CovidCampus #6 : cours en ligne, cours en présentiel – vrais jumeaux ou faux frères ?

Ce thibillet fait partie d’une série de réflexions sur la crise du Corona virus et le passage immédiat de mes cours en présentiel à une version en ligne.

Don’ do what I do,
do what I say

Attention, thibillet assez long. L’idée d’où est parti ce thibillet était la suivante : lors de thibillets précédents, j’ai établi une liste de règles et conseils empilés au fur et à mesure. Si l’on était dans le registre religieux, je pourrais parler des 10 commandements à respecter. Mais dans Matthieu 22 35-40, un docteur de la loi demande à Jésus quel est le plus grand commandement. La question consiste donc à passer de 10 commandements à un seul, générique, qui les engloberait tous. C’est ce que j’ai essayé de faire dans cette réflexion, et j’ai abouti à l’idée suivante : se rendre compte qu’un cours en ligne exacerbe et amplifie les caractéristiques d’un cours en salle. Cela ira plus haut, plus loin, plus fort, si l’on est dans le registre positif de Gaston de Coubertin, ou – si l’on est plus réaliste – plus limité, moins interactif, plus épuisant.

À la mi-mars, l’ESCP décide de fermer son campus de Paris, tant pour les étudiants que pour les professeurs. En l’espace d’un week-end, il est donc décidé de basculer immédiatement tous les cours en présentiel en un format 100 % en ligne. Face à cette situation sans précédent, chaque professeur était confronté à une alternative : soit essayer de transposer en ligne l’équivalent exact de ce qui se passait dans la salle de cours ; soit partir du principe qu’un cours en ligne se faisait selon un autre médium, avec d’autres contraintes, et qu’il fallait donc réinventer les pratiques.

200g de protéines

Illustrons ces extrêmes par deux analogies. L’auteur de ces lignes est suffisamment vieux pour avoir vécu le service militaire en France, et lors des journées passées sur le terrain, chaque soldat recevait une ration de survie. Ainsi, lors du bivouac, on sortait de son paquetage une boîte en carton qui contenait l’équivalent d’un plateau repas d’avion. L’erreur consisterait à juger cette ration de survie par rapport à un repas « normal », par exemple celui que l’on peut prendre au restaurant ou chez soi. En effet, dans la vie militaire, soit on était en opération sur le terrain avec des rations de survie, soit on était cantonné à la caserne avec des repas à la cantine. Le bon point de comparaison serait donc d’évaluer dans quelle mesure la ration de survie est équivalente à un repas à la cantine des troufions. En l’espèce, l’état-major avait essayé de répliquer à l’identique un repas de cantine militaire, sous contrainte des réalités du terrain : pas de possibilité de faire chauffer le repas, poids et encombrement à limiter… Certes, la qualité avait été dégradée, mais on restait toujours dans la catégorie d’un repas militaire. On est donc dans une situation où l’on a essayé de répliquer une expérience à l’identique tout en tenant compte des réalités du terrain.

« J’ai bien reçu votre courrier
du 23 courant »

Par opposition, prenons une 2ème illustration. L’auteur de ces lignes est assez vieux pour avoir connu un monde avant l’e-mail. Autrefois, un service du courrier passait dans les entreprises chaque matin pour distribuer des lettres au format papier. On en prenait connaissance, on rédigeait soi-même la réponse ou on la faisait taper par sa secrétaire, puis la réponse était mise sous enveloppe quelques jours après, et elle était envoyée par le courrier postal. Quand l’e-mail est arrivé en France, la majorité des utilisateurs a commis l’erreur de penser que c’était juste un changement de format : d’un courrier papier, on passait à un courrier électronique. En fait, cela a conduit à beaucoup de comportements déviants, car la réalité était plus complexe. En réalité, il s’agissait d’un tout nouveau mode de communication qui aurait dû inventer ses propres règles au lieu de copier celle du courrier papier par analogie. Si cela avait été fait, peut-être que l’e-mail aurait été plus efficace dans le fonctionnement des organisations. Ces 2 illustrations peuvent être appliquées au basculement à des cours en ligne. D’abord, il y avait urgence. L’idée de ration de survie donne le ton : comment se débrouiller dans la jungle, privé de toute la logistique habituelle du quartier général ? Par ailleurs, faut-il opter pour une stratégie de copie à l’identique – forcément imparfaite – ou une stratégie de réinvention – forcément consommatrice de temps. Après 2 mois de pratique de cours en ligne, la comparaison avec les cours en face à face s’impose, et on peut résumer les différences à une seule idée générique : un cours en ligne va exacerber et amplifier les caractéristiques d’un cours en face à face. Comparons donc ces deux systèmes pour nous en assurer.

Avant le cours – la préparation

Le ratio heures invisibles / heures visibles

Pendant que vous dormez…

Dans les cours en salle, il y a bien évidemment de la préparation : le professeur adapte la structure de la séance, il prépare de la documentation et des exercices, il révise les concepts majeurs qu’il souhaite faire passer tant dans le fond que dans la forme. À ces heures de préparation classique, il faut rajouter des heures supplémentaires dans le cas d’un cours en ligne. En effet, si un professeur décide de faire son cours exactement comme il le faisait en salle de cours, il obtiendra forcément une qualité dégradée : certaines actions sont désormais impossibles, par exemple le fait de se rapprocher ou de s’éloigner des étudiants ; d’autres actions sont possibles, mais avec beaucoup moins de fluidité, par exemple saisir un marqueur et noter au tableau les mots clés ou un schéma sur ce qu’on est en train de présenter. Il faut donc prévoir des manières alternatives d’obtenir les mêmes résultats, rechercher les outils numériques correspondants, se former et je s’entraîner, et enfin concevoir des séquences pédagogiques spécifiques à un cours en ligne. Ce temps additionnel correspond à des heures invisibles : en effet, les seules heures visibles par l’étudiant sont les heures de cours, tandis que les heures de préparation sont invisibles à ses yeux. Mais dans le cas d’un cours en ligne, le ratio est exacerbé. Prenons le cas d’un cours que l’auteur connaît bien, car il l’enseigne depuis des années. Pour un cours en face à face, supposons qu’il faut une heure de préparation pour assurer 3 heures de cours ; le même cours, s’il est fait en ligne, nécessitera plutôt de l’ordre de 3 à 10 heures de préparation pour ces mêmes 3 heures de cours. Le ratio heures invisibles/heures visibles est donc multiplié par 3 à 10 lors du passage en ligne.

Une problématique de qualité

Toute cette préparation supplémentaire ne garantit même pas que le cours aura le même niveau de qualité. Les métriques que nous proposons ici sont beaucoup plus intuitives que mesurées, mais elles donnent un ordre de grandeur : si un professeur décide de faire son cours en ligne exactement comme il faisait son cours en salle, il atteindra probablement une qualité de cours dégradée de 40 % par rapport à l’expérience en salle – en d’autres termes, le cours en ligne sera à 60 % du niveau de qualité du cours en salle. Bien sûr, chaque heure de préparation dédiée spécifiquement au cours en ligne permettra de réduire cette dégradation de qualité, mais sans toutefois l’annuler. En effet, selon notre estimation, les 3 à 10 heures de préparation numérique nécessaire permettent de passer d’une qualité de 60 % à une qualité de 80 – 90 % par rapport au cours en présentiel. Pour atteindre un niveau équivalent de qualité (100 %), il faudrait soit investir beaucoup d’heures supplémentaires, soit décréter que l’on ne cherche pas à faire une copie à l’identique : le cours en ligne devient alors un autre produit, une autre promesse, une autre expérience…

Pendant le cours

Enseigner face à des écrans noirs

Dans le cyberespace, personne ne vous entend crier…

Un point mérite d’être précisé d’entrée de jeu : dans tous les cours que nous avons animés en ligne, les étudiants avaient non seulement éteint leur micro (à notre demande, pour éviter les bruits de fond parasites), mais ils avaient aussi désactivé leur caméra. Malgré plusieurs stratégies mises en place (par exemple, demander à démarrer le cours par un tour de salut où chacun à son tour branche sa caméra et son micro pour dire bonjour à tout le monde), les étudiants sont restés pendant tous les cours avec leur caméra débranchée. Le professeur a eu beau rappeler aux étudiants qu’ils avaient à leur disposition 3 manières de réagir et de participer (cliquer sur « demander la parole », taper dans le tchat, activer le micro), l’interaction a été plus faible qu’en présentiel. En effet, dans une salle de cours, un étudiant qui ne souhaite pas participer connaît très bien quelques trucs : il va garder les yeux baissés quand une question est posée ou il va attendre que le professeur se focalise sur certains étudiants qui s’auto désignent par leur micro mouvements (hochement de tête, discussion, regard franc…). Dans le cas d’un cours en ligne, chaque étudiant se sent protégé par son écran noir : il est doublement à distance – distance physique, bien sûr, mais aussi distance des sens, puisqu’il est littéralement invisible aux yeux du professeur…

Émission et réception des signaux : une problématique d’énergie

Ces écrans noirs pointent vers notre première observation : le passage à un cours en ligne encourage à aller vers plus d’enseignement magistral. Par exemple, si un professeur a l’habitude de mener ses cours physiques avec un mélange de 60 % de cours magistral (le professeur parle et répond aux questions) et 40 % d’animations / exercices / discussions, alors il y a fort à parier que le passage au cours en ligne augmentera la partie de cours magistral (dans notre exemple, elle pourra passer à 70 %, 80 % ou plus), tout simplement parce que la partie animation sera beaucoup plus difficile à maintenir (à cause de questions techniques d’une part, mais aussi à cause de la plus faible interaction des étudiants).

Grosse fatigue

Un autre problème, qui est lié, tient à la fatigue de l’interaction. Toute personne qui a déjà enseigné sait que cela représente une grande dépense d’énergie sur au moins 3 niveaux : dépense d’énergie physique ; dépense d’énergie mentale ; dépense d’énergie nerveuse / émotionnelle. Mais il existe aussi des apporteurs d’énergie : une bonne ambiance dans un groupe d’étudiants, une animation réussie, des échanges nourris et stimulants, tout cela contribue à recharger la batterie d’énergie du professeur. Comparativement, dans un cours en ligne, les dépenses d’énergie vont être exacerbées tandis que les recharges d’énergie vont être limitées. En effet, sans forcément s’en rendre compte, le professeur s’appuie sur une multitude de sens dans sa salle de classe : il utilise simultanément les canaux visuels, auditif et kinesthésique, et il se nourrit de tous ces signaux pour diriger le cours et allouer son énergie. Tous nos collègues le savent : nous avons une forme de 6ème sens qui nous permet de détecter les baisses d’attention, l’ennui croissant, voir une certaine perte de contrôle de ce qui se passe… Dans un cours en ligne, face à des écrans noirs, nous perdons une très grande partie, voire la totalité, de cette capacité. Et même si les étudiants branchaient leur caméra, le problème ne serait pas résolu pour autant : en effet, nos neurones miroirs se nourrissent de toutes les micro-expressions du visage de notre interlocuteur, et même si cela se fait à un niveau non conscient pour nous, cela participe globalement à notre captation des messages qui nous sont envoyés. Lors d’une communication par caméra interposée, nous perdons une très grande partie de ces micros signaux, ce qui conduit notre cerveau à essayer de compenser frénétiquement cette absence d’informations qu’il a l’habitude de collecter. Lors de ce confinement, que de fois avons-nous entendu des collègues indiquer qu’une journée de réunions en visioconférence les fatiguait beaucoup plus qu’une journée de réunions en physique. Il se passe exactement la même chose pour un cours…

Quid de la fluidité ?

Multi-tâche

Quand nous sommes dans une salle de cours, nous avons l’habitude de faire des choses de manière extrêmement fluide : commencer à répondre à une question d’un étudiant tout en se dirigeant vers le tableau blanc, saisir un feutre et le déboucher, commencer à dessiner tout en parlant, saisir le tampon effaceur pour supprimer une erreur et réécrire, tandis que du coin de l’œil, nous vérifions que l’étudiant et ses camarades suivent bien le raisonnement. Comparativement, la même séquence dans un cours en ligne va nécessiter de jongler avec différents outils, de cliquer sur des icônes ou d’activer des raccourcis clavier que nous aurons préalablement mémorisés, et la fluidité ne sera jamais la même que dans une salle de cours. Un autre perturbateur de fluidité porte sur les alertes : dans une salle de cours, quand un étudiant lève la main, il le fait généralement silencieusement et nous enregistrons automatiquement ce signal visuel sans pour autant nous arrêter dans notre présentation. Pour prendre une image, imaginons que pendant un de ses cours en salle, un professeur soit obligé de consulter ses mails – et d’y répondre ! À chaque fois qu’un nouveau mail arrive, une sonnerie retentit, forçant le professeur à prendre connaissance du mail puis à décider s’il y répond ou pas, tout en continuant de faire cours. Il est fort probable que le professeur perdrait une grande partie de sa concentration et donc de sa fluidité. C’est exactement ce qui arrive avec les cours en ligne : nous sommes en train d’expliquer un concept en ayant partagé l’écran, et nous entendons un « ding » qui signifie que soit un étudiant a demandé la parole, soit quelqu’un a posté un message sur le tchat. Il s’agit alors d’activer simultanément diverses parties de notre cerveau : la partie « enseignement oral » doit continuer son travail pendant que la partie « lecture » prend connaissance du message et que la partie « décision » sélectionne la réponse à adopter : ignorer, traiter plus tard, répondre maintenant…

La technique, aide ou fardeau ?

