Le syndrome RTFM

Le phénomène du zapping n’est pas récent : quand j’étais jeune et beau, les télévisions n’avaient que 3 chaines (dont une en noir et blanc), et il fallait se lever pour changer de chaine. On avait intérêt à savoir ce qu’on voulait, et à s’y tenir. Bref, c’était l’ère de la concentration. Arriva la télécommande, et l’on commença à zapper. Les stations FM sur l’autoradio devinrent programmables, hop, cette chanson ne me plaît pas, je zappe. Puis vint le signal d’appel sur le téléphone, qui permit de dire – à peu près – « Excuse-moi, vieux, je vais voir si mon autre correspondant est plus intéressant que toi ».
Puis vint le Web, avec ses liens cliquables. Il y a un temps immémorial, une publicité montrait un internaute avec ce slogan « Quand Arnaud surfe, il est très patient. Quand un lien ne répond pas, il attend toujours 2 secondes avant de cliquer ailleurs ». Aujourd’hui, nous atteignons l’acmé de la technologie, nous sommes à l’heure du zapping multichrone : au travail linéaire, on substitue le zapping neuronal, notre attention sautant comme une puce passe de canidé en canidé : de l’agenda en ligne au logiciel de messagerie qui vient de faire « tilou ! », puis à la liste des to-dos qu’on a à faire, mais voilà que le téléphone sonne, ah tiens, on toque à la porte tandis que la messagerie a re-tilouté.
« Je ne sais pas ce que j’ai fait de ma journée » devient un leitmotiv.
Ce zapping révèle une relation bizarre au temps. Il n’y a pas si longtemps, nous étions allongés dans l’herbe pendant des heures, en attendant qu’une antilope se pointe. Aujourd’hui, nos mes sont des totons virevoltants qui n’ont même pas d’axe central, tout au plus une énergie centrifuge. Bref, nous avons été pourris gâtés, et cela cause des dommages irréparables au cerveau. C’est vous dire que l’enseignement à la mode linéaire, du genre « je parle pendant 3 heures face à un public qui n’a jamais connu un monde sans télécommande », tient de la fosse aux lions, ou de l’expérience surannée.
Mais la tendance que je remarque depuis quelque temps tient à la sous-traitance des problèmes. La méthode universitaire, au temps où j’étais beau, consistait à se poser correctement la question, puis à lire tout ce qu’on trouvait sur le sujet, puis à bâtir un plan, puis à relire tout, puis à commencer à rédiger. Aujourd’hui, ce sont les forums de discussion ou les messages mails qui héritent de nos questions, et plus la question est simple, moins nous y consacrons du temps personnel. Quelques exemples des dernières années :

  1. Par mail
    • Bonjour, j’ai vu que vous aviez écrit un article sur « La displasie des métamorphes », j’ai un mémoire de maîtrise à rédiger et j’ai choisi le sujet sur « La displasie des métamorphes », aussi pourriez-vous m’envoyer toute votre bibliographie (voire, idéalement, le fichier de votre article) ?
    • Bonjour, auriez-vous des références sur l’agriculture sumérienne ? (et moi d’aller chercher sur Google et de répondre)
  2. Dans les forums de discussion
    • Bonjour, comment fait-on pour installer le logiciel ?
    • Bonjour, comment fait-on pour imprimer ?

Tous ces demandeurs ont d’autant plus raison qu’il se trouve toujours une bonne me pour les renseigner (après tout, rien ne coûte si peu cher que le temps des autres). Sauf dans certains cas, où la réponse oscille entre « je vous signale que c’est indiqué dans la FAQ » et « FAQ, bordel ! ».
Les anglo-saxons ont une formule poétique : RTFM pour Read The Fucking Manual (traduction presque littérale : « Je me permets courtoisement de vous renvoyer à la documentation, qui, si vous prenez la peine de la consulter avant de poser vos questions ineptes, saura vous affranchir de votre ignorance crasse »).

Voyez comme je suis d’une autre génération : je n’arrive toujours pas à rédiger des billets, ce sont plutôt des romans.
(ce blog est de toute façon expérimental, à durée de vie non définie, mais pas infinie).

Et comme je viens de finir Les choses de la vie, voilà la citation appropriée, et son commentaire :

L’idée d’une longue convalescence me séduit par certains côtés. Je pourrais enfin relire Proust ou Guerre et Paix, ou un autre chef-d’oeuvre post-opératoire.
Paul Guimard, Les choses de la vie, Folio n° 315, p. 94.

