La quête ultime du logiciel de ToDo : 3 – mon choix

[edit du 30-10-2013 : cet article était publié sur mon blog de développement personnel (Devperso.fr), je l’ai rapatrié désormais dans la rubrique « productivité » de blogthib.com – un edit de ce type signalera de tels articles]

Cela fait longtemps que je n’ai pas posté. Ce n’est pas pour autant que j’ai arrêté de travailler sur ces sujets. Comme le dit le leader des Eagles dans un concert de retour à la scène : « Juste pour info : nous ne nous sommes jamais séparés. Nous avons juste pris 14 ans de vacances ».

Dans deux premiers billets, j’avais identifié mon cahier des charges (la quête ultime du logiciel de todo : 1) et l’analyse de l’existant (la quête ultime du logiciel de todo : 2).

Venons-en à ma solution.

En fait, quelques jours après mon billet n°2, je suis revenu à TaskPaper, qui avait été mon premier choix, et la plupart de mes critiques se sont envolées.

  • C’est un logiciel qui tourne sur Mac, mais une version Windows a été créée par un autre programmeur, sous le nom de TodoPaper. Les deux sont parfaitement compatibles (c’est la force du fichier texte).
  • Pour avoir toujours le fichier texte avec moi, je l’ai mis dans mon dossier Dropbox, il est donc automatiquement synchronisé. (Solution qui n’est pas parfaite, car les fichiers Texte du Mac et de Windows traitent mal les accents. Mais même s’il y a des problèmes sur quelques caractères, au moins, on peut les lire).
  • En fait, le plus simple est d’utiliser le service en ligne TaskoDone. Ouvrez-vous un compte (gratuit), copiez votre fichier texte et voilà, vous avez TaskPaper en ligne (consultable depuis n’importe quel smartphone…)

J’ai donc acheté deux licences (taskpaper et todopaper). J’aurais pu uniquement vivre avec TaskoDone, mais c’est plus pratique de travailler en local. Et puis c’est plus sympa d’encourager les développeurs. Une seul regret, de taille : il n’existe pas d’alternative ergonomique sous Linux (ubuntu).

Le dernier billet sur ce sujet, le n°4, expliquera pourquoi cette quête ultime ne pouvait donner un résultat universel.

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Indicateur MBTI (Myers Briggs Type Index) – quelques remarques qui peuvent intéresser d'autres personnes

Ce blog a déjà parlé du MBTI, de manière incidente, dans les commentaires.
Je ne vais pas décrire ce test ou ses fondements en détail, je me donne juste, allez, 4 phrases pour le faire :

  1. Issu des travaux du psychiatre et psychologue Carl Jung et adapté par Isabel Briggs Myers et Katherine Cook Briggs, l’indicateur MBTI sert à identifier le « type » de personnalité d’un individu donné.
  2. Il y a 16 types de personnalités, fondées autour de 4 axes (2 valeurs possibles par axe) : E/I, S/N, T/F, J/P.
  3. Connaître son propre type de personnalité, et identifier celui des autres, aide à clarifier les incompréhensions et les dysfonctionnements – y compris vis-à-vis de soi-même.
  4. Ce test est utilisé depuis des années dans la majorité des formations au management, notamment sur les populations en MBA.

J’ai « passé » un entretien de découverte du type il y a deux semaines, après avoir lu quelques livres et navigué sur des sites Internet pendant plusieurs mois. Et mon propos est de rédiger un rapport d’étonnement sur ce domaine que je découvre, et que je vais probablement approfondir («Connais-toi, laisse à Dieu les secrets qu’il veut faire ; L’homme est la seule étude à l’homme nécessaire», Alexander Pope, Essai sur l’homme).

Rapport d’étonnement en 4 actes :

