai des pensées qui s’écoulent de manière fluide, des idées qui viennent spontanément.

Par exemple : le hashtag # des années 2010, c’est comme le 3615 des années 80. On peut dire « hashtag j’existe » comme on disait autrefois « 3615 j’existe ».

Ou bien je me dis que pour la prochaine course, je me mettrai un slogan dans le dos « Si vous m’encouragez, je vous composerai sur le champ un mini poème ».

Je regarde aussi les dos des coureurs. Du coup, je me rends compte qu’il y a vraiment une typologie à faire sur les coureurs :

  • Il y a ceux qui courent dans une tenue de sport neutre, sans inscription. Ils sont assez nombreux.
  • Il y a ceux qui ont mis le T shirt offert pour le semi marathon, un bleu vert turquoise. Quel est le message ? « Je cours dans la tenue officielle » ? « Je n’avais pas d’autre T shirt propre » ?
  • Il y a ceux qui courent pour une cause. Ils sont assez nombreux, ce qui est une bonne chose : je ne me rappelle pas autant d’humanitaire dans les courses parisiennes d’il y a 10 ans. Les causes sont variées, et ce que j’ai vu le plus, c’était les Chrétiens d’Orient et le don de plaquettes.
  • Il y a ceux qui courent en arborant le titre de leur club de sport (AS Fécamp, Triathlon gargouillais, FBNSC Caen…)
  • Il y a ceux qui arborent le nom de leur entreprise. Pas nombreux, bien moins nombreux qu’il y a 10 ans… C’est quoi la cause ? Un manque de budget de la part des entreprises ? Un manque d’envie de la part des coureurs ? (« Je ne suis pas mon entreprise »).
  • Enfin, il y a ceux qui ont bâti leur propre message, genre « wonderwoman », « Paulo », « Rashmout family team »…)

Tout ça m’aide à passer le temps et les kilomètres qui s’égrènent dans mes cuisses.

Km 15. Je me souviens maintenant pourquoi j’ai arrêté de courir des marathons. Je sens la fatigue, j’ai envie de m’arrêter, mais bon, il reste « juste » 6 km. Que dirais-je s’il me restait « juste » 27 km à courir ?

Les kilomètres 15 à 20 : la route monte et je descends (5’55 au km, soit 10,1 km/h)

Je ne suis pas dupe : depuis Bastille, on a eu beaucoup de faux-plats. On croit que c’est plat, alors que ça monte insensiblement, traîtreusement. Puis on arrive sur du plat, on peut ré-accélérer et au bout de 100 ou 200m, cette sensation dans les cuisses : à nouveau un faux-plat…

Heureusement, dans mes écouteurs, Mark Knopfler et son « Broken bones ». Quand j’avais entendu ce morceau pour la première fois, j’avais consulté les experts de ma galaxie (Hans Moretti et Pablo Coppertone) en leur disant « Non mais là, ça flagre, c’est du JJ Cale tout craché ! Mark Knopfler a fait un hommage à feu JJ dans cette chanson ! » Les deux experts m’avaient répondu en substance « Ouais, euh, peut-être, mais non, ça flagre pas tant que ça, heu… » Et là, titillé par la curiosité, je fais une recherche, et Mark Knopfler lui-même avoue en effet un lien. Comme quoi, courir un semi-marathon, ça affine l’oreille, qui l’aurait cru ?

Km 16. Ravitaillement. Je marche en buvant mon eau. Un grand black bénévole m’interpelle « Hé Christophe, il faut courir ! ». Quelle bonne idée, d’avoir les prénoms sur le dossard : je me fais encourager et ça marche bien, je repars donc après un remerciement.

Km 17. Je suis dépassé par une queue de cheval qui court comme si c’était une promenade de santé, elle est athlétique et élastique, et court avec énormément de décontraction. La vie est injuste. Quand je démarre un semi, pendant quelques kilomètres, je suis un beau V en action, le torse évasé, la foulée ample, le museau au vent, je respire la santé et le bon grain dont j’ai été nourri. Et puis les kilomètres passent, et le V s’inverse : j’ai l’impression que mes épaules s’effondrent sur mes hanches, et mes hanches coulent dans mes chevilles, et je ne suis plus qu’un Jabbah the Hutt dégoulinant sur l’asphalte. Et tandis que nous sommes nombreux à nous liquéfier (parce que j’ai regardé, je ne suis pas le seul, ça dégouline de partout), quelques uns, rares, continuent à conquérir le bitume. Rah, ça m’énerve !

Km 18. Je suis dépassé par le meneur d’allure, alors que je croyais qu’il était déjà loin devant. Je me dis « chic, il a dû s’arrêter à tous les ravitaillements, j’ai encore une chance de taper un temps à 1h50 ! » J’essaie de le suivre pendant max 1 minute, puis je me rends compte que mon corps ne va pas suivre, alors je le laisse partir devant, en me disant qu’au maximum, il me mettra 2 mn dans la vue, donc je vais finir à 1h52, ce qui est très bien.

Km 19. Ils annoncent que c’est la dernière ligne droite. C’est là que les coureurs non aguerris commettent leur 1ère erreur : ils entendent « dernière ligne droite », et se mettent donc à accélérer, limite à sprinter. Mais les vieux crocodiles comme ton serviteur savent qu’il reste encore plus de 2km à courir, et qu’accélérer pendant 2km, c’est pas possible. Alors je maintiens l’allure en essayant de remonter mon anatomie vers une posture plus athlétique.Semi - 16km

Puis on voit une arche blanche au loin. Deuxième erreur des débutants : ils se disent que c’est l’arrivée, et sprintent (bis). Mais moi je sais que c’est l’arche des 20km, et qu’il reste encore 1km et 97 mètres derrière. Donc chi va sano ma non troppo e pericoloso.

Concentration, accélération, respiration, photographes, je vois l’arrivée, le public nous encourage en faisant un raffut du diable, et je passe la ligne d’arrivée, pour finalement un temps de 1h 58′ 04″. En fait, le meneur d’allure que j’ai vu en dernier était un autre meneur d’allure qui a dû partir avec la fin du peloton, et qui m’a rattrapé doucement pendant toute la course.

Il n’empêche, 1h 58, c’est un très bon temps compte-tenu de ma préparation. Et un bref coup d’oeil à mes archives me montre que j’avais fait 1h 56 il y a 7 ans, et 1h 54 il y a deux ans. Tout ça se maintient à peu près 🙂

Merci à mes supporters qui m’ont encouragé en faisant un don à la fondation ESCP Europe :

  • Pedro
  • Amaury
  • Nathalie
  • Lei (Lei, if you want a detailed account of my race in english, please ask me ! ),
  • Stéphanie (Stéphanie, si tu veux une traduction en Flamand, il y a Google Translate ! )
  • Trixie
  • Thérèse
  • Michèle
  • Anne-Marie
  • Françoise

Merci à tous pour vos encouragements !

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