Kung Fu Yoda, une réflexion sur le film

Je suis allé voir Kung Fu Panda, en toute séductitude. J’ai débriefé avec mes enfants, et nous sommes arrivés aux quelques idées suivantes, pour les adeptes du Zen, les Script doctors et autres personnes qui recherchent ce qui est Caché derrière (merci Laurent Voulzy).

Donc, dans le film Kung Fu Panda :

  • Le grand maître, Oogway, est une tortue. Mais il est rapide quand il veut. Donc la carapace, c’est dans ta tête. Un parallèle évident avec maître Yoda, et sa canne, jusqu’à ce qu’il se batte avec le Comte Dokuu (je ne sais jamais le nombre de oo et de uu). Ou, pour reprendre Jean-Philippe Toussaint avec sa théorie de l’olive et de la fourchette, l’important, c’est d’attendrir l’olive doucement, patiemment, et quand vient le moment, TCHAC, le zen est là, et tu parles avec la foudre.
  • Le maître Shifu apprend à ses élèves. Mais Shifu se fait battre par Taï Lung, son élève. Et Po, son élève (à Shifu), bat Taï Lung (l’élève de Shifu), qui avait pourtant battu Shifu (son maître). La conclusion est évidente : on peut toujours apprendre de ses élèves. C’est à méditer.
  • Po n’est jamais meilleur que quand il ne réfléchit pas à ce qu’il fait. C’est une référence évidente au « No mind » du Dernier Samouraï. Donc : c’est notre cerveau qui fait des noeuds, laissons le corps s’exprimer.
  • Po est gentil, il n’est pas très intelligent, mais il est motivé. Quand il se fait tabasser / attendrir (au sens de la viande qu’on attendrit) / rejeter / brûler / attaquer, il revient, toujours. Parce qu’il est enthousiaste, il a tellement visualisé tout qu’il est heureux de faire partie de ce film. Donc : la vraie valeur, c’est l’enthousiasme. La technique est importante, on le voit bien, mais la vision reste au centre de la motivation.

Sur la technique du doigt mouché, je ne sais que penser. On n’est pas loin d’Anakin qui décapite le Comte Dooku. Je pense que c’est la signature américaine de ce film à vocation asiatique : au final, il faut que le méchant disparaisse. Cela n’est pas très Zen.

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Paradoxe aphoristique à la mords-moi-le-noeud

Ranger ses papiers est une des activités les plus déprimantes que je connaisse ;
Ranger ses papiers est une des activités les plus satisfaisantes que je connaisse.
(à dire vite, et sans trop y réfléchir).

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Magnolia Express – 4ème partie – # 12

Union Station
 
Nous sommes arrivés au soleil couchant, le train ne reprenait sa magie qu’à la nuit tombée, quand le silence est descendu sur le monde. Le Solitaire est venu nous rejoindre tandis que Conrad finissait de charger à nouveau nos bagages dans le taxi. Bob Brozman fredonnait doucement un air, à part ça le paysage était attentif alentour. Conrad revint vers nous, sortit un petit cigare de sa poche de poitrine, et le tendit au Solitaire.

– Merci, Solitaire, je suis content d’avoir parlé avec toi…

Le Solitaire prit le petit cigare en souriant d’un air entendu, ça oui, il comprenait la plaisanterie. Il donna une petite tape sur l’épaule de Conrad, nous fit un signe de tête, puis repartit vers sa locomotive essentielle, son grand manteau battant ses longues jambes.
Et nous ne le revîmes plus jamais.