Ainsi, dès la fin des années 60, les longs romans sont diagnostiqués comme n’étant plus lisibles qu’en état de convalescence, le reste du temps étant dévolu aux histoires courtes, aux articles de journaux, ou aux blogs…

Publié dans Réflexions | Marqué avec , | Commentaires fermés sur Le syndrome RTFM

Les marchés financiers sont-ils efficients ? (Partie I)

Rien de bien original dans ce billet (début d’une série), pour une personne qui prendrait le temps de lire et réfléchir. Mais notre époque est marquée du syndrome que j’appellerai RTFM. Je veux juste synthétiser en quelques billets un ensemble de faits généraux et d’opinions personnelles.

Un magma d’opinions pâteuses

  • « les marchés ne sont pas efficients sinon personne ne jouerait en Bourse »
  • « L’an dernier, j’ai fait +34%, alors que le CAC ne grimpait que de 10%, si c’est pas une preuve… »
  • « J’ai un ami qui a un ami qui vit de ses investissements boursiers »
  • « Les théories ne sont que théoriques, il faut aussi prendre en compte la psychologie des acteurs »
  • « Et la bulle Internet, hein, c’était pas de l’inefficience ?! »

Entendons-nous d’abord sur l’efficience des marchés

Un marché efficient est un marché sur lequel aucun investisseur ne peut durablement réaliser un profit net supérieur à celui du marché. Avec les précisions (importantes) suivantes :

  • durablement signifie « au moins 5 ans »
  • profit net signifie « gains totaux (plus-values des actions + dividendes reçus) moins tous les coûts (frais de gestion, commissions, frais d’accès à l’information) »
  • on doit raisonner à niveau de risque équivalent

En français dans le texte, sur un marché efficient, il ne doit pas y avoir de différence de performance entre Jojo qui s’est abonné à La Tribune, et qui passe 10 heures par jour à sélectionner des actions, et Totor qui a acheté les 40 actions du CAC 40 et puis qui est allé dormir : au bout de 5 ans, en termes de profits (nets des coûts respectifs), Jojo ne devrait pas avoir une meilleure performance que Totor.

Les quidams qui brâment « L’an dernier, j’ai fait +34%, alors que le CAC faisait +10% » oublient que

  • c’est sur 5 ans (ou plus) qu’ils devraient raisonner, s’ils veulent être convaincants
  • leur +34% est probablement une performance avant déduction des coûts (commissions, frais de garde, abonnements, anti-dépresseurs)
  • et surtout, ils comparent des choses non comparables : leur propre portefeuille n’est généralement pas correctement diversifié (alors que le CAC 40 est raisonnablement diversifié).

Exemple : si je mise tout sur Volatiles inc., l’action peut s’envoler (+34%) ou avoir du plomb dans l’aile (-100%), je peux donc gagner de l’argent à proportion du risque que j’ai pris. En revanche, l’action Volatiles ne peut pas être comparée à un portefeuille diversifié comme le CAC : elle est beaucoup plus risquée, car elle dépend de risques spécifiques (ouverture de la chasse, grippe aviaire, retour à la mode des oreillers en plume) qui sont complètement dilués (et même annulés) dans un portefeuille diversifié.

Conclusion sur ce point :
surperformer le marché sur une année, et sur une seule valeur (ou une poignée de valeurs) n’est pas spécialement glorieux, même si cela peut être une manière plaisante de passer son temps. En revanche, de là à en déduire que les marchés ne sont pas efficients, il y a de la marge… (à suivre).

Publié dans Finance | Commentaires fermés sur Les marchés financiers sont-ils efficients ? (Partie I)

Citation – police de caractère

J’ai terminé Les naufragés de l’autocar (Steinbeck) et commencé Les choses de la vie, de Paul Guimard. Je trouve cela bien écrit, je me demande si ce n’est pas un style « quadra désenchanté » qui était typique de ces années (fin des années 60), j’approfondirai à l’occasion.
Bon, le passage qui me plaît :

Sérieusement, dira Mortreux, c’est une question de volonté.
C’est son mot favori. Il construit sa vie sur l’exercice patient de volontés mineures, ce qui ne lui laisse guère le temps d’avoir du caractère.
Paul Guimard, Les choses de la vie, Folio n° 315, p. 31.

Et toc.

Publié dans Citations | Marqué avec , | Commentaires fermés sur Citation – police de caractère

Papa, ça veut dire quoi "GPL" ?

En plein dîner, ce soir, mon fils (6 ans il y a une semaine) m’intercepte avec cette question technique : « Papa, ça veut dire quoi, ‘GPL’ ? »

Dans la narcose post-prandiale, je tente désespérément de rassembler les fibres de ma connaissance :
– Euh, ça veut dire, euh, Gaz Pétrole Liquéfié, c’est quelque chose qu’on met dans les voitures à la place de
– Mais non, papa, y a un Gnou et un pingouin, et il y a marqué GPL !

