Le scoop, la joie, et aussi la gravité

Merci à Yog, grce à lui, j’apprends la nouvelle.
Je me permets de paraphraser John Donne : « chaque vie humaine emprisonnée me diminue ».
Je me réjouis donc de la libération d’Ingrid Betancourt (et j’assume mes écrits historiques, j’évolue tous les jours).
Je voudrais juste dire, en psycho-historicien que je rêverais d’être (pour ceux qui ne comprennent pas, ça fait référence à une oeuvre d’Isaac Asimov, appelée Fondation) :

  • cela va commencer par un relai d’information dans la blogosphère
  • puis il va y avoir un grand enthousiasme populaire
  • assorti d’une tentative de tirer la couverture à soi : qui a contribué, et de quelle manière, et depuis combien de temps, à cette libération
  • mais nous sommes en France, donc il va y avoir des réactions du genre « mais non pas du tout, c’est un argument électoral ! »
  • Pendant ce temps, le sort d’autres otages, et la tyrannie des grands nombres, feront que l’on se rejouira de la libération de 15 personnes, mais qu’on oubliera les massacres de 70 000 personnes, qui sont moins médiatiques.

Je reviens au début de ce thibillet : je me réjouis de cette libération.
Mais nous sommes tous, de manière bien moins cruelle, mais plus permanente, prisonniers des médias.
Qui a dit que la télévision était l’opium du peuple ? (troll on, en langage de geek)

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0 réponse à Le scoop, la joie, et aussi la gravité

  1. joséphine dit :

    Je dirais que certes, on se réjouit de la libération de 15 personnes, et on oublie les 70 000 autres. Mais cette réjouissance est gratuite, et c’est beau. C’est pas parce que d’autres sont toujours emprisonnés qu’on ne peut pas se réjouir du travail accompli par les comités de soutien, les foules, la ferveur populaire.
    Une mère est heureuse de voir son enfant guéri, même si d’autres sont toujours malades. On fait ce qu’on peut un peu devant sa porte, certes, mais c’est la nature humaine.. On peut pas donner à tout le monde.
    et moi je trouve ça chouette que notre pays ait mis autant d’énergie dans ce combat, cette libération, même si elle est probablement plus le fait d’autres, et je suis fière qu’on soit un peuple actif et un soutien pour nos ressortissants.

  2. Yog dit :

    je suis content d’avoir été le véhicule de cette bonne nouvelle 🙂 à 10 000km

  3. Alex dit :

    Personnellement, je ressens quand même une certaine gêne et je pense que la situation de la mère de l’enfant malade est différente.
    Je suis gêné par le fait qu’on s’intéresse à une personne prise en otage parce que c’est une Française médiatique et qu’on oublie les milliers d’autres otages parce qu’ils ne le sont pas : cela me parait manquer de grandeur d’âme ou d’humanisme. Cela ne m’empêche par de me réjouir de ces libérations.

  4. joséphine dit :

    en quoi donc la situation de la mère de l’enfant malade est-elle différente ?
    Il y a un autre otage français, le soldat franco-israélien, et la France lutte pour le libérer.
    Si les autres pays ne prennent pas soin de leurs ressortissants, alors moi je suis heureuse de faire partie de celui qui le fait.
    Et dans ce cas, Alex, pourquoi ne pas militer, avec vos moyens, pour la libération des autres otages ?

  5. Docthib dit :

    @ Joséphine : je me réjouis aussi, et d’autant plus depuis que j’ai entendu parler cette grande dame. Je pense que l’incompréhension entre nous (Alex, Joséphine, moi-même) tient aux idées suivantes : là où nous sommes tous d’accord, je crois, c’est dans la réjouissance de la libération de cette personne exceptionnelle (et ne pas lier les deux termes libération et exceptionnelle : toute personne mérite d’être libérée) ; là où Alex et moi nous positionnons (je crois), c’est dans le fait que le traitement médiatique est binaire : soit c’est intéressant, soit ça ne l’est pas. Et quand c’est intéressant (i.e. ça va rapporter de la pub), on y va à fond. Et quand c’est pas intéressant, on oublie. Qui parle du Darfour aujourd’hui ? Et les JO de Pékin, c’est passé de mode, cette indignation vertueuse ? Je n’ai pas les moyens de rechercher le nombre de ressortissants Français qui sont en otage, mais je suppose qu’il y en a encore beaucoup, dont on n’a jamais parlé au journal de 20h.

    @ Yog : c’est quand même génial, que ce soit par toi, avec le décalage horaire (mais c’était probablement dans une nuit où j’étais en décalage horaire) qui m’aie informé de cette nouvelle ! Moi j’aime bien Internet pour ça…

    @ Alex : je suis entièrement d’accord avec vous, même si le coup de la mère de l’enfant malade demande à être explicité. Joséphine (et moi) sommes du côté où ce genre de choses nous frappe intimement.

    @ Joséphine 2 : OK, j’adhère, mais attention aux facilités : le discours du genre "au lieu d’ergoter, agis" connaît aussi ses limites. Emettre une opinion, réfléchir, ne pas s’engager trop tôt, c’est agir aussi. Certes, je suis partisan – ô combien – de la philosophie de l’action, mais je mesure aussi le nombre de fois où celle-ci m’a amené à faire des choses qui n’étaient finalement pas en ligne avec mes convictions…

  6. Alex dit :

    Je ne suis pas certain d’avoir tout compris ou d’avoir été compris. Pour la mère de l’enfant malade, je voulais juste dire que je ne ressentais aucune gêne à ce qu’elle soit heureuse lorsque son enfant guérit alors que d’autres sont malades.

  7. Docthib dit :

    C’était en effet plus simple que ce que je pensais 🙂

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