  1. Le MBTI est utilisé à tour de bras par les coachs, consultants en management, gens de RH et autres psychothérapeutes sur le lieu de travail. Je trouve que cet indicateur est très souvent réduit à sa plus simple expression, et donc frustrant. En gros, il se borne à dire « nous n’avons pas tous la même personnalité, voilà la vôtre, vous êtes bon là-dedans, moins bon ici, et une personne qui n’a pas le même type de personnalité ne fonctionnera pas de la même manière ». C’est déjà pas mal, mais cela rend cet indicateur difficile à distinguer des autres tests plus ou moins en vogue (êtes-vous cigale ou fourmi, analytique ou syncrétique, dauphine ou casoar, etc. Le bestiaire des types de personnalité est un zoo fantastique dans les séminaires de management). Mais l’entretien de découverte n’est censé être que la première étape, et il devrait normalement être suivi par un travail personnalisé avec le coach.
  2. En fait, cet entretien offre un diagnostic instantané (voilà votre type de personnalité à la base), mais aussi évolutif : voilà comment vous utilisez votre cerveau pour collecter des informations et prendre des décisions, voilà comment cela a évolué depuis votre enfance, et voilà comment cela risque d’évoluer. Si l’on devait prendre une analogie, c’est beaucoup plus qu’une photo. C’est un film qui décompose le mouvement, que le sportif peut lire (avec l’aide de son entraîneur…) pour comprendre d’où viennent ses gestes, et comment les améliorer.
  3. S’il y a 16 types de personnalités, alors cela réfute les conseils universels sur l’éducation ou sur la psychologie. « Un enfant a besoin d’être cadré, sinon il sera malheureux », « écoutez votre coeur », « reprenez du temps pour vous-même, défendez-vous des Autres », « Les enfants ne doivent pas interrompre la conversation »… Tous ces dictons ou conseils dont nous avons hérité dans nos schémas mentaux, ou qu’on peut lire dans les magazines à positionnement « psychologie grand public » cachent en fait la forêt : s’il y a 16 types de personnalité, il y a 16 familles de conseils. Ou comme l’illustrait Kate dans son commentaire : « si un S suit son intuition (fonction opposée à sa préférence naturelle, donc peu efficace car rarement utilisée), ou si un T s’amuse à décider de façon subjective, sauf dans le cas précis d’un travail conscient et encadré de développement personnel, ça va tourner assez vite au bordel généralisé. »
  4. De la même manière, s’il y a 16 types de personnalité, alorscela réfute les conseils universels pour travailler efficacement. Or, qu’est-ce qu’écrivent la plupart des manuels de « productivité personnelle » ? Ils disent « voilà ma méthode, elle est adaptable à tous, universelle, suivez mes conseils et achetez mon livre ». Certes, je ne vais pas aller jusqu’à dire qu’il y a 16 systèmes de gestion de la productivité personnelle, mais ce qui est sûr, c’est qu’il n’y en a pas qu’un seul. Je vais lister, pour l’exemple, quelques credos analogues aux credos généraux sur l’éducation ou la psychologie, mais cette fois adaptés au monde du travail : « un bureau doit être rangé (voire vide) » ; « la procrastination est une mauvaise chose et il y a des moyens pour combattre cela » ; « anticiper permet de gagner du temps » (ou variante : on fait plus de choses quand on les anticipe).

Je m’arrête là. J’ai conscience du fait que certains points ne sont des découvertes que pour moi. Et le tout mérite d’être dégrossi, clarifié, décanté au fil du temps et de l’expérience. Je m’y emploie.

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Blackout

Hier soir, panne d’électricité.
Après les réflexes de geek (« c’est bon, j’ai encore 1h30 d’autonomie sur le Mac, et 5h sur le mobile »), vient l’optimisme forcé (« ça va être rétabli fissa ! ») puis lentement, l’inquiétude sourde (« c’est quand même une nuit d’orage, et je suis dans un bourg isolé. »).
La nuit tombe (« Tiens, aucune lumière dans les maisons au loin… »), et j’envisage alors de passer la soirée sans lumière. Il fait désormais très sombre, et comme tout individu stupidement hyper-moderne, j’utilise la clarté de l’écran de mon mobile pour chercher des bougies.
Une allumette, un bougeoir, fiat lux.
Et soudain, mon monde se met à changer. C’est fou ce que ça éclaire, une bougie. Elle laisse dans l’ombre les choses peu importantes, elle se concentre sur le cercle immédiat, on est loin de la furie éclairante d’une ampoule qui veut à tout prix tout montrer. Quand l’électricité revient finalement, je reste avec un sentiment de regret.

Il faut souvent que je m’éloigne de toi
Que je sois privé
Pour que je puisse voir à nouveau
Combien tu m’éclaires.

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Caillou – Fin d'été

Route de campagne déserte
Le soir tombe, ainsi que quelques gouttes.
Dans un jardin invisible
« 1 2 3 soleil ».

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Caillou – Fin d'été


Route de campagne déserte
Le soir tombe avec quelques gouttes
Dans un jardin invisible
« 1 2 3 soleil ».