Dans une salle de cours classique, les problèmes techniques présentent généralement des caractéristiques récurrentes. D’abord, ces problèmes sont limités au matériel utilisé : l’ordinateur, le vidéoprojecteur et éventuellement, le micro. Ensuite, en cas de problème, il y a des services d’assistance dédiés. Enfin, si un problème technique surgit, on a toujours un plan B, voire un plan C : si ma clé USB ne marche pas, je peux récupérer mes diapositives depuis le cloud ; si je ne peux vraiment pas récupérer mes diapositives, je peux proposer aux étudiants de suivre le déroulé sur leur support papier ; au pire, je peux rebâtir un cours improvisé en utilisant le tableau blanc et les marqueurs. Comparativement, les problèmes techniques dans un cours en ligne vont être exacerbés selon ces 3 axes. Premièrement, un cours en ligne utilise généralement beaucoup plus d’outils : la plate-forme de captation vidéo avec partage de documents, un utilitaire de dessin, une application de sondage en ligne, des documents partagés pour travail collaboratif… Or, il y a probablement une loi informatique qui a postulé que plus on utilise d’outils, plus grande est la probabilité qu’un problème technique surgisse, car c’est une simple observation de bon sens. Pour ce qui est des services de dépannage, le professeur en ligne ne peut guère compter que sur lui-même. Il a donc désormais une double casquette : en complément de sa casquette historique d’enseignant / chercheur / animateur, il doit désormais enfiler la salopette de Mario le plombier numérique, avec une exigence de rapidité, car tout se passe en live. Cela implique un stress supplémentaire, puisque nous sommes en dehors de notre domaine de compétence, mais aux yeux des participants, nous sommes responsables du rétablissement de bonnes conditions d’enseignement. Ce stress numérique sera d’autant plus exacerbé que dans un cours en ligne, il y a très rarement des plans B en cas de problèmes techniques : soit ça marche, soit on abandonne un pan entier de ce qui avait été prévu. On perd donc grandement dans la granularité de la réponse qui est faite aux problèmes techniques.

Un rapport au temps modifié

Ô temps, suspends ton vol…

Il faut s’habituer au fait que dans un cours en ligne, tout se passe plus lentement. Quand on pose une question, il faut le temps de latence pour que la question arrive aux étudiants (cela peut prendre plusieurs secondes) ; puis l’étudiant réfléchit à la question et décide s’il souhaite y répondre ; si c’est le cas, il faut alors que l’étudiant tape sa réponse dans le tchat ou qu’il clique sur la demande de prise de parole ; enfin, un temps de latence s’écoule avant que ces signaux soient transmis à l’enseignant. Au total, entre le moment ou le professeur pose sa question et le moment où il obtient une réaction de la part de son auditoire, le temps de silence est facilement doublé ou triplé par rapport à la même situation dans une salle de cours. Or, dans une salle de cours, quand il s’agit d’attendre 10 – 15 secondes avant que les étudiants réagissent, cela représente déjà un délai inconfortable pour certains professeurs. Que dire alors de l’expérience d’un cours en ligne, quand il s’agit plutôt de 20 à 30 secondes à fixer des écrans noirs et silencieux en attendant qu’il se passe quelque chose (ou pas) suite à notre question ?

Ce rapport au temps est aussi un rapport au silence, exacerbé par le fait que nous sommes un peu comme ces poissons aveugles dans les profondeurs obscures des océans, c’est-à-dire très limités dans notre perception. Prenons un exemple : le retour de la pause. Dans le monde réel, nous fixons une heure de retour de la pause, et nous pouvons constater visuellement le nombre d’étudiants qui est revenu à l’heure. Par opposition, dans un cours en ligne, comme on a spécifié que les étudiants ne doivent pas se déconnecter pendant le temps de pause, on se retrouve à la fin de la pause face à des écrans noirs et silencieux, tout en ne sachant pas si les étudiants sont effectivement revenus. Il s’agit alors de faire un appel par tchat pour demander aux étudiants de signaler qu’ils sont effectivement à nouveau là. Par moments, on a vraiment l’impression d’être dans un test de Turing : le correspondant distant nous répond, mais nous ne sommes pas sûr de savoir si c’est un être humain ou un tchat-bot (une intelligence artificielle programmée pour répondre à des messages de tchat) !

Scénariser pour dompter le temps et l’incertitude

Il y a une nécessité de scénarisation beaucoup plus poussée dans le cas d’un cours en ligne. En effet, dans une salle de cours, et forts de notre compétence d’enseignant dans notre domaine, nous pouvons nous autoriser des digressions et des improvisations : même si cela n’était pas inscrit sur la partition, nous maîtrisons suffisamment l’instrument pour pouvoir inventer à la volée un exercice, une mise en situation ou une explication qui permette de coller à ce qui est en train de se passer dans la salle à ce moment. Comparativement, et pour toutes les raisons évoquées ci-dessus, le cours en ligne va nous faire courir beaucoup plus de risques dans ces situations d’improvisation. Enseigner en ligne devient alors une stratégie de gestion – et dans le cas présent, de minimisation – des risques.

« Et avec les oreilles,
qu’est-ce que vous faites ? »

À titre illustratif, voici quelques métriques que nous avons pu observer. Une séance de 3 heures en salle est généralement décomposée en 3 à 5 parties, avec un timing élastique : rien n’est vraiment écrit, cela dépend des interactions avec les étudiants, l’objectif central étant de terminer à l’heure en ayant traité correctement toutes les parties. Comparativement, une séance de 3 heures de cours en ligne est généralement scénarisée avec au minimum une quinzaine de séquences différentes : des consignes de début de cours sur les outils en ligne, un tour de table pour se saluer, un premier sondage pour tester le niveau de connaissance d’une notion, la présentation d’un concept sur 3-4 diapositives partagées, du travail en petits groupes pendant 10 minutes puis un débriefing collectif, etc. En fait, si un observateur avait été présent lors des 3 heures de cours en salle, il aurait probablement identifié bien plus que les 3 à 5 parties mentionnées : il est probable qu’un cours de 3 heures en salle se décompose aussi en 15 à 30 séquences distinctes. Mais la différence majeure réside dans la scénarisation : les séquences en salle arrivent quand elles arrivent, certaines étant improvisées à la volée, tandis que les séquences du cours en ligne ont été planifiées, préparées, avec les outils associés (application de sondage, documents partagés, liens vers des vidéos…) selon un script beaucoup plus détaillé.

Concluons enfin cette partie sur une note positive : certes, les cours en ligne vont exacerber les caractéristiques des cours en salle, mais cette exacerbation ne va pas toujours dans un sens négatif. Un exemple d’amplification positive porte sur la co animation : autant une double animation dans une salle de cours représente un moment très agréable de partage entre collègues, autant en ligne, le fait de faire le cours à deux va changer énormément de choses en positif : on peut littéralement s’appuyer sur son collègue pour certaines parties du cours, cela permet de travailler en parallèle sur les éléments de communication annexes (répondre au tchat, préparer un sondage), et les étudiants bénéficient d’une diffusion en live de la discussion entre 2 experts, un peu comme ils assisteraient à une émission de télévision. C’est non seulement une expérience enrichie, mais c’est aussi une occasion de consommer beaucoup moins d’énergie que lors d’un cours en ligne tout seul face à l’écran.

Après le cours

After hours

Une fois que le cours est terminé, il reste toujours des choses à faire. Dans le cas des cours en présentiel, cela consiste à répondre à des questions par e-mail, à poster des documents annexes ou à rédiger des précisions par rapport à certaines questions évoquées en cours. Dans le cas de cours en ligne, il y a au moins 2 éléments supplémentaires qui rajoutent du temps de service après-vente. D’une part, il faut très souvent récupérer et mettre en forme le fruit du travail des étudiants en ligne : que ce soient des résultats de sondages, des contributions réalisées dans des documents collaboratifs ou encore de la structuration d’idées réalisées par le professeur sous forme de cartes mentales, tous ces éléments doivent être récupérés après le cours est transmis par voie électronique aux étudiants – tandis que dans une salle de classe, chaque étudiant est responsable des notes qu’il décide de prendre ou de ne pas prendre. On pourrait simplifier en disant que dans une salle de cours classique, le professeur a besoin de rédiger une présentation PowerPoint avant le cours, tandis que dans un cours en ligne, le professeur doit rédiger 2 présentation PowerPoint : une avant le cours, et une après le cours. L’autre élément de service après-vente spécifique au cours en ligne tient au décalage dans le temps (asynchronicité). En effet, alors que certains étudiants peuvent assister en direct au cours en ligne (synchronicité), d’autres étudiants choisissent de bénéficier de la lecture de la vidéo enregistrée du cours. Certains vont regarder / écouter le lendemain de la séance live, d’autres pourront prendre une semaine ou plus avant de se connecter et de regarder le cours. Cela signifie que les demandes de service après-vente (question, précisions…) vont s’étendre sur une période de temps plus longue, qui sera notamment fonction de la date à laquelle l’étudiant a effectivement regardé la vidéo du cours.

Tu es la meilleure partie de moi

Conclusion Nous avons démarré ce thibillet sur une question en forme de tension : faut-il s’évertuer à ce qu’un cours en ligne soit la copie conforme de son équivalent de salle de classe, ou convient-il au contraire de décaler le cadre de référence, en considérant que le cours en ligne est une entité distincte avec des codes et des attendus différents ? En bref, vrais jumeaux ou frères et sœurs ? Notre angle d’analyse a été de montrer que par expérience, les cours en ligne tendent à augmenter / exagérer / amplifier les problématiques des cours en salle. À notre avis, il s’agit vraiment de 2 médiums différents qui demandent à ne plus être comparés point par point, mais plutôt appréciés dans leurs différences. Le cours en salle est analogue à une pièce de théâtre (pour sa partie magistrale) ou à un jeu de société (pour sa partie animation / discussion / expérience). Le cours en ligne trouve plutôt ses analogies dans une émission de radio (pour sa partie magistrale) ou dans un festival de musique façon Woodstock : le planning précis est décidé à l’avance, le timing est rigoureux… et même si l’on ne sait pas exactement quels problèmes techniques vont surgir ou quels morceaux les différents musiciens vont jouer, la performance sera enregistrée et conservée. Après le théâtre (3ème art), la rhétorique (5ème art) ou le cinéma (7ème art), le cours en ligne deviendra-t-il lui aussi un art à part entière ?

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CovidCampus #5: first weeks of online teaching – from Dr. Jekyll to Mr. Hyde (2/2)

This blog post is part of a series of reflections on the Coronavirus / Covid-19 crisis and the immediate transition from my face-to-face courses to online classes.

Here is the continuation of my experiments on the abrupt switch of all my classes into an online version. I quickly realized that I had to make a mutation of my whole environment (i.e. get rid of my Doctor Jekyll syndrome and forcefully mutate into Mister Hyde). Here is a list of all the little tricks I have tried to put in place alongside this mutation, including false good ideas and safeguards.

When you are not sure about the substance, work on the form.

Before class

As previously noted, the preparation of an online course requires much more time and attention to detail than the same session of face-to-face classes. To give you an idea, my first « decent » online course consisted in 17 distinct sequences for 3 hours of online session. This means I had a checklist with the 17 different parts of the course, and for some parts I even wrote the outline of my speech. It might sound silly, but when you know from the start that the course is recorded and that the video will be available for later viewing, you are much more concerned about the messages you are going to convey, both in form and substance.