Mon fils. Mon vrai fils génétique.

– (le papa, tout-à-coup réveillé) Cela veut dire General Public License ! Et le Gnou est l’acronyme récursif de Gnu’s Not Unix ! Et le pingouin est le symbole de Linux !

Puis le père, dans un délire inspiré de la mère de Romain Gary dans La promesse de l’aube, dit « Tu seras informaticien, mon fils, le plus grand, tu seras un homme de logiciels libres ! »

Allez, on va se brosser les dents…

Publié dans Informatique et Internet | Marqué avec , | Commentaires fermés sur Papa, ça veut dire quoi "GPL" ?

Léonard de Pise et les offres commerciales d’Orange

Depuis que j’ai découvert Léonard de Pise, je ne peux plus m’en passer.
Ce week-end, à l’heure où blanchit la campagne, je me fais démarcher par un télémarketeur en culotte courte. Résumé de l’entretien :
– Bonjour Madame, je viens vous annoncer qu’Orange vous offre 30 SMS par mois pendant 6 mois ;
– C’est Monsieur, et Docteur aussi, mon jeune ami. Que vendez-vous ?
– Je ne vends rien, Monsieur Docteur, oulala, nous sommes altruistes chez Orange, je vous Hoffre 6 mois de SMS gratuits.
– Et que se passera-t-il à l’issue des 6 mois ?
– Eh bien vous aurez la possibilité de résilier cette offre de 30 SMS par mois !
– Et si je ne résilie point, rusé rhétoricien ?
– Dans ce cas, vous serez automatiquement déboursé de la somme symbolique de 3 euros (3,63 dollars US) par mois, parce qu’Orange le vaut bien.

Je lache ex abrupto mon téléphone et convoque la puissance tutélaire de Léonard de Pise. 3 euros par mois, dans 6 mois, sur 6 mois. Puis l’année suivante, 3 euros par mois sur 12 mois, et ceci, jusqu’à l’infini, car je n’ai pas prévu de mourir pour l’instant. Actualisons tout cela à mon coût d’opportunité, que je fixe allègrement à 6% l’an, soit (taux proportionnel) 0,5% par mois.

Valeur d’un contrat où je débourse 3 euros par mois = 3 / 0,005 = 600 euros de dans 6 mois
Valeur actuelle de cette somme = 600 / (1+0,005)^6 = 582,31 euros en euros de ce samedi 28 janvier 2006.

– Allo, sémillant opérateur historique, je vous prie de m’excuser, j’étais en grande conversation avec l’ectoplasme de Léonard de Pise. Je refuse totalement votre coup de Jarnac. Vous avez été vaincu par la force de l’actualisation.

Que pouvait-il répondre ?

Repentir : prétendre que je vivrai éternellement n’est pas irréaliste ; en revanche, supposer que je me laisserais soutirer 3 euros par mois pour des SaMouSsas dont je n’ai que faire, c’est pousser le bouchon un peu loin, Maurice. Néanmoins, la grande force de ces opérateurs, et la grande faiblesse de l’être humain post-moderne, c’est le taux de rétention de l’usager, qui met des mois avant de se fendre de la lettre recommandée AR qui le délivrera de cette saignée mensuelle. Si je suppose qu’il me faudrait 6 mois (c’est bien le minimum) pour me fendre de ce courrier, le calcul devient
Valeur d’un contrat où je débourse 3 euros par mois pendant 6 mois = 17,69 euros
Valeur actuelle de cette somme = 17,69 / (1+0,005)^6 = 17,17 euros aujourd’hui. Allez, ça vaut bien un repas.

Publié dans Finance | Marqué avec , , | Commentaires fermés sur Léonard de Pise et les offres commerciales d’Orange

