Livre (re) lu : John Steinbeck – The winter of my discontent

C’est vraiment le moment, dans ma vie, d’avoir terminé ce livre aujourd’hui.
Je ne vais pas vous parler de ma vie.
Parlons donc du livre.

Je tiens John Steinbeck pour le plus grand écrivain américain du 20ème siècle. J’ai du mal à élargir cette période, parce qu’il y a Joseph Conrad (mais était-il américain ? 😉 ) et Jack London (et Kérouac, et Brautigan, et peut-être Hemingway). Quant à Paul Auster, il est encore vivant, alors je ne le compte pas.
Je vais être terrible, mais ce soir, je suis terrible, je brûle tout ce que j’ai, littéralement.
On me dit Kérouac, je brûle ses Clochards célestes. On me dit Hemingway, je rigole, parce que c’est bien, mais j’ai compris son écriture, je le brûle sans hésiter. On me dit Brautigan, c’est comme Kérouac, je le brûle parce que je sais que je l’ai intégré, mais je les remercie tous les deux, ils m’ont littéralement guidé.

Il reste Conrad et Steinbeck. Je sais lequel je vais brûler, car je sais lequel je veux garder. Mais je sais que je regretterai Conrad.
Je me retrouve face à Steinbeck.
Je continue à brûler. La question n’est pas « qu’est-ce que j’aime » (sinon, je n’aurais rien brûlé), la question est « qu’est-ce qui m’est nécessaire ».
Alors je brûle Tortilla Flat, mais je garde Tendre Jeudi. Je brûle Les raisins de la colère, mais je garde En un combat douteux.
Je garde probablement A l’est d’eden, ce qui veut dire que je brûle Au dieu inconnu et La coupe d’or.
C’est terrible, cet holocauste.

Il me reste Les naufragés de l’autocar, mais face au Winter, c’est comme le duel Conrad-Steinbeck, je le brûle. Travels with Charley disparaît aussi, de toute façon, qui connaissait ce récit ?
S’il faut n’en retenir qu’un seul, je brûle tout sauf The winter of my discontent. (je crois que ça a été traduit, selon les textes shakespeariens, par « En une saison froide et amère »).
Si on me demandait de résumer The winter of my discontent, je citerais ce proverbe polonais (?) :

« en cas de problème, il t’est permis de faire un bout de chemin avec le diable. Mais pas au delà du passage difficile. »

Ce roman est un récit. Je ne peux pas le résumer, je peux juste espérer que la traduction française (que je ne connais pas) est à la hauteur du texte original.
Ce roman est pour moi, actuellement, le roman d’une vie. Ou plutôt, d’un tournant de vie. Parce que, quoique nous fassions, ce sont les changements de direction qui nous parlent plus que les longues lignes droites.
Un homme, inséré dans la société, aspire à changer. Il a une femme, des enfants, un emploi. Mais il méritait mieux, et il a raté son tournant. Il est devenu un loser, un employé. Il vit cette situation avec fatalité, jusqu’au moment où se produit un petit changement. Et puis un autre. Il ne sait si c’est lui qui a impulsé les changements, ou si la roue du destin a commencé à le propulser. Ou le broyer.
Le lecteur vit avec lui cette évolution. Il est impossible de lui en vouloir, il est un observateur lucide de tous ceux qui prennent un profit rapide, sans morale.
Dans ce cas-là, évidemment, on lui pardonne certains manques de morale.
C’est un roman sur les désillusions. C’est aussi un roman sur la lumière qui peut briller, parfois, dans les actions que nous faisons.
C’est le livre que je relirai régulièrement, toute ma vie, avec Les Hommes de Bonne Volonté.

Je ne sais pas quand je posterai à nouveau.
Si je le fais, ce sera sans mention à ce message où j’ai essayé de faire passer quelques notions qui me sont importantes.
Il y a quelques thibillets que j’aimerais garder, parce que, dans des domaines divers, ils répondaient à la même quête.
Et je brûlerais tous les autres.
A vous de trouver lesquels.

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0 réponse à Livre (re) lu : John Steinbeck – The winter of my discontent

  1. Christian dit :

    J’ai lu cet été East of Eden, pour faire plaisir à ma belle pour qui ce livre était le livre qui a marqué son adolescence.
    J’ai été soufflé, sans doute un de mes livres préférés, ceux qui ont du coffre et de la profondeur.

    Je suis heureux que tu ne l’aies pas brûlé, comme quoi on a le choix, timshell..

    Je vais m’intéresser à The Winter of My Discontent, surtout que ce vers qui ouvre Richard III je crois est sublime :
    Now is the winter of our discontent
    Made glorious summer by this son of York;
    And all the clouds that low’r’d upon our house
    In the deep bosom of the ocean buried.

  2. Docthib dit :

    Je ne connaissais pas timshel, c’est superbe, nous vivons enfin dans un monde non déterministe 🙂
    En fait, c’est exactement le sujet du livre, et tant qu’à faire, de ma vie actuelle. D’où mon intérêt.

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