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Le roman, dans l’ordre, est
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Cinétique du pékin – 1bis et 2bis : erratum et addendum

Visiblement, il n’y en a pas beaucoup qui prennent le métro, dans les lecteurs de ce blog. Je me suis gouréje : contrairement à mes précédents crobards, il n’y a pas UN, mais DEUXE poteaux dans les rames traditionnelles. Entre les deux poteaux, le no man’s land, l’espace intersticiel abominé, mais en même temps, la sécurité car sur les 4 degrés de liberté (cf. à nouveau le Jeu de Go), deux sont protégés par les poteaux. Bref, il s’agit juste de se remémorer « Père, gardez-vous à droite ! Père, gardez-vous à gauche ! »

Cela mérite donc un erratum sur les stratégies de placement, même si vous m’aviez compris :
(1) Placement en montée de rame, pour laisser s’écouler le flot de droite et de gauche ;
(1bis) Transition éventuelle par le No Man’s Land, position protégée mais sensible aux traverseurs de rame ;
(2) Symétrie de (1), face au poteau, prêt à reculer ;
(3) le paradis perdu, idéalement au centre, mais par défaut sur un côté, en attendant de se rabattre, le dos bien calé, les pieds plantés en triangle isomorphe, de là vous défiez les pékins.

Voilà pour l’erratum, reste l’addendum.

Je disais, jeune fou que j’étais, que la position (9) était pour les risque-tout, étant donné qu’elle était dans le passage, donc dramatiquement sous-optimale. J’y crois toujours, mais ma prof d’espagnol (holà Magdalena !) m’a signalé que c’est un placement idéal pour une personne souhaitant s’asseoir sur une banquette : dès qu’une personne se lève, hop, la personne en (9) est la plus proche, elle n’a plus qu’à exercer son option.

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Magnolia Express – 4ème partie – # 11

Ceci est une citation à des fins d’illustration musicale (détails ici). Il s’agit d’un extrait, en mono, de Riding home, par JJ Cale, sur le CD Really, Mercury, 1972. Le disque est en vente ici.

Assis sur ce train
 
Malgré la vitesse du Fantôme, la nuit nous distança peu à peu et le soleil commença à établir ses droits sur ce train fantasmagorique. Nous voguions maintenant au milieu de champs de céréales, où de temps en temps un arbre solitaire figurait l’intrus. Quelques granges disséminées, une ou deux routes et à peine un nuage au ciel. Vers le milieu de la matinée, je secouai les dormeurs et nous sortîmes du compartiment : juste derrière, il y avait un wagon plate-forme sur laquelle on charge habituellement les moissonneuses ou les rouleaux-compresseurs. Étant le premier, j’inspectai longuement la plate-forme avant de m’avancer, des fois qu’un rouleau-compresseur camouflé s’y cacherait, prêt à bondir sur nous pour nous transformer en tortillas.
 
– La voie est libre, annonçai-je, et je sautai sur la plate-forme. Me retournant, je reçus Aline dans mes bras, puis Eileen, quant à Conrad et Bob, ils pouvaient bien se débrouiller tout seuls.
 
Installés en rond au soleil, nous commençmes à déballer les victuailles, rien que des bonnes choses bénies par le soleil, pleines de lumière naturelle, des tomates rouges, des poivrons bien verts, craquant sous la dent, du pain blanc mousseux et léger, des tranches de jambon salé, un peu humide, du café dans un Thermos argenté, et du fromage, de la viande séchée, des fruits. Assis au soleil, à manger entre nous, sur un train qui continuait son chemin, coupant la campagne en deux jusqu’à l’horizon. Bob Brozman avait sorti une guitare métallique et sollicitait les cordes en fredonnant « Payoup Payoup » ou « Tum dee dum dum » en rythme. Peu à peu, une mélodie émergea, reprenant le rythme débonnaire du train, une mélodie qui tangue et suit le mouvement des flots, c’était la chanson du bateau de rivière.