La naissance de l’actualisation

Je suis professeur de finance. Cela signifie que depuis des années, j’enseigne l’actualisation et la valeur temps de l’argent, avec notamment la sage sentence : « un euro aujourd’hui vaut plus qu’un euro demain ».
Dans ma grande ignorance, pendant des années, j’ai attribué le concept d’actualisation à Irving Fisher, économiste américain, médiatiquement fameux pour avoir déclaré, quelques jours avant le Krach de 1929 : « les cours des actions ont désormais atteint ce qui semble être un plateau élevé permanent ». (Mais par ailleurs, Irving Fisher a apporté des contributions non négligeables à la finance moderne, et lui reprocher cette phrase conduirait à se pencher sur tout ce qu’ont pu dire les banques d’affaires et les banquiers dans les années 1998-2001… 😉 ).
Il m’a fallu l’aide de Wikipedia version anglaise pour me rendre compte que le propagateur (sinon l’inventeur) de la notion d’actualisation a été Léonard de Pise, vers 1202, date de la publication de son ouvrage Liber abaci (le livre des calculs), dont je viens d’acheter une traduction en anglais (mon latin est un peu rouillé, et le livre est introuvable en tant qu’original).
Léonard de Pise, mathématicien génial, a transposé en Europe ce qu’il avait appris auprès des barbaresques, dans ce qui allait devenir l’Algérie. Son traité porte sur les calculs à partir des chiffres dits « arabes » (en réalité, les chiffres indiens), qui allaient détrôner les chiffres romains dans l’arithmétique occidentale. Et Léonard de Pise consacre une partie de son ouvrage aux calculs sur les intérêts et les marges commerciales. Je n’en sais pas plus pour l’instant, j’attends qu’Amazon me livre, vers la mi-février. En revanche, pour l’avoir vu sur différents sites et document PDF consacrés à notre ami, les raisonnements du mathématicien étaient entièrement littéraires, sans une équation, semble-t-il, comme ici (traduction approximative faite par votre serviteur, en aller-retour entre le texte latin original et la version anglaise) :

Un individu possède un couple de lapin rassemblés en un endroit circonscrit, pour savoir combien de lapins leur seront nés en une année : étant donné que par nature, ils engendrent chaque mois une paire de lapins, et que ce nouveau couple en engendrera de même le deuxième mois. Aussi, comme la première paire engendre au premier mois, vous doublez le nombre, il y aura deux paires au bout d’un mois. De ceux-ci, une paire la première en fait engendrera au deuxième mois, et ainsi, il sont trois paires au deuxième mois. De ceux-ci, en un mois, deux paires sont gravides, et font naître 2 paires au troisième mois, et ainsi il y a 5 paires en ce mois. De ceux-ci, 3 paires sont gravides, alors il sont 8 paires au quatrième mois. Parmi ceux-ci, 5 paires engendrent 5 autres paires, lesquelles additionnées aux 8 paires font 13 paires au cinquième mois. […] à ceux-ci sont additionnés les 144 paires qui naquirent au dernier mois, il y aura 377 paires. Et toutes ces paires sont engendrées par la paire susmentionnée dans le lieu dit à la fin d’une année. Vous pouvez voir dans cette marge comment il fut procédé. En effet, car nous avons additionné le premier chiffre au deuxième, c’est-à-dire 1 avec 2. Et le second avec le troisième. Et le troisième avec le quatrième. Et le quatrième avec le cinquième, et ainsi de suite, jusqu’à additionner le dixième et le onzième, soit 144 avec 233. Et nous avons la somme de lapins susmentionnée, soit 377 paires. Et ainsi vous pouvez procéder par ordre pour un nombre de mois infinis.

En conclusion

  • J’achète ce livre pour m’inspirer de ses exemples littéraires, dans un effort de clarté pédagogique.
  • Personne ne sait bien qui a « inventé » l’actualisation : Léonard de Pise a popularisé et approfondi des concepts et calculs arabes (al-Khwarizmi a écrit un traité d’algèbre en 830) eux-mêmes fondés, semble-t-il, sur des travaux mathématiques indiens (Brahmagupta, au VIème siècle, réalisait des calculs sur les intérêts, et cite comme référence un auteur indien encore plus ancien). L’algèbre, et la résolution des équations du premier degré, peuvent nous emmener fort loin. Reste à savoir quand, pour la première fois, ces outils mathématiques ont été appliqués aux concepts financiers de prêt et placement.
  • Enfin, en note de bas de page, Léonardo de Pise était aussi appelé Fibonacci, et son exemple des lapins donne la fameuse suite de Fibonacci. Certains traders utilisent les nombres de Fibonacci pour vendre du papier aux gogos prédire les cours boursiers puisque, on le sait, les marchés ne sont pas efficients 😉

Pour le lecteur peu matheux, mais intéressé, je recommande le roman de Denis Guedj, Le théorème du perroquet, qui balaie l’histoire des mathématiques sous la forme ludique d’une intrigue intellectualo-policière. Ce livre m’a été offert en son temps par mon collègue Philippe Spieser, qui vient de publier une Histoire de la finance fort prometteuse. J’en attends aussi la livraison par Amazon, c’est dire si le temps gouverne nos vies.