One of my opening speeches at the beginning of the course was: « I’m trying new things ». This very simple sentence actually conveyed several messages:

  • it gave me justification to have asked for some last minute assignments – even though this should not be done in such ciscumstances, because of the additional stress it can cause;
  • this contributed to a shared responsibility of reinventing this course, or in other words, the fact that I had a right to make mistakes;
  • it also helped share my stress on this new experience…

As you might recall, during the Dr. Jekyll period I experienced low participation from online students. So I prepared in advance some conditions for active participation:

  • I created groups of 5 students arbitrarily. For this I made a mistake. I realize now that I should have followed to the letter the 2nd law of pedagogics online, i.e. sticking to the simplest. Instead, I tried to find funny names for the groups, to get a bonding effect. Not only did this take me quite a long time to find original names (« Sweet Salsa », « Diwali Party », « Bastille Day »…), but in the end, this triggered a disconcerted reaction from one student, who took it as my desire to regroup students according to cultural stereotypes. This required an apology and a rearrangement of the groups – and therefore a big waste of time and energy on the night before class. Since then, I am no longer looking for originality, only efficiency: the groups are called group 1, group 2, group 3…
  • Once the groups had been formed, I told the students in advance that they would have to answer certain questions during the course: 2 or 3 groups had to work on a course question, for which I shot a small video with one slide explaining what I expected of them. For other groups, I asked to do a search on the Internet and told them that I would ask them for a synthesis during the course. Finally, for some other groups, I warned that I would ask them a question during the live course, and that I would expect them to be contributors. The purpose of all this planning was to avoid cold calling and subsequent awkward silences: they were warned in advance (warm call), so they could prepare themselves. Moreover, the fact of asking the same mission to 2 or 3 groups allowed me to solicit 10 to 15 students for a given task. Given that I currently have about 50% of the students actually present online, and that some of them suffer from « digital timidity », I expecting that out of 10-15 students, there would be at least 2 or 3 who would indeed be participating…
  • On the morning of the class, I only had to print out the list of groups and names to check which students were actually connected. Then, instead of calling the groups by their number, I called out collectively all the connected students by their first name.

At the beginning of the class

Behind the scenes…
  • For each course where I meet the students for the first time, I start with a short description of the computer tool (Zoom or Blackboard Collaborate):
    • the controls they can activate;
    • access to Chat;
    • the discipline of turning off the microphone;
    • asking to talk by raising a virtual hand…
  • Having done that, I ask each student to say hello in turn.
    • I call out a first name, asking them to activate their microphone and camera, wave to everyone and say hello.
    • In the first class where I did this, maybe because of the surprise effect, I had up to 1/3 of the students actually activating their camera; after the surprise effect, in the 2nd class with the same students, I had only 2 out of 27 students activating their camera… There was even a student who asked in the chat if his classmates could make the effort to switch on their camera to say hello – but that didn’t change anything. That said, when you see what a camera accidentally plugged in can do… (caution, explicit video! #teleconference)
  • In the logic of my mutation into Mr. Hyde, this really raises the question of changes that need to be imposed in order to obtain an online course experience as satisfying as a face-to-face course – even though the elements of each experience would be different. It is a new language, with new tools and new reflexes. And the first reflex when faced with a language you don’t know well… is to stay silent. Having said that, one hypothesis is that the reflexes depend on age or context:
    • in the majority of companies that experience online meetings, the courtesy rule (most often imposed…) is that everyone should have their camera on.
    • This may be due to the work context, but from my initial feedback, I see that it is also a question of age: Executive MBAs (whose average age is around 40) all activate their camera during a course, whereas Master students (average age = 23) do not.

Screen sharing

As I experienced during my first week online, sharing of the screen and/or documents has to be as fluid as possible. Here are a few ideas and tricks that I have tried, with varying degrees of success:

  • It’s a real plus to be able to use pencils to highlight some parts on a slide or to write / draw on the screen.
    • Some applications, such as Zoom, allow you to use a drawing toolbar above any shared screen – Blackboard Collaborate allows this too, but with far fewer tools. Also, in Blackboard Collaborate, this might cause delays (lag), so that when you say « this is here that the problem lies », students take 3 seconds to see the arrow you have drawn, like a movie where subtitles are not synchronized with the dialogs.
    • An alternative is to share a Powerpoint slideshow and activate the pencil in Powerpoint to draw directly on the slide (Ctrl-P for Pen, Ctrl-E for Erase, or, with a touch screen, just tap the screen to see a small pop-up menu that displays the pencil or eraser).
    • You can also use another software dedicated to note-taking and drawing: I’ve been using OneNote for years in amphitheaters where it was not possible to read the whiteboard from the last row, and this works like a charm online.
    • For all these tricks, it is even better to have a touch screen and a pen (or even a Wacom tablet, but not too small – for me, the A4 /Legal format is comfortable). With those tools, you will gain precision in your handwriting / drawing.

When it comes to document or screen sharing per se, most visio applications (Zoom, BB Collaborate) only allow you to share one document at a time. This means that when you want to change documents, you have to cancel the sharing of the first document, before you share another screen. However, the thumbnails of open documents are not always refreshed in Blackboard Collaborate, which means that several documents (especially PPT slideshows) are displayed with the same image: you have to pick a document at random, praying that it is the one you want, and by the law of the buttered toast, you often end up sharing the wrong document, so you have to start again and take another pick at random… So I opted for 2 alternative systems:

  • Firstly, I use different formats for documents. One of my slide deck will be in PPT format, and will therefore be opened in PowerPoint; while another deck of slides will have been exported in PDF format, and will therefore be opened in a separate PDF reader; finally, if I need some static images, I have made screenshots of those in advance, and I open them either in an image viewer or in OneNote. Of course, this leads to having several applications open at the same time, with the memory problems that can arise. But at least, with this solution, each document is easily identifiable, and sharing is much smoother, since all applications are already open.
  • Secondly, I open 2 or 3 different browsers: Google Chrome – which is not my favorite browser, but the one that Blackboard Collaborate works best with; Firefox for my online polling application (Wooclap), with the administrator’s rights; Opera, for the same Wooclap application, but this time to get what the students see on the screen. The alternative solution of having a single browser with multiple tabs open is less convenient:
    • within the same browser, you cannot be « logged in » and « anonymous » at the same time – unless you use a plugin, if there is such plugin;
    • navigation between tabs is not as easy as between applications – you have to learn one more keyboard shortcut – if there is such a keyboard shortcut.
  • These 2 alternative systems allow to switch very quickly from one application to another (Alt-Tab on Windows, Command-Tab on Mac) and so, to make a discerning choice on which screen to share.
  • Some of my colleagues use a 3rd solution: a 2nd computer or a tablet next to the main computer, to display the « student side » in parallel.

Tentative conclusion

This requires indeed a lot more concentration. Manipulations are numerous, you have to follow a complex pedagogical thread, and you must have an eye on everything. Here are two anecdotes from my last week:

  • Since I use a lot of keyboard shortcuts, I sometimes trigger new unexpected events on the computer, like exotic Apps that are launched, obfuscating my screen.
  • At one point, a student raised his hand, and I told him to unmute his microphone and speak… I waited… Then told him that we could not hear him… And waited again. After fumbling with my controls, I realized that I had accidentally muted my speakers, and everyone could hear him but me… So I put my speaker icon on display on my screen, and now I regularly check it.
  • Chat can be a challenging tool also. Whenever students are chatting, there is visual sign on the screen, and even though I choose not to look at the Chat immediately (but only after having finished my explanation), the brain is a fickly thing and I am sure that I am not 100% concentrated anymore. Those are distractions in an environement that requires a lot of concentration…

Considering all those improvements and changes, my classes went reasonably well. Indeed , compared to the first « Dr. Jekyll style » courses, the changes I made to my online teaching style seem to have paid off:

  • students participated significantly more, almost reaching the level of a face-to-face session.
  • The Chat allowed some students who were more elusive to express themselves at length without having to participate orally. Some students also used the Chat to pass on humorous reactions about a concept or the arguments of a fellow student, all with excellent wit (cohesive humour, rather than aggressive mockery).
  • I see this as a reward for my own efforts – duly publicized to the participants 😉 – but still with an efficiency ratio to discuss. Indeed, it takes me several hours more work than for a face-to-face course… just to get back to about the same level of participation.

Finally, this is still a work in progress, each week bringing its own little batch of improvements – and many new uncertainties.

“You start a question, and it’s like starting a stone. You sit quietly on the top of a hill; and away the stone goes, starting others…”

Robert Louis Stevenson, The Strange Case of Dr. Jekyll and Mr. Hyde

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CovidCampus #5 : premières semaines d’enseignement en ligne – de Jekyll à Hyde (2/2)

Ce thibillet fait partie d’une série de réflexions sur la crise du Corona virus et le passage immédiat de mes cours en présentiel à une version en ligne.

Voici la suite de mes expérimentations sur le basculement brutal de tous mes cours en une version en ligne. Je me suis vite rendu compte qu’il fallait opérer une mutation de tout mon environnement (mon syndrome de Docteur Jekyll qui allait devoir muter en Mister Hyde). Je vais donc lister ci-dessous tous les petits trucs que j’ai mis en place, avec les fausses bonnes idées et les garde-fous. Comme pour les autres thibillets, je suis preneur de tout commentaire ou suggestion.

Avant le cours

Quand on n’est pas sûr du fond, il faut soigner la forme.

Comme déjà observé, la préparation d’un cours en ligne nécessite beaucoup plus de temps et de souci du détail que la même session de cours en face à face. Pour donner une idée, mon premier cours en ligne « correct » a consisté en 17 séquences distinctes pour 3 heures de session en ligne. J’avais donc une check list avec les 17 parties du cours, et pour certaines parties, j’avais même rédigé les grandes lignes de mon discours. C’est bête à dire, mais quand on sait dès le départ que le cours est enregistré et que la vidéo sera disponible pour visionnage ultérieur, on se préoccupe beaucoup plus des messages que l’on va faire passer, tant dans la forme que sur le fond.

Un des discours de début du cours a été : « j’essaie des nouvelles choses ». Dans cette phrase très simple, il y avait en fait plusieurs messages :

  • premièrement, la justification du fait que je pouvais leur demander certains travaux à la dernière minute – même si ça n’est pas souhaitable, à cause du stress additionnel que cela peut occasionner ;
  • deuxièmement, le partage de la responsabilité de réinventer ce cours, ou en d’autres termes, le fait que j’avais le droit à l’erreur ;
  • enfin, le partage du stress de cette nouvelle expérience…

Une de mes mauvaises expériences de la période Docteur Jekyll avait porté sur la faible participation des étudiants. J’ai donc anticipé pour préparer à l’avance la participation active :

  • J’ai créé des groupes de 5 étudiants de manière arbitraire. Pour cela, j’ai commis une erreur. Je me rends compte que j’aurais dû respecter à la lettre la 2e loi de la pédagogique en ligne, en allant au plus simple. Au lieu de ça, j’ai voulu trouver des noms de groupes qui puissent susciter un effet rassembleur. Mal m’en a pris : d’abord, il a fallu du temps de trouver des noms originaux («Sweet Salsa », «Diwali Party », «Bastille Day »…), Et cela a déclenché une réaction interloquée d’une étudiante, qui a pris cela pour une volonté de regrouper les étudiants selon des stéréotypes culturels, ce qui a nécessité des excuses et un ré-arrangement des groupes – donc du temps, dans la nuit précédant le cours. Depuis, je ne recherche plus l’originalité, seulement l’efficacité : les groupes se nomment groupe 1, groupe 2, groupe 3…
  • Une fois les groupes constitués, j’ai prévenu les étudiants à l’avance qu’ils auraient à répondre à certaines questions durant le cours : 2 ou 3 groupes avaient à travailler sur une question de cours, ce qui a nécessité que je tourne une petite vidéo avec une des diapositives du cours en expliquant ce que j’attendais d’eux. Pour d’autres groupes, j’ai demandé une recherche sur Internet en prévenant que je leur demanderais de synthèse lors du cours. Enfin, pour quelques autres groupes, j’ai prévenu que je leur poserais une question en direct pendant le cours, et que je m’attendrais à ce qu’ils soient contributifs.
  • Le but de toute cette organisation était d’éviter d’appeler les étudiants à froid (cold call), et de créer des silences gênants : ils étaient prévenus à l’avance (warm call), ils pouvaient donc se préparer. Par ailleurs, le fait de demander la même mission à 2 ou 3 groupes me permettait de solliciter 10 à 15 étudiants. Étant donné que j’ai actuellement de l’ordre de 50% des étudiants effectivement présents en ligne, et qu’il y a des « timidités numériques », je comptais que sur 10-15 étudiants, il y en aurait bien au moins 2 ou 3 qui seraient prêts à participer…
  • Le matin du cours, il m’a suffi d’imprimer la liste des groupes et des noms pour repérer assez rapidement quels étudiants étaient effectivement connectés : ainsi, au lieu d’appeler les groupes par leur numéro, j’interpellais collectivement les étudiants présents par leur nom.