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Les 5 S de septembre

Fin des vacances, période de bonnes résolutions. En n’oubliant pas la saillie d’Oscar Wilde : « les bonnes résolutions sont des chèques tirés sur une banque dans laquelle on n’a pas de compte ouvert ».
Bonne résolution de rentrée : faire le ménage.
Tout a commencé par l’électronique, et une discussion avec un collègue sur Mohamed Yunus, subtilement relayée par ma connaissance des 5 S chez Toyota.

L’électronique

Je suis un geek, on ne se refait pas. J’achète donc des gadgets (iPod, camescope, transmetteur FM pour l’iPod, appareil photo numérique…) qui me semblent essentiels. Le problème est multiple, comme les prises du même nom :

  • chaque gadget qui arrive n’arrive jamais seul : il apporte régulièrement un mode d’emploi, un CD, des cables, un chargeur…
  • tout cela prend de la place, et nécessite de l’ordre (« où est le cable de tel appareil photo numérique ?)
  • chaque départ en vacances (ou en week-end) nécessite une check-list digne de la NASA : chargeur de téléphone, appareil-photo (+ chargeur), cables, MacBook(+ chargeur)…

Mohamed Yunus

J’ai commandé un de ses livres, mais en attendant, je sais que l’homme prône la décroissance économique, ou en tout cas, l’utilisation raisonnable des ressources économiques, notamment par le truchement d’une consommation responsable.

Les 5 S de Toyota

Toyota a mis en place une méthode d’organisation de l’espace de travail fondée sur 5 mots japonais commençant tous par S. Un des mots recouvre l’utilisation des objets, avec la logique suivante :

  • Si l’objet sert moins d’une fois par an, le faire recycler ou le jeter
  • Si l’objet sert moins d’une fois par mois, l’archiver proprement
  • Si l’objet sert moins d’une fois par semaine, le mettre sur une étagère dans le bureau
  • Si l’objet sert moins d’une fois par jour, le poser sur l’espace de travail : plus il sert souvent, plus il doit être proche
  • Si l’objet sert très souvent, le placer à portée de main, voire le fixer sur l’opérateur

Cristallisation

Gestion du stock existant : appliquer drastiquement le principe ci-dessus des 5 S.
Gestion du flux : « pour tout objet qui rentre, un objet doit sortir (définitivement) ». A appliquer en priorité à l’électronique / informatique.
Champ d’application : mon bureau chez moi ; mon bureau au boulot ; ma bibliothèque de 1 200 livres chez moi ; ma bibliothèque de 300 livres au bureau ; ma CD thèque / ma bibliothèque de mp3 ; mes outils de (excusez-moi, je rigole, hahaha) bricolage.
Principes d’application : utiliser au maximum les possibilités de recyclage, afin de jeter le minimum. Donner aux étudiants, aux amis, à l’école / au collège, au commissariat, amener à la déchetterie, faire recycler.

« Si tu veux débarrasser un hippie de ses poux, commence par le raser » (Pinaud, dans un livre de San-Antonio, probablement J’ai bien l’honneur de vous buter).

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Insomnia

De retour des Etats-Unis (côte Ouest, de surcroît), je n’ai jamais autant souffert du décalage horaire que cette semaine. Vertiges, nausées, horloge biologique complètement décalée et qui ne s’ajuste pas, malgré mes petits trucs (exposition à la lumière avec ma lampe de luminothérapie dès le petit matin – et le petit matin, c’est 6h15 actuellement). Je repense au film Insomnia, où Al Pacino est dans le même type de décalage et d’épuisement, avec tout ce qui va avec le manque de sommeil : perte de repères, maux de tête, tension dans le corps, irritabilité, yeux qui clignotent. Déjà que j’avais le sentiment de vivre cela physiquement quand je regardais le film, mais là, c’est carrément IRL.
Que voulez-vous, c’est l’ge, ma bonne dame.
Si quelqu’un a une recette miracle (« boire un jus de citron pur en se pinçant le nez »), je suis preneur…

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Livre lu – Digital Fortress, de Dan Brown et pensée romanesque

Je viens de lire « Digital fortress« , de Dan Brown : le hasard d’une location de vacances m’a mis ce livre dans les mains, et le début était tellement prometteur que je l’ai acheté. Sirènes du marketing, ou comment soigner ses premiers chapitres : après, ça devient moins bien.
La pensée du jour, pour tous les romanciers en herbe : n’essayez pas d’avoir l’air modernes, le monde bouge trop vite. Imaginez que vous preniez un roman écrit il y a 12 ans (c’est le cas de Digital fortress), et que vous y lisiez un passage sur les ordinateurs personnels. Vous y découvririez des perles du genre