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Sun Tzu Panda

Je sors d’une AG de société dans laquelle je suis (très) minoritaire. Il y a les AGs classiques, où le Procès-Verbal a été rédigé par avance, et ça roule, il y a quelques questions, et puis on vote les résolutions dans la foulée et c’est plié. Et puis il y a les AGs comme ce soir. J’ai envie de relire L’art de la guerre, de Sun Tzu. Notamment pour :

  • L’importance du terrain de bataille. Reconnaître les lieux avant (là, c’était impossible), choisir sa place sur le terrain (très important).
  • L’importance de l’élément de surprise. Comme dans le dernier samouraï. Montrer ce que l’on veut que l’autre voie, planquer ses renforts.
  • L’importance du temps. Laisser certaines discussions s’enliser, certains esprits brûler leurs cartouches. Garder l’oeil sur son chemin, respirer intérieurement, et quand il s’agit de s’avancer, le faire précisément, posément, poser des jalons, et ne rien lâcher. Et au besoin, frapper comme la foudre. Mais comme le dit le Dragon dans Fone Bone : « ne joue pas un as là où une paire de deux peut suffire ».
  • L’importance du moral des troupes, donc l’importance des troupes. Être plusieurs, marcher de conserve, et rallier des soldats isolés. En imposer par ce côté « je sais où je vais, je ne parle pas à tort et à travers ».

Mon contentement ce soir (mais tout cela n’est pas fini) est à l’aune de ma préparation, et de mes angoisses, des derniers jours.

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Magnolia Express – 4ème partie – # 10

Train fantôme (2)
 
Le Solitaire avança vers nous, on ne voyait pas ses yeux derrière les épaisses lunettes de conducteur, il était grand et souple, le visage aminci par les vents ferroviaires. Il s’arrêta à côté d’un fourgon en bois et grimpa sur le marchepied pour débloquer la porte coulissante. Il la fit glisser, sauta à bas du fourgon et me fit signe, je le suivis et empoignai avec lui la lourde passerelle en bois, l’amenai juste devant la porte béante du fourgon. Alors il fit un hochement de tête vers Conrad, en désignant l’ouverture du pouce, toujours sans un mot. Conrad partit chercher son taxi.
Il nous indiqua un wagon à côté et je chargeai nos sacs dedans : des banquettes de cuir étaient installées tout du long, et l’intérieur du compartiment était tapissé de panneaux de bois et de parements en cuivre. Tandis que je déposai les sacs sur les porte-bagages, les phares du taxi balayèrent la paroi du train, allumant des reflets dorés dans le wagon. Dehors, le Solitaire guidait Conrad par gestes. Bientôt, le taxi fût embarqué dans le fourgon et la porte refermée.
Eileen tendit un petit cigare au Solitaire, il l’accepta d’un signe de tête, le mit dans sa poche de poitrine, puis d’un coup d’oeil, nous fit signe de monter. Nous ouvrîmes les fenêtres du côté du quai, tandis qu’il repartait vers la locomotive. On entendit le train craquer, expirer un coup, puis le convoi démarra doucement, tandis que derrière les carreaux de son bureau, le guichetier nous regardait partir comme un spectre de deuxième classe, et que la nuit fuyait avec nous.

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Laisser-allers

Paradoxalement, je me positionne en défenseur de la langue française, assez tatillon, et je me surprends à utiliser des expressions prohibées. Dans ma tête, il y a des choses permises et d’autres pas. La distinction est subtile pour un oeil extérieur, je suppose. Ainsi,

  • Je dis « en revanche » au lieu de « par contre », car Littré réserve ce dernier usage au vocabulaire commercial.
  • Tout en étant conscient que j’utilise « en revanche » là où souvent, je devrais dire plutôt « par opposition » ou « néanmoins ».
  • J’ai une sainte horreur des anglicismes, parce que je trouve qu’il existe souvent un terme français équivalent. Et pourtant, par facilité, j’use de « je vais revenir vers vous » et je parle de « délivrable », tout simplement parce que « résultat à livrer » ne me paraît pas satisfaisant. Ne parlons pas des cash-flows, qu’on peut légitimement considérer comme faisant désormais partie du jargon toléré.
  • Là où cela m’amuse, c’est d’avoir une position plus rigide que celle de l’académie française. Eux ont viré leur cuti – à raison, semble-t-il – et tolèrent désormais qu’on écrive évènement avec un accent aigu puis un accent grave, là où je restais cantonné à mes deux accents aigus (merci à Ulysse pour ce lien que j’ai trouvé sur son blog).
  • En revanche (bien employé ici), je suis assez content de mon « au temps pour moi », qui a la faveur – certes très légère – de l’académie.