Le début du cours

  • Pour chaque cours dans lequel je rencontre les étudiants pour la première fois, je commence par une description rapide de l’outil informatique (Zoom ou Blackboard Collaborate) :
    • quels sont les contrôles utiles qu’ils peuvent activer ;
    • l’accès aux Chat ;
    • la discipline qui consiste à éteindre son micro ;
    • la possibilité de demander la parole en levant une main virtuelle…
L’envers du décor…
  • Cela étant fait, je demande à chaque étudiant de dire bonjour tour à tour. J’appelle un prénom, en lui demandant d’activer son micro et sa caméra et de dire bonjour à tout le monde en faisant un petit coucou.
    • Sur le premier cours sur lequel j’ai fait cela, peut-être à cause de l’effet de surprise, j’ai eu jusqu’à 1/3 des étudiants qui activaient effectivement leur caméra ; passé l’effet de surprise, au 2e cours avec les mêmes étudiants, je n’ai eu que 2 étudiants sur 27 qui ont activé leur caméra… Il y a même eu un étudiant qui a demandé dans le tchat si ses camarades pouvaient faire l’effort de brancher leur caméra pour dire bonjour – mais cela n’a rien changé. Cela dit, quand on voit ce qu’une caméra branchée par mégarde peut donner… (attention, vidéo explicite #télétravail)
  • Dans la logique de ma transformation en Mister Hyde, cela pose vraiment la question des mutations à imposer pour obtenir une expérience de cours en ligne aussi satisfaisante qu’un cours en face à face – quand bien même les séquences seraient différentes. C’est un nouveau langage, avec de nouveaux outils et de nouveaux réflexes. Et le premier réflexe, face à un langage que l’on ne connaît pas bien… c’est de se taire. Cela étant dit, une hypothèse est que les fonctionnements sont générationnels, ou contextuels : dans la majorité des entreprises qui sont passées aux réunions en ligne, la règle de courtoisie (le plus souvent imposée…) est que chacun(e) doit avoir sa caméra allumée. Cela peut être dû au contexte d’entreprise, mais d’après mes premiers retours, je constate que c’est aussi générationnel : les Executive MBA (donc âge moyen = 40 ans) activent tous leur caméra lors d’un cours, contrairement aux étudiants Master (âge moyen = 23 ans).

Le partage des documents

Comme constaté dans ma première expérience, il faut arriver à une certaine fluidité dans le partage des documents. Voici quelques idées et petits trucs que j’ai pu utiliser avec plus ou moins d’efficience :

  • C’est un vrai plus de pouvoir utiliser des crayons pour surligner certains passages d’une diapositive ou pour rédiger ou dessiner à l’écran.
    • Certaines applications, comme Zoom, permettent d’utiliser une barre d’outils de dessin au-dessus de n’importe quel écran partagé – Blackboard Collaborate le permet aussi, mais avec beaucoup moins d’outils. De plus, dans Blackboard Collaborate, cela peut provoquer des délais (lag), ce qui fait que lorsque vous dites « c’est ici que se situe le problème », les étudiants ne vont voir votre flèche que 3 secondes après, comme dans un film où les sous-titres ne sont pas synchronisés avec les dialogues.
    • Une alternative consiste à partager un diaporama Powerpoint et à activer le crayon dans Powerpoint pour dessiner sur la diapositive (Ctrl-P pour Pen, Ctrl-E pour Erase, ou bien, avec un écran tactil, il suffit de taper l’écran pour voir un petit menu contextuel qui propose le crayon ou la gomme).
    • On peut aussi utiliser une autre application dédiée à la prise de notes et au dessin : j’utilise OneNote depuis des années dans les amphithéâtres où il n’est pas possible de lire le tableau blanc depuis le dernier rang.
    • Pour toutes ces pratiques, c’est encore mieux d’avoir un écran tactile et un stylet (voire une tablette Wacom, en ne la prenant pas trop petite – pour moi, le format A4 est confortable) : on gagne en précision dans l’écriture manuscrite ou dans les dessins.
  • Pour le partage des documents en tant que tels, la plupart des applications en ligne ne permettent de partager qu’un seul document à la fois. Cela veut dire que lorsque l’on souhaite changer de document, il faut quitter le partage du premier, et choisir de partager un autre document. Or, les vignettes de partage ne sont pas forcément mises à jour sous Blackboard Collaborate, ce qui fait que plusieurs documents (notamment les diaporamas) sont affichés avec la même vignette : on choisit au hasard, et conformément à la loi de la tartine beurrée, on tombe souvent sur le mauvais document, il faut donc recommencer à piocher au hasard… J’ai donc opté pour 2 systèmes alternatifs :
    • d’une part, j’ai mes documents sous différents formats. Une de mes séquence de diapositives sera au format PPT, et sera donc ouverte dans PowerPoint ; une autre séquence de diapositives aura été exportée au format PDF, elle sera donc ouverte dans un lecteur PDF distinct ; enfin, si j’ai juste besoin d’une image statique, j’ai fait à l’avance des captures d’écran, et je les ouvre soit dans un logiciel d’image, soit dans OneNote. Certes, cela conduit à avoir plusieurs applications ouvertes en même temps, avec les problèmes de mémoire vive qui peuvent se poser. Mais au moins, avec cette solution, chaque document est facilement identifiable, et le partage se fait de manière beaucoup plus fluide, puisque toutes les applications sont déjà ouvertes.
    • D’autre part, j’ouvre 2 ou 3 navigateurs différents : Google Chrome – qui n’est pas mon navigateur préféré, mais qui est celui pour lequel Blackboard Collaborate marche le mieux ; Firefox pour mon application de questionnaire en ligne (Wooclap), du point de vue de l’administrateur ; Opera, pour cette même application, mais pour avoir ce que les étudiants voient à l’écran. La solution d’avoir un seul navigateur avec plusieurs onglets ouverts est moins pratique:
      • au sein d’un même navigateur, on ne peut pas en même temps être « logué » et « client » – sauf à utiliser une extension, si elle existe ;
      • la navigation entre onglets n’est pas aussi facile qu’entre applications – il faut apprendre encore un raccourci clavier de plus – quand il existe.
  • Ces 2 systèmes alternatifs permettent de passer très rapidement d’une application à une autre (Alt-Tab sous Windows, Pomme-Tab sur Mac) et de choisir avec discernement quel écran partager.
  • Certains de mes collègues utilisent une 3e solution : un 2ème ordinateur ou une tablette à côté de l’ordinateur principal, pour afficher en parallèle le « côté étudiant ».

Conclusion provisoire

Tous ces changements exigent beaucoup plus de concentration. Les manipulations sont nombreuses, il faut suivre un fil pédagogique complexe, et garder l’œil sur tout. Voici quelques anecdotes de ma dernière semaine :

  • Comme j’utilise beaucoup de raccourcis clavier, je déclenche parfois de nouveaux événements inattendus sur l’ordinateur, comme le lancement d’applications exotiques qui obscurcissent mon écran. Il faut savoir rester zen, ne pas commenter, et chercher à reprendre la main…
  • À un moment donné, un étudiant a levé la main, et je lui ai dit de d’allumer son micro et de parler… J’ai attendu… Puis lui ai dit que nous ne pouvions pas l’entendre… J’ai attendu à nouveau. Après avoir tâtonné avec mes commandes, je me suis rendu compte que j’avais accidentellement coupé le son de mes haut-parleurs, et que tout le monde pouvait l’entendre sauf moi… J’ai donc appris à afficher l’icône de mon haut-parleur sur mon écran, et maintenant je vérifie régulièrement son état.
  • Le tchat peut aussi être un outil destabilisant. En effet, chaque fois que les élèves tapent dans le tchat, un signal visuel s’affiche àl’écran, et même si je choisis de ne pas regarder le tchat immédiatement (mais seulement après avoir fini mon explication), le cerveau est une chose capricieuse et je suis sûr que je ne suis plus concentré à 100%. Ce sont des distractions dans un environnement qui demande beaucoup de concentration…

Compte-tenu de tous ces éléments, les cours se sont raisonnablement bien passés. En comparant par rapport aux premiers cours « style Dr. Jekyll », les mutations que je me suis imposées dans mon style de cours semblent avoir porté leurs fruits :

  • les étudiant(e)s participent significativement plus, pour atteindre presque le niveau d’une session de cours en face à face
  • le Chat a permis à certain(e)s étudiant(e)s plus mentaux ou plus timides de s’exprimer longuement sans avoir à participer oralement. Certain(e)s ont aussi utilisé le Chat pour faire passer des mots d’humour sur une notion ou la réaction d’un(e) camarade, le tout avec un excellent esprit (humour de cohésion, plutôt que moquerie agressive).
  • J’y vois une récompense de mes propres efforts – dûment médiatisés auprès des participants 😉 – mais avec néanmoins un ratio d’efficacité à discuter. En effet, cela me demande plusieurs heures de travail en plus par rapport à un cours face à face… juste pour revenir à peu près au même niveau de participation.

Mais ceci est toujours un chantier en cours, chaque semaine apportant son petit lot d’améliorations – et beaucoup de nouvelles incertitudes.

Vous démarrez par une question, et c’est comme si vous lanciez une pierre. Vous vous asseyez tranquillement au sommet d’une colline ; et la pierre roule, en entraînant d’autres à sa suite…

Robert Louis Stevenson, The Strange Case of Dr. Jekyll and Mr. Hyde

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CovidCampus #4 : first week of pivoting to online teaching (1/2) – the Dr. Jekyll syndrom

This blog post is part of a series of reflections on the Corona virus crisis and the immediate transition from my face-to-face courses to online classes.

The professor from the 19th century
dealing with a 21st century class…

After general thoughts, let’s move on to a field report. Last week, I had the opportunity to test different online teaching setups. I will talk more specifically about 2 experiences, the first one and what I learned from it, and the last one, with all the modifications I tried to put in place to alleviate the initial disappointments.

This post will cover the first experience, or the Dr. Jekyll effect.

Some background: this course was a course shared with one of my colleagues. She was in charge of the first half (1h30), then I took over for the second half (1h30). My part consisted in debriefing a case that the students had previously handed in. This meant showing a few of their cases and commenting on them.

Before the class
A classical (face to face) needs preparation, of course. An online course takes even more preparation, in at least 3 distinct directions that can take a lot of time.

  • First and foremost, there is the technological aspect. I had opted for a solution that was both simple (to follow the 2nd law of pedagogics) and ambitious, because it required juggling between several applications: Zoom with screen sharing, and Google documents. The first piece of advice I could give is to really do some training « like in real life » before the class. This allows to discover things that afterwards seem obvious, such as taking the precaution of opening all the necessary documents before the course, so that screen sharing can be done immediately, without having to wait for a given application to be launched, or a document being loaded.
  • Communication with students. According to my first law of pedagogics, I had resolved to maintain regular communication with the students. As a matter of fact, there was no need to push in this direction: the implementation of the online course required many types of interactions with the students before the course even started:
    • To begin with, a few informative e-mails indicating the solutions I had chosen and the links to attend and communicate (the link to my Zoom room where the course would take place; the link to the question sheet shared from Google documents; answers to questions on logistics).
    • I also shot a small 2-minute video showing how to use Zoom from the student’s side, and giving some instructions for the class – for example, that all students mute their microphones to avoid noises in the background (reminder: almost all students are in confinement in apartments shared with other people, and possibly young children or animals…). It was also a test to see how easy it is to shoot a short video with Zoom => yes, it is easy, and it allows to relocate part of the content « outside of class ».
    • Finally, I proposed to do a « trial run » two days before the course, i.e. a session of 15 minutes to test the technological solutions. Here again, and even if only 4 students were present, this session was very beneficial in bringing out the problems that can arise in a real situation.
    • In retrospect, I see several beneficial effects from this abundance of communication. On a basic level, it sends the message that I am working for my students, and that they are not being left alone in this situation. On a less obvious level, it prepares the students for the online course experience, by giving them a few things in advance of what is going to happen (written communication of questions, sharing documents with online annotation…). And finally, maybe it can create a sense of committment, by convincing students to really attend the online course, instead of passively waiting for the recorded session for deferred viewing. In other words, it helps to make them a little less « passive listeners » and a little more « actors in their learning ».
  • Coordination with colleagues. In the case of an online course, there is a lot of hidden time that does not necessarily appear as such. The coordination with my colleague for our 2 classes required several exchanges by email, phone calls and a Zoom training session. Once again, as obvious as it may appear, there’s a huge difference between intellectual knowledge (« you’ll see, Zoom is like Skype »), and the simulation of a course session (for example, thinking about launching the recording of the session 😉 ).

During class

This first experience was the opportunity to experience several discomforts.