« Il décida d’envoyer un e-mail. C’était une technologie révolutionnaire, qui allait bientôt supplanter la télécopie. A peine avait-il cliqué send que son interlocuteur, comme par magie, recevait le message »

(j’invente ce passage, mais cela donne la tonalité)
Ou encore, dans un livre de Maurice G. Dantec, La sirène rouge, je crois, il y a avait un passage du type :

« C’était un ordinateur portable dernier cri, avec processeur 486 et 2 mégas de RAM »

(encore une fois j’invente).
En résumé : si vous voulez que votre roman dure, ne mentionnez pas les dernières perles de la technologie de votre temps : elles seront pratiquement obsolètes au jour de la publication, et probablement périmées quand vous commencerez à percer. Faites plutôt comme Dantec (à nouveau, cette fois dans Les racines du mal) : inventez des ordinateurs qui n’existent pas encore. Vous serez au mieux un visionnaire, au pire, un fictionnaire.
Et finalement, rappelons une évidence : ce qui fait la durée d’un roman dans son lectorat, c’est son caractère intemporel. Il y a donc deux types de romans : les produits de grande consommation, les romans de l’année, destinés à être des consommables, et les romans de référence, ceux qui sont destinés à rester, bref, les investissements.
Les premiers se fondent sur une nouveauté éphémère, l’actualité, un mouvement de mode. Les seconds se focalisent sur les êtres humains et leurs relations.

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Faustbook

L’analogie entre le mythe de Faust et les services gratuits / les réseaux sociaux sur Internet. Dans les siècles passés, plus d’un homme s’est laissé tenter à vendre son me, en échange d’un avantage forcément limité dans le temps : un supplément de vie.
Ce qui motive ces hommes dans ce choix a priori inégal (une vingtaine d’années gagnées face à une éternité perdue), ce sont deux choses :

  • la prééminence du présent dans nos décisions. Je veux tout, tout de suite.
  • la mauvaise évaluation du coût final. « Perdre son me, ouais, on verra plus tard ». Cette mauvaise évaluation est renforcée par le fait qu’il s’agit d’un bien immatériel, pour lequel il est donc difficile d’estimer un coût, une valeur.

L’analogie me semble évidente avec Facebook, ou d’autres services prétendument gratuits (gmail, MSN…). En échange d’une satisfaction immédiate (avoir un compte, accéder à un service), on abandonne des informations qui vont pouvoir servir sur nous (contre nous) pendant des dizaines d’années. Je liste les quelques informations qui sont régulièrement demandées:

  • Nom, prénom
  • identifiant (pseudo)
  • mot de passe
  • adresse e-mail
  • date de naissance
  • adresse postale
  • numéro de téléphone

Qu’on ne s’y trompe pas : il suffit de quelques informations (par exemple nom prénom adresse e-mail) pour croiser ces données avec d’autres bases de données et retrouver une adresse ou une date de naissance. Et plus les années passent (j’ai 15 ans de présence sur Internet derrière moi), plus il devient impossible de disparaître, même en pratiquant l’uncrosslisting. D’autant plus qu’après un temps d’errance, on se fixe dans la vie : on garde le même numéro de portable, on se fixe à une adresse postale. Comme le dit George Clooney à Catherine Zeta-Jones dans Intolérable cruauté : « You’re exposed. Just like a sitting duck. »
Quand j’étais étudiant en prépa, dans les annales d’examen, il y avait des dessins de Mathieu, illustrateur phare de L’Etudiant. Sur un de ces dessins, Clothaire Legnîdu disait « J’intègre une école de commerce. J’ai vendu mon âme au diable ! » Et un camarade de lui répondre « Combien ? »
Non seulement nous vendons notre me un peu plus à chaque fois que nous nous inscrivons en ligne, mais en plus, nous la vendons très peu cher.

En résumé : contre l’utilisation d’un service temporaire en attendant que Twitter soit remplacé par une nouvelle coqueluche nous donnons la possibilité d’utiliser nos données personnelles ad vitam aerternam. Comme le disait Sénèque il y a quelque temps, « Les hommes jouent avec le bien le plus précieux d’entre tous ; mais ils ne s’en rendent pas compte parce qu’il s’agit d’un bien immatériel, parce qu’ils ne l’ont pas sous les yeux et de ce fait, il est estimé à un prix très bas, je dirais même à un prix pratiquement nul. » (Sénèque, De la brièveté de la vie, Ch. VIII, Par. 1.)

