De pancartes jalonner notre vie
Ça c’était vraiment un problème. Ça n’est pas facile d’abandonner quelques lecteurs fidèles, qui viennent vous voir régulièrement, avec dans les yeux une petite attente. Ils vous posent des questions, expliquent leur recherche, et puis on se retrouve penchés ensemble à réfléchir, on tâtonne un peu, c’est très délicat, à la fin on tombe d’accord sur un livre et ils l’emportent, un peu rassurés, un peu anxieux. Certaines fois ils reviennent souriants « Oh oui vraiment, il était bien, je n’ai pas fermé l’œil de la nuit pour le finir ». Ou bien ils ne disent rien, ou bien, avec un petit ton désolé « Non, je n’ai pas tellement aimé, je suis peut-être un peu difficile, j’imaginais autre chose ». Souvent, ils réinventent le livre qui leur aurait plu, puis on cherche à nouveau ensemble.
Alors c’était vraiment un problème de savoir quoi leur dire sur la pancarte. Nous sommes rentrés à la maison, et on discutait, nous n’avions pas les mêmes idées.
Voilà ce qu’Aline proposait :
Fermé pour un mois
Fermé pour cause de recherche d’identité
Fermé pour travaux intérieurs
Fermé pour cause d’inventaire
Fermé pendant la mousson (elle aimait bien celui-là, et ses yeux pétillaient quand elle me l’avait dit)
Fermé
Pour ma part, je pensais plutôt à :
Fermé pour un mois, peut-être moins
Fermé pour cause de mission
Nous ne sommes pas partis définitivement
Fermé temporairement
Fermé pendant les vacances libraires
Nous étions au moins d’accord sur un point : le point justement. Il ne fallait pas mettre de point après l’inscription, même pas trois petits points. Juste une pancarte ouverte sur l’avenir.
Roman, publié progressivement, sous un contrat Creative Commons. Et aussi sous licence Touchatougiciel.
Le roman, dans l’ordre, est là.