  • The key discomfort was to realize that during an online class, everything becomes extremely slow. Juggling between different activities adds each time a small amount of latency (« lag »), with the corresponding stress building up. What one does naturally in a physical classroom, without even thinking about it, requires much more concentration when doing an onlinecourse.
    • For example, while displaying slides, you can grab a felt tip pen at any time and begin write on the board. Online, this means that you have to activate the annotation bar (lag), then choose whether you are going to type a text or draw, because it is not the same tool (lag), then click on the chosen tool, then draw on the slide above your text (lag), then select the eraser to erase the drawing (lag), then select the mouse arrow to return to the slide scroll mode (lag). Of course, in such a complex sequence, there are a lot of mishaps and idle times… In several occasions, I found myself scribbling on a slide when I wanted in fact to scroll to the next slide. So [select eraser], [delete], [select arrow], [scroll slide]…
    • And yet, those are simple manipulations. Comparatively, it will take an even longer time to share a given document on the screen. In these cases, one of the lessons I have learned is to choose when (not to) apply the advice that radio hosts know: avoid silence on the air (« dead air ») at all costs. Indeed, when we fumble with controls or wait for a document to appear, we all tend to repeat the same words and excuses over and over again: « You’re going to have to wait a bit… », « Ah, it takes a while to load… », « Sorry, my computer is slow… ». In fact, it’s an attempt to fill the silence, without conveying any real information. So I suggest two alternative strategies:
      • Silence. Please avoid try to fill the silence. Take advantage of this situation to breathe. Tell yourself that everyone has earned this silent break, both the teacher who stops talking for a moment, and the students who can relax for a while. A short sentence such as « take a deep breath while you wait » can even explicitly signal that it’s a mini-break.
      • Moving into metacommunication. A strategy not to be used systematically, as it requires a minimum of preparation. This consists in commenting on the situation. For example, « as you can see, it takes time to load. Then again, you will often have the role to conduct meetings remotely. So my question is: which solutions would you use to avoid the discomfort of this waiting time and/or to continue to motivate your listeners? « It can also be « use this moment to take stock of what we have just said. If you had to summarize in a few key ideas what we’ve been talking about for the last 20 minutes, what would you write? »
    • There’s also what I call the double lag.
      • First, there is the technological lag: between the moment I draw on the screen and the moment it is displayed on the student’s screen, there is a lag that depends on the quality of our respective Internet connections and the power of our respective processors. This means that when I ask a question, it can take no less than 3 seconds, and often more, before the students actually hear it.
      • And there is also the human lag. In a real-life classroom, when I ask a question, there is always a silence that follows. Indeed, the students have to process the question to understand it; then they mentally look for answers they might give; finally they decide whether they are going to participate to share their ideas, and if the answer is yes, then they start thinking about the form of their oral participation. All this takes time, which might depend on the students’ brain speed, but all in all, it is never negligible. That being said, even when this happens in a classroom, not all professors have the same reaction to silence. In my classes on pedagogy, I use the MBTI (Myers-Briggs) model to show that lecturers generally have a type of teaching that corresponds to their own personality type. For example, if we take the first axis of the MBTI model, type E professors will tend to expect a quick reaction from their students. Once they have asked a question, they have their perception of relative time, and they will begin to feel discomfort as soon as silence lasts more than a few seconds: they will thus tend to react quickly, either by asking the question again, or by rephrasing or cold calling a given student – who might still be in his/her thinking process.
      • Now, in an online class, there is the cumulative effect of this double lag. Things take more time: even a simple conversation back and forth (« Are you okay? », « Yes, I’m okay! « ) takes a longer time online than in real life. So when it comes to more complex issues, with the effect of the double lag, it is better to learn to slow down real-life reflexes, to breathe, to get used to silence… This can lead to an « old and wise man » effect which is not bad. The students can feel that the rhythm becomes more relaxed, more reflective, and less oriented towards a dialogue in the form of a verbal ping-pong…
    • The loneliness of the black screen. Online, most (and, in my experience, all) students turn off their cameras. So this leads to teaching black screens. You can’t tell whether the student is nodding his head, if she’s taking notes in a concentrated way, if he’s very busy with a parallel discussion through e-mail, or even whether she has left the room… This leads to moments of loneliness, when we call Jim who had typed a question and we all wait for Jim to unmute his microphone… or to come back into the room eventually. When this is combined with a low use of the Chat by students, it feels like talking to an empty room.
  • All of this leads to a lot of stress and a lot of consumed energy. Compared to a face-to-face course (which is already a tiring experience, on a physical, emotional and mental level), an online course requires to send out a lot more energy, and to exercise a lot more control – while having, comparatively speaking, a lot less feedback. In this first course, for example:
    • less than half of the students were connected
    • the Google docs sheet intended to receive the questions remained empty throughout the class
    • Chat was not used often, and when used, it showed its limits: when I ask a question, students think (double lag) and they want to type their answer quickly… at the expense of clarity! So I had some answers that were really difficult to use as inputs:
      • on the one hand, you want to praise the student who took the trouble to write and interact (positive reinforcement);
      • on the other hand, the message may not be understandable, or it may mean several different things. In short, it is a downgraded communication that can lead to frustration on both sides.

In my case, the demand for energy and concentration was further increased by the fact that this course is given in English, which is not my mother tongue… And even though I think I have a good level in English (at least enough to have delivered classes in this language for years), the online transition adds a difficulty because of all the unplanned elements. Let’s take an analogy.

  • Let’s imagine that we tell a French manager that he’s going to have to make a presentation in English. So he prepares for it, he writes out his speech elements, the visual aids, and most often he repeats the speech in front of his mirror, he might even be timing his speaking time until he feels ready and in control.
  • Now let’s imagine that the same manager is told that he will have to conduct a « fire and evacuation » drill in English. He doesn’t necessarily know the technical terms, because he is no fireman; he doesn’t know what will happen, who will interupt and when, or the nature of the questions that will be asked; he doesn’t especially have expertise in « fire evacuations ». In this second case, the experience of communicating in English will be much more demanding, both in terms of energy and concentration that are required.

To sum up, I felt like the nice Dr. Jekyll, used to an already well-controlled and comfortable life, who said to himself, « Even if I don’t know this new part of town at all, I just have to behave as usual ». Well, it’s not enough. It’s not enough at all. Hence the fatigue and frustration that came from this first experience in the form of a baptism of fire.

In the next blog post, we will see my next classes, and my progressive mutation into Mister Hyde… (work in progress 😉 )

“Here then, as I lay down the pen and proceed to seal up my confession, I bring the life of that unhappy Henry Jekyll to an end.”

Robert Louis Stevenson, The Strange Case of Dr. Jekyll and Mr. Hyde

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CovidCampus #4 : la première semaine d’enseignement en ligne (1/2) – le syndrome Dr. Jekyll

Ce thibillet fait partie d’une série de réflexions sur la crise du Corona virus et le passage immédiat de mes cours en présentiel à une version en ligne.

Quand un professeur « blouse tableau noir »
affronte le dragon Internet (avec une craie)

Après les réflexions générales, passons au compte rendu d’expérience. La semaine dernière, j’ai eu l’occasion de tester différentes occasions d’enseignement en ligne. Je vais parler plus spécifiquement de 2 expériences, la première et les enseignements qu’elle m’a apportés, et la dernière, avec toutes les modifications que j’ai pu mettre en place suite aux premières déconvenues.

Ce thibillet va parler de la première expérience, ou l’effet Docteur Jekyll.

Quelques éléments de contexte : ce cours était un cours partagé avec une de mes collègues. Elle assurait la première moitié (1h30), puis je prenais la main pour la deuxième moitié (1h30). Ma partie consistait à réaliser le corrigé d’un cas que les étudiants avaient rendu. Cela signifiait de montrer quelques cas et les commenter.

Avant le cours
Un cours classique se prépare, évidemment. Un cours en ligne se prépare encore plus, dans au moins 3 directions distinctes qui prennent du temps.

  • Bien évidemment, il y a l’aspect technologique. J’avais opté pour une solution à la fois simple (pour suivre la 2e loi de la Pédagogique) et ambitieuse, car elle imposait de jongler entre plusieurs applications : zoom avec partage d’écran, et Google documents. Le premier conseil que je pourrais donner est de ne pas négliger l’entraînement «comme en situation réelle». Cela permet de découvrir des choses qui après coup paraissent évidentes, comme par exemple de prendre la précaution d’ouvrir tous les documents nécessaires avant le cours, de telle sorte que les partages d’écran se fassent immédiatement, sans avoir à patienter pour le lancement d’une application donnée ou le chargement d’un document…
  • La communication avec les étudiants. Selon ma première loi de la Pédagogique, j’avais comme principe d’assurer une communication régulière avec les étudiants. Il n’y a pas eu besoin de forcer dans cette direction : la mise en place du cours en ligne a nécessité de toute façon plusieurs types d’interactions avec les étudiants avant même que le cours ne démarre :
    • D’une part, quelques mails d’information indiquant les solutions que j’avais choisies et les liens pour communiquer (le lien vers ma salle zoom où aurait lieu le cours ; le lien vers la feuille de questions partagées depuis Google documents ; des réponses aux questions logistiques).
    • D’autre part, j’ai tourné une petite vidéo de 2 minutes montrant la prise en main de zoom et donnant quelques consignes pour le cours – par exemple, que tous les étudiants coupent leur micro pour éviter que tout le monde entendre les bruits à l’arrière-plan (rappel : la quasi-totalité des étudiants sont en confinement dans des appartements partagés avec d’autres personnes, voire des jeunes enfants ou des animaux…). C’était aussi un test pour voir s’il est facile de tourner une capsule vidéo courte avec Zoom. Réponse : oui, c’est facile, et cela permet de délocaliser « hors cours » une partie des contenus.
    • Enfin, j’avais proposé aux étudiants disponibles de faire un « galop d’essai » deux jours avant le cours : une session de 15mn maximum pour tester la solution technologique. Là encore, et même si seulement 4 étudiants étaient présents, cette session a été très bénéfique pour faire apparaître les problèmes qui peuvent surgir en situation réelle.
    • Rétrospectivement, je vois plusieurs effets bénéfiques à cette abondance de communication. À un niveau élémentaire, cela envoie le message que je suis en train de travailler pour mes étudiants, et qu’ils ne sont pas laissés seuls dans cette situation. À un niveau moins apparent, cela permet de les préparer à l’expérience du cours en ligne, en leur donnant par avance quelques éléments de ce qui va se passer (communication écrite des questions, partage de documents avec annotation en ligne…). Et puis, peut-être, cela peut convaincre des étudiants de venir au cours en ligne, au lieu d’attendre passivement que la session enregistrée soit mise à leur disposition pour une consommation différée… En d’autres termes, cela contribue à les rendre un peu moins « auditeurs passifs » est un peu plus « acteurs de leur apprentissage ».
  • La coordination avec les collègues. Dans le cas d’un cours en ligne, il y a beaucoup de temps masqué qui n’apparaît pas forcément en tant que tel. La coordination avec ma collègue pour nos 2 interventions a nécessité plusieurs échanges par mail, des appels téléphoniques et une séance de formation à zoom. Encore une fois, c’est tout bête à dire, mais il y a une différence entre la connaissance intellectuelle (« tu verras, Zoom, c’est comme Skype »), et la mise en situation d’une session de cours (par exemple, penser à lancer l’enregistrement de la session 😉 )

Pendant le cours.

Cette première expérience a été l’occasion de vivre en direct plusieurs inconvénients.