Il faudrait peut-être que je consulte autre chose que mon Littré de 1772, j’apprendrais à parler djeune.

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Magnolia Express – 4ème partie – # 9

Ceci est une citation à des fins d’illustration musicale (détails ici). Il s’agit d’un extrait, en mono, de Ghost Train, par Spencer Bohren, sur le CD Full Moon, Virgin, 1992. Le disque est en vente ici.

Train Fantôme
 
Ce ne fut d’abord qu’un changement d’air dans la nuit, les grillons continuaient à crisser méthodiquement, au loin on entendait un chien rêveur qui aboyait. Puis les herbes folles commencèrent à chuinter doucement, la façade de la gare, les rails polis se mirent à bruire doucement sous la lune, les grillons s’arrêtèrent de crisser peu à peu, méthodiquement. Nous nous penchions à tour de rôle, scrutant la nuit dans la nuit, espérant un phare là-bas à l’est, tandis que le chuintement devenait murmure, le murmure évoluait en frôlement, un bruit de feuillage sur un toit, puis le souffle de l’océan, cela s’approchait et enflait comme une vague, et toujours rien, pas le moindre signe sur l’horizon violet. Dans l’aurore qui bleuissait le ciel, nous entendîmes alors une corne de brume, l’appel rauque d’un loup solitaire, comme un message pour les vivants et les morts, un message qui répéterait « Je suis le Fantôme, je fuis le soleil, j’arrive, je suis le Fantôme », répété à l’infini par le rythme des roues d’acier. Il n’y avait pas de phare, pas de lumières : c’était une masse sombre sur la nuit, un vaisseau charbonneux qui approchait sans contours clairs. Les rails cliquetaient, claquaient, et la façade de la gare renvoyait ces bruits métalliques en écho à la campagne environnante. On aurait dit des nains forgerons qui frappent en cadence le métal au sein d’une montagne solitaire, façonnant un métal maudit aux reflets bleutés.
Nous vîmes enfin le train. Il grossissait, s’approchait en crachant une fumée épaisse, et sa corne lugubre lâcha encore un avertissement qui fit trembler les vitres de la petite gare. Il y eut un crissement de métal, et des étincelles jaillirent le long des flancs du monstre tandis que les roues d’acier s’immobilisaient. Il glissa encore sur une dizaine de mètres, s’immobilisant enfin le long du quai dans un crachement de fumées lourdes comme du plomb. Le soleil n’était pas encore levé et nous restions immobiles, face à cette machine qui expirait puissamment dans la nuit.
A l’avant, du côté de la locomotive, une silhouette sortit de la brume, un homme vêtu d’un grand manteau noir, des lunettes de conducteur sur son visage de suie.

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Cinétique du pékin – 3

J’ai déjà écrit sur la cinétique du pékin, et je vais continuer. Mais la vie est courte, et je ne fais pas tout ce que je voudrais. Mes idées sur la cinétique du pékin sont notées dans un petit carnet noir, j’en livre ici quelques extraits :

  • Il y a la cinétique, et il y a la statique. Ce que j’ai publié (2 thibillets), par référence au jeu de go, concerne la statique. Les thibillets suivants concerneront la cinétique, qui prendra pour référence la mécanique des fluides, ou la cinétique des gaz
  • Dans la cinétique proprement dite, la mécanique des fluides (visqueux ou pas) gagne en profondeur quand on rajoute de la sociologie. Autant une particule n’obéit qu’à la mécanique des fluides (et encore), autant un individu obéit à cette même mécanique, mâtinée d’une conscience sociale, qui interagit avec le phénomène. En résumé pédagogique, pour les neuneus du dernier rang : un individu dans une foule se meut un peu différemment d’une molécule dans un gaz, car il a une psychologie (ce que n’a pas une molécule).
  • J’en ai déduit quelques observations, qui feront l’objet de quelques thibillets, nous en reparlerons.
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