Miracle de la sérendipité : après avoir rédigé ce thibillet, je tombe sur la nouvelle suivante dans le Herald Tribune du jour : Bynamite, une startup américaine, propose aux internautes une extension de navigateur web qui permet (1) de voir ce que les sites de e-commerce savent déjà sur vous ; (2) de modifier ces informations, je cite, « pour permettre un meilleur ciblage des offres commerciales ». Ainsi, l’internaute indique ses intérêts. La prochaine étape serait de troquer ses informations en échange de réductions commerciales. Je te dis qui je suis, et en échange de mes données, tu me vends moins cher tes produits. A suivre ?…

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Novela – la Stèle de l'Atlantide (4/4)

[Début de la nouvelle]

Des années passèrent. Le jeune homme se maria, et Dieu lui donna deux enfants, un garçon aux yeux d’obsidienne et une fille éclairée de lumière. La petite famille aimait voyager, et les parents firent découvrir à leurs enfants les richesses de différents pays des terres émergées.

Un jour, dans un musée lointain, le jeune homme cherchait ses enfants qui avaient disparu en courant dans des salles ensoleillées. Il prit un couloir et aboutit à une pièce sombre, sobrement illuminée, vide de toute présence. L’atmosphère était silencieuse et la température fraîche. Des agrandissements photographiques montraient des courants marins sur le globe terrestre, et quelques vitrines contenaient des galets. Le jeune homme pénétra dans la pièce, et découvrit une grande vitrine dans un coin retiré. Une grande pierre, plutôt un rocher, en occupait tout l’espace. Elle était couverte de ces signes atlantes que l’homme reconnaissait après tant d’années, comme une poignée de virgules frappées dans le roc non taillé. Au pied du rocher se trouvaient quelques petites pierres de silex aux arêtes vives, ainsi qu’une étiquette d’explications. L’homme lut le texte bref : « Une autre illustration de la force des courants marins dans les fosses abyssales. Ces courants, prisonniers de cheminées basaltiques souvent abruptes, tournoient avec force en entraînant de gros rochers. Ceux-ci, constamment percutés par des pierres de plus petite taille et de grande dureté, finissent par porter des marques caractéristiques ». L’homme passa derrière la vitrine. L’autre côté du rocher portait les mêmes marques irrégulièrement espacées, sculptées au hasard des reliefs de la pierre. Ému, il reconnut (ou crut reconnaître), au milieu de ce fatras de marques aléatoires, une des inscriptions que le vieil homme avait identifiée comme signifiant « la nuit ».
Il quitta la salle, retrouva ses enfants, puis il prit l’appareil-photo de sa femme et revint prendre plusieurs photographies du rocher sous tous les angles possibles. Le reste de ses vacances se passa comme en rêve, il n’était plus avec ses proches, des signes dansaient dans sa tête. Une nuit, il rêva du visage du vieil homme, et ses rides, quand il lui souriaient, prenaient la forme des caractères atlantes. Elle lui disaient « je vais bien, j’écris tous les jours ».

A son retour de vacances, il se mit au travail. Il rédigea un long document expliquant la découverte de la stèle, la croyance du vieil homme sur le fait que les deux côtés étaient sculptés de la main de l’homme, et l’impossible travail de traduction. Le but de cet article était de calculer la probabilité qu’un tel assemblage de signes frappés au hasard par des rochers puisse correspondre à la langue sculptée de l’autre côté de la stèle. Au cours de sa rédaction, l’homme se disait par moments que cette écriture des atlantes était en fait l’écriture de l’océan, celle de la nature, celle de Dieu. Malgré ses calculs rigoureux et les références aux travaux majeurs dans ce domaine, l’article fut refusé par toutes les revues académiques, tant les journaux mathématiques que les cahiers de recherche en océanologie ou les revues de probabilités. L’homme rédigea plusieurs versions de l’article, aucune d’entre elle ne trouva clémence auprès des comités scientifiques de revues. Il abandonna le sujet.

Je m’appelle Ishmaël Bustos. Je suis aujourd’hui chercheur au laboratoire de sémantique générale de San Domingo, et je suis cet homme. Si je publie cet article dans un journal de contes populaires, destiné au grand public et à la jeunesse, c’est parce qu’il a été refusé dans des journaux dits sérieux. J’en ai donc enlevé toutes les parties scientifiques, les calculs, les analyses sémiologiques et j’ai vulgarisé le texte. J’espère que le public y verra une fable, et qu’il en aura tiré quelque distraction.

Creative Commons License
Cette nouvelle, comme tout sur ce blog, est publiée sous un contrat Creative Commons. Et aussi sous licence Touchatougiciel.

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