  • D’une part, tout est extrêmement ralenti. Le fait de jongler entre différentes activités ajoute à chaque fois un petit temps de latence (« lag »), avec le stress correspondant.
    • Ce que l’on fait naturellement et sans y penser dans une salle de cours nécessite beaucoup plus de concentration quand on fait un cours à distance. Par exemple, en salle de cours, une diapositive est projetée à l’écran et à tout moment, sans même y penser, on se saisit d’un feutre et on écrit au tableau. En ligne, cela veut dire que l’on doit activer la barre d’annotation (lag), puis choisir si l’on va taper du texte ou dessiner à main levée, car ce n’est pas le même outil (lag), puis cliquer sur l’outil choisi, puis faire le dessin en surimpression de la diapositive (lag), puis sélectionner la gomme pour effacer le dessin (lag), puis sélectionner la flèche de la souris pour repasser en mode défilement de diapositives (lag). Bien évidemment, il y a quantité de ratés et de temps morts… Je me suis retrouvé plusieurs fois à gribouiller une diapo alors que j’aurais voulu passer à la suivante, donc [sélection gomme], [effacer], [sélection flèche], [faire défiler diapo]…
    • Et encore, ce sont là des manipulations simples. Comparativement, cela va prendre encore plus de temps de partager l’écran vers un document donné. Dans ces cas-là, une des leçons que j’ai retirées consiste à appliquer avec discernement la consigne que connaissent les animateurs radio : éviter à tout prix le silence à l’antenne. En effet, dans ce genre de situation, nous avons tous tendance à répéter toujours les mêmes mots et les mêmes discours : « il va falloir patienter un peu… », « Ah, ça prend du temps à charger… », « Désolé, mon ordinateur est lent… ». En fait, c’est une tentative de meubler le silence, sans réel apport d’information. Je suggère donc deux stratégies alternatives :
      • Se taire. Éviter de remplir le silence. En profiter pour respirer. Se dire que tout le monde a mérité cette pause silencieuse, autant le prof qui s’arrête de parler un moment que les étudiants qui peuvent relacher leur concentration. Une petite phrase courte, du genre « respirez profondément en attendant » peut même signaler explicitement que c’est une mini-pause.
      • Passer en métacommunication. Stratégie à ne pas utiliser systématiquement, car elle nécessite d’avoir préparé un minimum son discours. Cela consiste à commenter la situation. Par exemple « vous voyez, cela prend du temps. Or, en tant que managers, vous serez souvent amenés à conduire des réunions à distance. Alors j’ai une question : quelles solutions utiliseriez-vous pour éviter l’inconfort de ce temps d’attente / pour continuer à motiver vos auditeurs ? » ; cela peut être aussi « profitez de ce moment pour faire le point sur ce que nous venons de dire. Si vous deviez résumer en quelques idées clés ce dont nous avons parlé depuis 20mn, qu’est-ce que vous écririez ? »
    • Il y a aussi ce que j’appelle le double lag.
      • Il y a d’une part le lag technologique : entre le moment où je dessine à l’écran et le moment où cela s’affiche sur l’écran de l’étudiant, il y a un décalage qui dépend notamment de la qualité de nos connexions Internet respectives et de la puissance du processeur de nos appareils. Cela signifie que quand je pose une question, il peut s’écouler 2 à 3 secondes avant que les étudiants l’entendent effectivement.
      • Mais il y a aussi le lag humain. Dans une salle de cours dans la vraie vie, quand je pose une question, il y a un silence plus ou moins long qui s’ensuit. D’abord, les étudiants processent la question pour la comprendre ; puis, ils cherchent mentalement les réponses qu’ils pourraient apporter ; enfin, ils décident s’ils vont intervenir pour partager leurs idées, et si la réponse est oui, alors ils se mettent à réfléchir à la forme de leur intervention. Tout cela prend un temps qui dépend de la réactivité des étudiants, mais qui n’est pas négligeable. Or, déjà dans une salle de cours, tous les professeurs n’ont pas la même réaction au silence. Dans mes cours de pédagogie, j’utilise le modèle MBTI pour montrer que les enseignants ont en règle générale un type d’enseignement qui correspond à leur propre type de personnalité. Par exemple, si l’on prend le premier axe du modèle MBTI, les professeurs de type E vont avoir tendance à attendre une réactivité rapide de la part de leurs étudiants. Leur perception du temps relatif va les conduire à ressentir de l’inconfort dès qu’un silence se prolonge plus de quelques secondes après une de leurs questions : ils vont avoir tendance à réagir vite, soit en reposant la question, soit en reformulant, soit en interpellant un étudiant donné.
      • Or, en ligne, il y a l’effet cumulatif du double lag. Les choses prennent plus de temps : un simple aller-retour « ça va ? » « oui, ça va ! » prend déjà plus de temps que dans le monde réel, alors quand il s’agit de questions plus complexes, avec l’effet du double lag, il vaut mieux apprendre à ralentir toutes les réactions, à respirer, à s’habituer au silence… Cela peut conduire à un effet « vieux sage » qui n’est pas mauvais. On montre aux étudiants que le rythme est devenu plus posé, plus orienté vers la réflexion et moins vers la production d’un dialogue en forme de ping-pong verbal…
  • La solitude de l’écran noir. En ligne, la plupart – que dis-je, la totalité – des étudiants désactivent leur caméra. Cela conduit donc à enseigner à des écrans noirs. On ne peut pas savoir si l’étudiant hoche la tête, s’il prend des notes de manière concentrée, s’il est très occupé par une discussion en parallèle sur son logiciel de messagerie, ou même s’il a quitté la pièce… Cela conduit à certains moments de solitude, quand on appelle Jim qui avait tapé une question et qu’on attend tous que Jim branche son micro… ou qu’il revienne dans la pièce. Quand c’est assorti à une faible utilisation du Chat, on a un peu le sentiment de parler face à une pièce vide.
  • Tous cela conduit à beaucoup de stress et d’énergie dépensée. Comparativement à un cours dans la vie réelle (qui est déjà une expérience fatigante, au niveau physique, émotionnel et mental), un cours en ligne nécessite d’envoyer beaucoup plus d’énergie, et de contrôler beaucoup plus de choses – tout en ayant, comparativement, beaucoup moins de retours. Lors de ce premier cours
    • moins de la moitié des étudiants étaient connectés
    • la feuille Google docs destinée à recevoir les questions est restée vide
    • le Chat a été très peu utilisé, et il a montré ses limites : quand je pose une question, les étudiants réfléchissent (double lag) et certains tapent vite leur réponse… au détriment de la clarté ! J’ai donc eu des réponses difficiles à ré-utiliser :
      • d’un côté, on veut mettre en avant l’étudiant qui a pris la peine d’écrire, pour créer un exemple positif ;
      • de l’autre, le message n’est pas forcément compréhensible, ou il peut signifier plusieurs choses distinctes. Bref, c’est une communication dégradée qui peut conduire à une frustration des deux côtés.
    • Dans mon cas, la demande d’énergie et de concentration étaient encore augmentées par le fait que ce cours se fait en anglais, qui n’est pas ma langue maternelle… Et même si je pense avoir un niveau correct en anglais (au moins sufffisamment pour enseigner dans cette langue depuis des années), le passage en ligne rajoute une difficulté à cause des éléments non planifiés. Prenons une analogie.
      • Imaginons qu’on dise à un manager français qu’il va devoir faire une présentation en anglais. Il s’y prépare donc, il rédige ses éléments de discours, les supports visuels, et le plus souvent, il répète l’intervention devant son miroir, voire il chronomètre son temps de parole.
      • Imaginons maintenant qu’on dise à ce même manager qu’il va devoir animer un exercice d’alerte incendie et d’évacuation en anglais. Il ne connaît pas forcément les termes techniques ; il ne sait pas ce qui va se passer, qui va intervenir et quand, ou la nature des questions qui lui seront posées ; il n’a pas spécialement d’expertise en « alerte incendie ». Dans ce deuxième cas, l’expérience de communication en anglais sera beaucoup plus demandeuse, tant en terme d’énergie que de concentration nécessaire.

En résumé, j’ai eu le sentiment d’être le gentil Docteur Jekyll, habitué à une vie déjà bien contrôlée et confortable, et qui s’était dit « Même si je ne connais pas du tout ce nouveau quartiter, il suffit que je me comporte comme d’habitude ». Eh bien, ça ne suffit pas. Du tout. D’où fatigue et frustration issues de cette première expérience sous forme de baptême du feu.
Dans le prochain thibillet, nous verrons ma transformation progressive en Mister Hyde… (chantier en cours 😉 )

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CovidCampus #3: the 3 Laws of Pedagogics to switch to an online course

This blog post is part of a series of reflections on the Corona virus crisis and the immediate transition from my face-to-face courses to online classes.

Updated job title, same pay, but… new outfit!

Here is the report of some experiments I have done in the past few days, with the corresponding links. To use again the idea of Magnetic North that I mentioned in an earlier post, I applied the equivalent of Isaac Asimov‘s 3 laws of robotics. For my readers who don’t know about these, those 3 laws are interlocked

  1. The first law is the one with the highest priority;
  2. the second law has a slightly lower priority, and is only applied as long as it doesn’t violate the first law;
  3. the 3rd law has the weakest priority: it is only enforced if it does not violate the 1st or 2nd law.

I have therefore established my 3 pedagogical laws according to this scheme.

  1. The first law is: « take care of my students »;
  2. the second law is « accept that courses are in degraded mode »;
  3. the 3rd law is « use collective intelligence ».

Here we go with descriptions and experiments.

  • First law (priority over the others): take care of my students.
    • Communicate on a regular basis. Following the announcement of stage 3 in France, I sent several collective emails to my students. In accordance with what I said in the blog post on communication, the main idea was to inform my students that they had a contact person available if they needed help.
    • Conduct a survey. I realized very quickly that the technological solutions mentioned by my school (especially the digital team), or on the Internet (especially on Twitter, with the hashtag #CovidCampus) were solutions that assumed that the students had an advanced digital environment. However, between the closure of the school premises – where there is Wifi everywhere and we have dedicated and comfortable workspaces – and the return to their home countries, I needed to know what the working environment of my students was. So I sent them an online survey to learn more about their hardware + Internet setup, to check whether they had already had online courses, and to find out what their needs might be for the next sessions. Fortunately (thanks to the 3rd Law), I was able to use an online survey that an American Professor had designed and shared (link here). It was also interesting for statistical purposes: for students that I had already encountered in real life in class, just under 50% of the students responded to the survey, and only 20% answered questions that required slightly more detailed answers (for example, expressing their personal needs); on the other hand, for those courses in which I had not yet met the students in real life, the response rate dropped to less than 25%. Although the sample is not statistically significant, having had face-to-face courses might increase digital engagement when moving to an online course.
    • React quickly. In the needs expressed by my students, there were concerns about different aspects of the course: would there be an online presence/absence check? How to organize for group assignments? How to ask questions during an online course? Was it possible to avoid using the whiteboard in the classroom, as it was not legible on video (this was before the announcement of total confinement in France)? For all these general questions, I sent emails with adapted rules. For special requests, I used individual emails.
    • Show adaptability and imagination. Here’s an example that amused me in its different layers of complexity: several students worried about the poor quality of the work they would have to hand in by Monday. Indeed, due to travels home or other mishaps stemming from the coronavirus crisis, they could not communicate as smoothly as before with their work group, so they were anxious about the poor grade they might get. My first response was to say that this assignment would not be graded, because the most important thing was not to get a grade, but to learn… Then I thought of the opposite case: a group of students who had been working for weeks to deliver professional quality work. How would these students take the last minute announcement that their work would not be graded, and their efforts unpaid? So I opted for a slightly more complex proposal: all groups had to hand in their work by the deadline, regardless of the level of completeness, but each group had the possibility to request individually that their case not be graded (even though I promised to give them a detailed feedback). One can go very far in imagining all possible scenarios. Suppose a group had asked to be graded, and then got a bad mark: how should we deal with this siuation, compared to a group that chose not to be graded, and whose average grade would not suffer from the last assignment’s quality?
  • The answer lies in the application of the 2nd law: avoid complicating things, deal with each situation as it comes up, instead of trying to foresee everything at the beginning (theory of incomplete contracts) .
  • 2nd law to be applied (only if it does not violate the first one): accept that the course will be in degraded mode.
    • KISS (keep it simple and stupid). Telling myself that the online course will not be as interesting as a face-to-face course was ultimately quite liberating: it’s not about striving for perfection, but aiming for a minimum of efficiency. This can be done in a few very simple steps.
    • Rely on the tools I already know. Rather than investing time in reading, judging, and self-training on new tools, I prefer to capitalize on the solutions and environments I already know. And whenever possible, by aiming at technological frugality: not all students necessarily have access to a webcam or a broadband connection that allows video broadcasting. For example, recording a PowerPoint presentation with an audio commentary will end up in a degraded version of a lecture that has the advantage of being very light to transfer (even though it is probably dreadfully boring to follow…).
    • Reasoning in terms of piling up bricks. Following Maslow’s hierachy of needs, it is only once the basic needs are met (here, being able to display slides with an oral comment) that one can worry about adding more things. Here is my indicative pile of bricks to date, starting from the basic need and only moving up when the previous level is secured:
      1. scrolling through slides with an oral commentary
      2. give students the opportunity to ask questions live (for example, in writing in a shared Google drive document or – more complex – a chat utility or – more complex – an oral interruption)
      3. have an online whiteboard solution to be able to draw or type text
      4. Allow students to vote live on issues (e.g. with Wooclap or Klaxoon).
      5. Allow students to group together from time to time in small virtual workrooms before returning to the collective digital « amphitheatre ».
    • Back to basics. For me, the seminal question is pedagogical, not technological. It’s a question of very quickly identifying the key messages that you absolutely want to get across during a course session. Moving to an online course will require adapting resources to ensure that these key messages are actually conveyed. In other words, we follow the logic of Mies van der Rohe, less is more.
  • The 3rd law (only to the extent that it does not contradict the first 2 laws): use collective intelligence.
    • I see 3 sources of collective intelligence: my colleagues; my students; the Internet.
    • My colleagues. The digital department of my school has quickly set up training in face-to-face or with distance learning, and this has helped enormously to spread knowledge about our digital tools. At the same time, we exchanged a lot of e-mails on the mailing list of all the professors. This allowed me to notice that there are a lot of profiles with a lot of different pedagogical needs within the school (school in the broadest sense, since we have several thousands of external lecturers…) Faced with this great diversity of questions, I realized very quickly that appealing to collective intelligence would most of the time contradict the 2nd law (go for simplicity).
    • My students. With the survey that I sent, I was able to collect some opinions from them, but not really advices on how to do an online class. Except for one student who suggested that I do the lectures with a touch tablet, I only received contributions focused on questions, not suggestions for solutions. I also opened a shared Google drive sheet, so that students could ask questions before class. To date, no questions have been asked. My conclusion is that here too, we cannot expect too much in terms of collective intelligence. In the long run, it will be worthwhile to come back to the respective roles of each one and their respective commitment. I summarize my views by deliberately exaggerating: in an extremely controlled course, where the professor announces strict rules of the game and a pre-set framework, it is not enought to have a Coronavirus crisis and an empowerment message (« do not hesitate to take charge and organize collective solutions among yourselves ») to change the behaviors established since the beginning of the semester. Our economy of attention very easily becomes an economy of passivity.
    • Internet. Praise be given to Twitter, which has made it possible to federate the individual efforts of hundreds of higher education professors around the world. Using the hashtags #CovidCampus, #CovidCampusFr, #PivotToOnline or #PivotOnline has saved me precious time by reading the advice posted by professors who were faced with the same questions as I was. It also made me realize that I really had to keep on track with the 2nd law: indeed, driven by their pedagogical enthusiasm, and most often, by years of investment in setting up online courses, most teachers were suggesting tools and solutions that would require several weeks – maybe months – of design and self-training before one could effectively deliver an online course session. Besides, not all universities have made the same technological choices: Moodle or Blackboard, Microsoft Teams or Collaborate, Google drive or Dropbox?
    • In short, the resources available online allowed me to learn very quickly about the possible options, but it was the filter of the 2nd Law that allowed me to avoid getting drowned in solutions that were too costly in terms of time and/or energy. Once again, the pedagogical quest has priority over technological tools. This is why, paradoxically, I chose to put collective intelligence as the 3rd priority…

That’s about where I am right now. What about you? Do you have any advice or comments?

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CovidCampus #3 : les 3 lois de la pédagogie pour passer à un cours en ligne

Ce thibillet fait partie d’une série de réflexions sur la crise du Corona virus et le passage immédiat de mes cours en présentiel à une version en ligne.

Passer aux cours en ligne = changer aussi de costume…

Voici le compte rendu de quelques expérimentations que j’ai déjà réalisées, avec les liens correspondants. Pour reprendre l’idée de Nord magnétique que j’ai évoquée précédemment, je me suis appliqué l’équivalent des 3 lois de la robotique d’Isaac Asimov. Pour mes lecteurs qui ne connaissent pas, ce sont 3 lois qui sont emboîtées :

  • la première loi est celle qui a le plus de force ;
  • la 2e loi a une priorité légèrement moindre, et elle n’est appliquée que dans la mesure où elle ne contrevient pas à la première loi ;
  • la 3e loi à la priorité la plus faible : elle n’est appliquée que si elle ne contrevient pas à la première ou à la 2e loi.

J’ai donc établi mes 3 lois pédagogiques en suivant ce schéma.

  1. La première loi est : « prendre soin de mes étudiants » ;
  2. la 2e loi est « accepter que les cours sont en mode dégradé » ;
  3. la 3e loi est « utiliser l’intelligence collective ».
  • Première loi (prioritaire sur les autres) : prendre soin de mes étudiants.
    • Communiquer régulièrement. Suite à l’annonce d’un passage en stade 3, j’ai envoyé plusieurs mails collectifs à mes étudiants. Conformément à ce que j’ai dit dans le thibillet sur la communication, la principale idée était de rassurer mes étudiants sur le fait qu’ils avaient un interlocuteur disponible en cas de besoin.
    • Faire un sondage. Je me suis rendu compte très vite que les solutions technologiques évoquées par mon école (notamment l’équipe digitale), ou sur Internet (particulièrement sur Twitter, avec le hashtag #CovidCampus) étaient des solutions qui supposaient que les étudiants disposent d’un environnement numérique avancé. Or, entre la fermeture des locaux de l’école – où il y a du Wifi partout et des espaces de travail aménagé – et les retours dans leur pays d’origine, j’avais besoin de savoir quel était l’environnement de travail de mes étudiants. Je leur ai donc proposé un sondage en ligne pour en apprendre plus sur leur configuration matérielle + Internet, pour savoir s’ils avaient déjà eu des cours en ligne, et connaître leurs besoins éventuels concernant les prochaines séances. Heureusement (merci à la 3e loi), j’ai pu récupérer un sondage en ligne qu’une Professeure américaine avait conçu et partagé (le lien est ici, pour ceux que ça intéresse). C’est aussi intéressant à titre statistique : pour les étudiants que j’avais déjà eu en cours, il y a un peu moins de 50 % des étudiants qui ont répondu au sondage, et seulement 20 % ont répondu aux questions qui nécessitaient des réponses un peu plus détaillées (par exemple, l’expression de leurs besoins personnels) ; en revanche, pour les cours dans lesquels je n’avais pas encore rencontré les étudiants, on tombe à un taux de réponse inférieur à 25 %. Même si l’échantillon n’est pas significatif statistiquement, on peut penser que le fait d’avoir eu des cours face à face augmente l’engagement numérique quand on passe à un cours en ligne.
    • Réagir rapidement. Dans les besoins exprimés par mes étudiants, il y avait des inquiétudes sur différents points du cours : y aurait-il une vérification de la présence ou de l’absence en ligne ? Comment s’organiser pour les travaux à rendre en groupe ? Comment poser des questions lors d’un cours en ligne ? Était-il possible d’éviter d’utiliser le tableau de la salle de cours, car ce n’était pas lisible en vidéo (c’était avant l’annonce de confinement total) ? Pour toutes ces questions générales, j’ai envoyé des mails avec les nouvelles règles assouplies. Pour les demandes particulières, j’ai recouru à des mails individuels.
    • Faire preuve d’adaptabilité et d’imagination. Voici un exemple qui m’a amusé : plusieurs étudiants se sont inquiétés de la mauvaise qualité du travail qu’ils auraient à rendre pour lundi. En effet, ils ne pouvaient pas communiquer facilement avec leur groupe de travail, et ils étaient donc angoissés sur la mauvaise note éventuelle qu’ils pourraient obtenir. Ma première réponse a été de dire que ce travail ne serait finalement pas noté, car le plus important n’était pas d’obtenir une note, mais d’apprendre… Puis j’ai pensé au cas inverse : un groupe d’étudiants qui aurait travaillé depuis des semaines pour rendre un travail de qualité professionnelle. Comment ces étudiants prendraient-ils l’annonce de dernière minute que leur travail ne serait pas noté, et leurs efforts non rémunérés ? J’ai donc opté pour une proposition légèrement plus complexe : tous les groupes devaient rendre leur travail avant la date limite, quel que soit le niveau de complétude, mais chaque groupe avait la possibilité de demander à titre individuel que son cas ne soit pas noté (même si je m’engageais à leur donner un feed-back détaillé). On peut aller très loin dans l’imagination de tous les scénarios possibles. Supposons qu’un groupe ait demandé à être noté, et qu’il obtienne une mauvaise note : comment traiter ce cas par rapport à un groupe qui n’aurait pas été noté, et dont la moyenne n’aurait donc pas été dégradée ? La réponse tient à l’application de la 2e loi : éviter de compliquer les choses, traiter chaque situation au moment où elle arrive, au lieu d’essayer de tout prévoir au début (théorie des contrats incomplets)…
  • 2e loi à appliquer (uniquement si elle ne contrevient pas à la première) : accepter que le cours se fera en mode dégradé.
    • KISS (keep it simple and stupid). Le fait de me dire que le cours en ligne ne pourra pas être aussi intéressant qu’un cours en face à face est finalement assez libérateur : il ne s’agit pas de rechercher la perfection, mais de viser à un minimum d’efficacité. Cela peut être décliné en quelques démarches très simples.
    • M’appuyer sur les outils que je connais déjà. Plutôt que d’investir du temps de veille et de formation à des nouveaux outils, je préfère capitaliser sur les solutions et les environnements que je connais déjà. Si possible, en jouant sur une frugalité technologique : tous les étudiants n’ont pas forcément accès à une webcam ou à une connexion haut débit qui permet le transfert de vidéo. Aussi, envisager d’enregistrer une présentation PowerPoint avec un commentaire audio permet d’avoir une version dégradée d’un cours magistral qui a l’avantage d’être très légère à transférer (même si c’est probablement épouvantablement ennuyeux à suivre…)
    • Raisonner en termes d’empilement de briques. En suivant une logique de pyramide de Maslow, ce n’est qu’une fois que les besoins primordiaux sont satisfaits (ici, pouvoir passer des diapositives avec un commentaire oral) que l’on peut se préoccuper de rajouter des choses supplémentaires. Voici à titre indicatif mon empilement à ce jour, en partant de la base et en ne passant à l’étage du dessus que lorsque l’étage précédent est sécurisé :
      1. faire défiler des diapositives avec un commentaire oral
      2. donner la possibilité aux étudiants de poser leurs questions en direct (par exemple, par écrit dans un document Google drive partagé ou bien – plus complexe – un utilitaire de tchat ou encore – plus complexe – une interruption orale)
      3. avoir une solution de tableau blanc en ligne pour pouvoir dessiner ou taper du texte
      4. Permettre aux étudiants de voter en direct sur des questions (par exemple avec Wooclap ou Klaxoon).
      5. Permettre aux étudiants de se regrouper de temps en temps en petites salles de travail virtuel avant de revenir dans « l’amphithéâtre » numérique collectif.
    • Revenir à l’essentiel. Pour moi, la question séminale est pédagogique, et non technologique. Il s’agit d’identifier très rapidement les messages clés que l’on veut absolument faire passer lors d’une session de cours. Le passage à un cours en ligne va nécessiter d’adapter les ressources pour être sûr que ces message clés passent effectivement. En d’autres termes, on est dans la logique de Mies van der Rohe, less is more.
  • La 3e loi (uniquement dans la mesure où elle ne contredit pas les 2 premières) : utiliser l’intelligence collective.
    • Je vois 3 sources d’intelligence collective : mes collègues ; mes étudiants ; Internet.
    • Mes collègues. Le département digital de mon école a mis en place à toute vitesse des formations en présentiel d’une part, et en distanciel d’autre part. Cela a énormément aidé à diffuser la connaissance sur nos outils numériques. En parallèle, nous avons échangé beaucoup de mails sur la mailing liste de tous les professeurs. Cela m’a permis de constater qu’il y a énormément de profils avec énormément de besoins pédagogiques différents au sein de l’école (école au sens large, puisque nous avons plusieurs milliers d’intervenants extérieurs…) Face à cette grande diversité de questionnements, il m’a semblé très vite que le fait de faire appel à l’intelligence collective allait la plupart du temps contredire la 2e loi (aller au plus simple).
    • Mes étudiants. Avec le sondage mis en place, j’ai pu collecter quelques avis, mais pas vraiment de conseils. À part un étudiant qui m’a suggéré de faire les cours avec une tablette tactile, je n’ai reçu que des contributions axées sur des questions, et non des suggestions de solutions. J’ai aussi ouvert une feuille Google drive partagée avec tous pour que les étudiants puissent poser leurs questions avant le cours. A ce jour, aucune question n’a été posée. J’en déduis que là aussi, il ne faut pas forcément attendre énormément en termes d’intelligence collective. Cela méritera, à terme, de revenir sur les rôles respectifs des uns et des autres, et sur l’engagement. Je résume ma pensée en exagérant volontairement le discours : dans un cours extrêmement contrôlant, où le professeur annonce des règles du jeu et un cadre stricts, il ne suffit pas d’une crise du Coronavirus et d’un message d’empowerment (« n’hésitez pas à vous emparer des sujets et à organiser des solutions collectives entre vous ») pour changer les comportements établis depuis le début du semestre. Notre économie de l’attention devient très facilement une économie de la passivité.
    • Internet. Gloire soit rendue à Twitter, qui a permis de fédérer les efforts individuels de centaines de professeurs d’enseignement supérieur à travers le monde. L’utilisation des hashtags #CovidCampus, #CovidCampusFr, #PivotToOnline ou #PivotOnline m’a permis de gagner un temps précieux en lisant les conseils postés par des professeurs qui étaient confrontés aux mêmes questionnements que les miens. Cela m’a permis aussi de mesurer qu’il fallait vraiment garder le cap de la 2e loi : en effet, portés par leur enthousiasme pédagogique, et le plus souvent, par des années d’investissement dans la mise en place de cours en ligne, la plupart des enseignants postent des démarches et des solutions qui nécessiteraient plusieurs semaines – voire plusieurs mois – de conception et d’autoformation avant de pouvoir assurer une séance de cours en ligne. Il faut aussi tenir compte du fait que toutes les universités n’ont pas fait les mêmes choix technologiques :Moodle ou Blackboard, Microsoft Teams ou Collaborate, Google drive ou Dropbox…
    • En résumé, les ressources disponibles en ligne m’ont permis de m’informer très rapidement sur les options possibles, mais c’est le filtre de la 2e loi qui m’a permis de ne pas me noyer dans la mise en place de solutions trop coûteuses en temps et en énergie. Encore une fois, la quête pédagogique doit passer avant les outils technologiques. C’est pour cela que, paradoxalement, j’ai choisi de mettre l’intelligence collective en 3e priorité…

Voilà où j’en suis à ce jour. Et vous, avez-vous des conseils ou des commentaires ?

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CovidCampus #2 : Communication (ENG)

This blog post is part of a series of reflections on the Corona virus crisis and the immediate transition from my face-to-face courses to online classes.

It has been announced yesterday night: France has just reached stage 3 of the Coronavirus pandemic. After the announcement by my school of the closure of the premises for all students (all courses are now switched online), we are now moving to a situation of national containment.

When shift hits the fan…

This means even more social distancing, and that justifies a post on the adaptation of communication. As with the previous post, I am interested in any reactions or suggestions.

In this situation of social confinement, communication is going to be very much through e-mail. So here are the few solutions and rules I have put in place in the last 48 hours. Most of these solutions are inspired by my « e-mail management » course.

  • Manage the incoming flow. I have set up an automatic reply message to any email I receive. Here is this message, if you ever want to use/edit it for your own purpose:
    • Considering the Coronavirus crisis and the  closure of ESCP Business School campuses for students, I am working on switching all my courses online. This extra workload is huge.
    • As a consequence, please note that I will not answer all my emails, and if I do, this will be with longer delays than normal.
  • Manage the backlog. It was necessary to take into account all the people who had sent me e-mails in the last days or weeks, and to whom I had not yet replied. So I wrote a message based on the concept of e-mail bankruptcy. Here is this message, if you ever want to use/edit it for your own purpose:
    • This is a generic message in response to an email you sent me in the last few days/weeks.
    • The situation is now going to be complicated for me, since due to the Coronavirus crisis, ESCP Business School is closed to students starting Monday morning. So I have to transform all my courses into an online equivalent – with all the additional investment that this represents, and all the losses in quality that can be expected. This means that in an already very busy schedule, I have to prioritise the fact that the course hours are guaranteed, but in a totally different format. In other words, I’ve gone into « crisis management » mode.
    • If your request was important and can’t wait (you are the sole judge), do not hesitate to send me a new email with your precise request. Otherwise, please contact me again when the situation is stabilized. NB: I do not wish to break off the communication. If you want to contact me, do not hesitate, but please note that I will not be able to answer all messages.
  • Keep in touch with my students. In reference to what I have previously called my first magnetic north on my moral compass, I try to send one message per day to my students, in order to partly compensate for social distancing and to maintain a group spirit around our school values. As regards substance, these messages are mostly informative, to indicate the progression of my reflections and the decisions I have been led to make in the past hours. In terms of form, I always try to include 3 elements in my messages:
    • A positive state of mind, which I summed up with the slogan « Keep Calm and Carry On », whose story I have always found fascinating. As far as I am concerned, and given my personality type (MBTI/Enneagram), this state of mind includes humour and empathy, based on our common values.
    • Every time I announce a change in the rules of the course, it always goes in the same direction: alleviate the pressure. For example, extending the deadline for submitting a case; what was compulsory being now optional; reducing the expectations on a given assignment; announcing that a case will not be graded in the end, but that each student will get feedback.
    • Finally, as far as possible, I indicate that I am open to any requests or concerns, and that students can contact me at any time.

What about yourself? Would you have any advice on the topic of communication in times of confinement?


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CovidCampus #2 : Communication (FR)

Ce thibillet fait partie d’une série de réflexions sur la crise du Corona virus et le passage immédiat de mes cours en présentiel à une version en ligne.

C’est annoncé : la France vient de passer en stade 3 de l’épidémie de Coronavirus. Après l’annonce par mon école de la fermeture de l’établissement pour tous les étudiants (tous les cours étant désormais basculés en ligne), nous passons désormais à une situation de confinement national.

Un seul F vous manque, et tout est dépeuplé…

Cela signifie encore plus de distanciation sociale, et cela justifie un thibillet sur l’adaptation de ma communication. Comme pour le précédent billet, je suis intéressé par toute réaction ou suggestion.

Dans cette situation de confinement social, la communication va énormément passer par l’e-mail. Voici donc les quelques solutions et règles que j’ai mises en place dans les dernières 48 heures. La plupart de ces solutions s’inspirent de mon cours de « gestion des e-mails ».

  • Gérer le flux entrant. J’ai mis en place un message de réponse automatique à tout e-mail reçu, en français et en anglais. Voici ce message, si jamais vous souhaitez vous en inspirer :
    • Compte-tenu de la crise du Coronavirus et de la fermeture d’ESCP Business School pour les étudiant(e)s, je travaille à la mise en ligne de tous mes cours. Cette charge de travail supplémentaire est énorme.
    • En conséquence, merci de noter que je ne répondrai pas à tous les mails, ou alors avec des délais de réponse supérieurs à la normale.
  • Gérer le stock. Il fallait aussi tenir compte de toutes les personnes qui m’avaient écrit dans les derniers jours ou dernières semaines, et auxquelles je n’avais pas encore répondu. J’ai donc rédigé un message qui s’inspire de la notion de banqueroute d’e-mail (e-mail bankruptcy). Voici mon message, si jamais vous souhaitez vous en inspirer :
    • Ceci est un message générique en réponse à un mail que vous m’avez envoyé dans les derniers jours / semaines.
    • La situation va désormais être compliquée pour moi, étant donné qu’à cause de la crise du Coronavirus, l’ESCP Business School est fermée aux étudiants à partir de lundi matin. Je dois donc transformer tous mes cours en un équivalent en ligne – avec tout l’investissement additionnel que cela représente, et toutes les déperditions de qualité auxquelles on peut s’attendre. Cela veut dire que dans un agenda déjà très chargé, je dois faire passer en priorité le fait que les heures de cours soient assurées, mais sous un format totalement différent. En d’autre termes, je suis passé en mode « gestion de crise ».
    • Si votre demande était importante et ne peut attendre (c’est vous qui êtes seul(e) juge), n’hésitez pas à me renvoyer un mail en indiquant votre demande précise. Sinon, merci de me recontacter quand la situation sera stabilisée. NB : je ne souhaite pas rompre la communication. Si vous voulez me contacter, n’hésitez pas, mais sachez que je ne pourrai pas répondre à tous les messages.
  • Maintenir le contact avec mes étudiant(e)s. En référence à ce que j’ai appelé mon premier nord magnétique dans ma boussole morale, j’essaie d’envoyer un message par jour à mes étudiants, dans le but de compenser pour partie la distanciation sociale et de maintenir un esprit de groupe rassemblé autour de notre école. Sur le fond, ces messages sont la plupart du temps informatifs, pour indiquer la progression de mes réflexions et les décisions que j’ai été amené à prendre dans le cadre du cours. En terme de forme, j’essaie d’inclure toujours 3 éléments dans mes messages :
    • Un état d’esprit positif, que j’ai résumé par le slogan »Keep Calm and Carry On », dont j’ai toujours trouvé l’histoire passionnante. En ce qui me concerne, et compte tenu de ma personnalité, cet état d’esprit passe notamment par de l’humour et de l’empathie, fondés sur nos valeurs communes.
    • À chaque fois que j’annonce un changement de règles concernant le cours, cela va toujours dans le même sens : alléger la contrainte. Par exemple, rallonger le délai de remise d’un cas ; rendre optionnel ce qui était obligatoire ; réduire les attentes sur un travail donné ; annoncer qu’un travail ne sera finalement pas noté, mais que chaque étudiant aura un feed-back.
    • Enfin, autant que possible, j’indique que je reste à l’écoute de toute demande ou toute inquiétude, et que les étudiants peuvent me contacter à tout moment.

Et vous, avez-vous des conseils sur la communication en période de confinement ?

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CovidCampus: how to move quickly to 100% online courses? #1

Well, how to put those ideas back in my head ?

Today I am starting a sequence of reflections on e-learning, following the Coronavirus crisis. Indeed, even if to date the French government has not yet taken a position on the shutting out of universities and grandes écoles, I prefer to anticipate, even if only mentally, on how I am going to move my face-to-face courses to online classes.
I will use these posts to document, like a log book of a journey, the progress of my thoughts.
Context is extremely important here: it is not a reflection carried out in advance to design a future distant course. We are in the middle of a crisis, my school may close overnight, and I would have to transform all my face-to-face courses into a 100% online equivalent with 24 hours notice… Thus I wish to share my reflections as a work in progress, and I hope to receive suggestions, comments, and sharing of experiences on this subject.

Before talking about the practicalities, it seems important to me to define a few fundamental principles that will serve to guide my choices.

In the moral compass that I set for myself, there will be a double magnetic north:

  • My top priority will be to take (even greater) care of my students. This crisis is extremely difficult for them, knowing that the majority of my students are non-French. We have a lot of Italian, Chinese, Indian, German students, and so on. These students are far from their families, they are housed in Paris or the surrounding area, in (basic) student accommodation. In a normal situation, they are already very often in need of advice and support (and it is an important part of my profession to answer those questions). If my school were to close and their only contact became the online courses they would have to take, it would require even more listening, understanding and adaptability from my part.
  • The 2nd magnetic north that will guide me is the conviction that a rapid transition from a face-to-face class to an online course can only result in degraded conditions. My current courses were not designed to be taught online, and if some people think that it is enough to have a film shooting of themselves teaching, they clearly demonstrate their incompetence on the subject of online courses. IMHO, the mistake comes from the vocabulary used: I see a lot of business schools talking about immediately switching to online classes. If I had to find an image, it wouldn’t be the image of the switch, which makes it seem as if you just flip a button to change the modalities, but rather the image of the machine translation. A machine translation allows us to quickly get a text in another language, but the speed has a negative counterpart: the product that is delivered is a (very?) degraded version of the original text. This can be used to understand the general meaning, but without the quality and subtleties of the original text.

Before moving on, I would like to specify 2 personal things:

  • As far as online teaching is concerned, I was not born yesterday. I have designed several courses that were intended from the very beginning to be 100% online, some of them even being totally self-supported (i.e. my role was limited to moderating the discussion forums, answering students’ questions by e-mail, and grading the final exam – zero hours in teaching). I also had the chance to collaborate in writing pedagogical videos, I lead a pedagogy seminar in the school’s doctoral program, and for more than 2 years, I have participated with pleasure in pedagogy co-development groups, where we regularly work on online teaching issues in different programs. So it’s not like I’m discovering the subject today (even though there are people who are far experienced on this topic…) But I persist: switching overnight to a 100% online course will automatically result in a downgraded product.
  • On the other hand, all this thinking and planning comes as an unexpected addition to a rather busy agenda. I have 2 books I’m working on for my publisher, a research article to modify, a magazine to publish, one or 2 conferences to organize, a son in internship and a daughter who is going to take the French Baccalaureate… So my posts will probably be short and badly written 🙂 (remember : it’s a log book).

Now let’s get to the subject: where to start?
I started with the most urgent: my next course sessions, which were originally planned to be held face to face in an amphitheatre, and could be converted into online sessions. For me, the first thing to do is to make a typology of each session. Indeed, not all course sessions are the same: some sessions consist in correcting a case previously handed in by students; other sessions incorporate activities that the students have to carry out, followed by a discussion; others consist of a more controlled course, where I show concepts and ask questions. It is therefore necessary to measure the characteristics of a given session in order to see what can be done in terms of distance learning.
For instructors / lecturers / professors who might be interested, I am sharing with you my first draft of a basic typology. It’s a tentative list of the main characteristics of what will happen during the lesson (to be improved):

  • Distribution of speaking time or activity time: my students x% vs. myself y%
  • Is the course delivered by several instructors (on different sessions, within the same session, invitated professionals…)
  • What percentage of the course is devoted to students’ questions?
  • What is the percentage of the session that I devote to the different media: slides %; writing or drawing on white board %; work on the computer with projection (Excel); video %…
  • What percentage of my session is dedicated to student reflective work? How do the students give me/hand me back their reflections?
  • How do I interact with the students? Do I choose who I ask the question to, or do I wait for someone to answer?
  • Do I have focus more on a one-to-one style (I show my students that I recognise their individuality) or a more universal style (it doesn’t matter who asks the question, or who answers it, as long as it’s interesting)?
  • Do I have a lot of students coming to see me at break time or at the end of the course? Do they ask the same questions they might have asked during class, or do they come at these times because they have a particular request they don’t want to make in front of everyone?
  • To what extent do I feed on interactions or reactions? (even if only nods from the audience)

I’m sure the list can be expanded to provide a more accurate mapping of what the lecturer expects from a given session before it begins. While perusing this list of questions, you probably saw the value of doing such a mapping: it helps to know what is (more or less) transposable to an online class.
As a matter of fact, I put those class activities into 3 categories:

  • Activities that can happen in more or less the same way whether it’s a face-to-face course or an online course. For example, displaying slides and commenting on them. This doesn’t challenge my idea of degradation: staring at your computer with a slide on it while you hear the teacher’s voice on the speaker is not the same as being in a classroom with the same experience – just because it is NOT the same experience.
  • Other activities are not transposable as they are. They will require to find an « automatic translator »: how to replace writing on a whiteboard? How to question students online in order to create a dynamic? How to deal with individualities?
  • Finally, there is a third category: activities that cannot be transposed online. Example: instantaneously capturing subtle reactions, or dealing with chatter (which indicates either a loss of interest in the class, or, on the contrary, a renewed interest in the subject that requires an exchange with classmates). In this 3rd category of things that cannot be put in an online class, what should be done? Should we reinforce the first 2 categories, at the risk of losing part of the wealth of the 3rd? Or should we be looking for shortcuts or innovations to meet the needs of the 3rd category, at the risk of spending a lot of time there, considering this is an emergency, last-minute situation? Once again, we have to accept that the course will be degraded.

That’s where I’m at right now. What are your thoughts on these subjects?

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