Publié dans Finance | Marqué avec , , | Commentaires fermés sur La naissance de l’actualisation

Le gratuit et le payant : les prix, les coûts et la valeur

Je suis abonné depuis plusieurs mois au Standblog, de Tristan Nitot, et dans la ligne de ce que dit cet auteur sympathique, j’ai quelques réflexions sur le gratuit et le payant (je rédige en parallèle un billet sur le neuf, l’occasion, et le jetable, et j’en ai un autre en tête sur les licences).

Premier constat : le web est le vecteur du gratuit

Certes, les shareware (partagiciel) ou freeware (gratuiciel) existaient auparavant, mais le réseau a amplifié leur diffusion, en parallèle d’autres actifs : des images, contenus, applets, icones, etc. C’est bien simple, si une image nous plaît, hop clic droit enregistrer sous, un texte, hop Sélectionner tout, copier. Cet esprit libertaire du début a son charme, et je pense qu’il démultiplie les motivations. Soyons franc : si je rédige sous Dotclear, c’est parce que c’est une référence en matière de blog, et qu’il est gratuit. Cela ne m’empêchera pas de leur faire un don, mais je suis persuadé que si Dotclear avait été payant dans un emballage sous cellophane, oncques l’aurais-je acheté.

Corollaire : l’internaute de base (dans lequel je m’inclus, car j’aime la chaude ambiance virile des groupes) va piocher de ci de là, butiner, copier-coller, et les frontières du droit et de la propriété personnelle vont s’estomper dans son esprit.
Après tout, de gratuit à libre, il n’y a qu’un pas, que les anglo-saxons ont franchi allègrement quand ils ont bricolé leur idiome, puisque free (gratuit) se dit comme free (libre) alors que c’est pas du tout la même chose. Mettre un actif en libre accès ne signifie pas que j’abandonne mes droits (copyright) dessus. Prenons le cas du gratuit pour l’instant, nous traiterons du libre (c-à-d des licences) plus tard.

Deuxième constat : il y a une différence entre le prix, le coût et la valeur
Une ressource mise à disposition gratuitement a nécessité un développement coûteux, ne serait-ce qu’en temps. Tout ceux qui ont développé un site web, un programme, ou un logo, savent de quoi je parle. Et comme le dit Sénèque à propos du temps,

Les hommes jouent avec le bien le plus précieux d’entre tous ; mais ils ne s’en rendent pas compte parce qu’il s’agit d’un bien immatériel, parce qu’ils ne l’ont pas sous les yeux et de ce fait, il est estimé à un prix très bas, je dirais même à un prix pratiquement nul.
Sénèque, De la brièveté de la vie, Ch. VIII, Par. 1.

Ergo, un actif gratuit peut avoir été coûteux pour son producteur, et détenir une valeur. Mais l’on constate une multiplication d’à peu près, voire de contre-sens :

  • pour la majorité des internautes butineurs, gratuit signifie sans valeur, voire sans coût.
  • Pour beaucoup d’entrepreneurs, le Graal se résume à « Si tu veux devenir riche, mets quelque chose de gratuit en ligne, et si tu as du succès, tu te feras racheter ».

Conclusion provisoire :

  • C’est d’Internet qu’est partie la crise, avec les programmes d’échanges de fichiers qui ont developpé le piratage. Dans cette faille juridique, et ce flou psychologique, se trouvait un point de droit que l’Etat n’a pas comblé, à mon avis. De la même manière que l’on a vu éclore des mouvements citoyens dans tous domaines où l’influence de l’Etat était jugée insuffisante (les restos du coeur ont vingt ans), les internautes se sont attaqués au domaine du droit, en bâtissant une solution alternative : multiplier les types de licenses, pour bien dissocier des choses telles que la paternité de l’oeuvre, le droit à la copier librement, le droit de la modifier librement (je prends ici les grands principes des licences creative commons).
  • En effet, au système du droit répressif, se substitue un système collaboratif, qui n’est plus régi par des brevets déposés au nom de chacun, mais des mises en commun de compétences pour bâtir des produits encore meilleurs, qui soient la propriété de tous. Cette mise en commun, qui fait la force des systèmes d’exploitation ouverts comme Linux, ou des logiciels libres comme Openoffice, repose avant tout sur une démarche collective. Mark Shuttleworth, le fondateur de Ubuntu Linux exprime régulièrement cela en termes d’éducation : donner à tous un accès à un système d’exploitation et des programmes librement modifiables. De même, malgré des crises, l’objectif de Wikipedia est de créer une « encyclopédie libre, gratuite et multilingue ».
  • La question sera d’appréhender les conséquences économiques de tels développements. Le marché du gratuit est-il un marché ? (Je pense que oui). Le gratuit est-il viable économique ? (Je pense que oui). Comment intégrer les apports du marché du gratuit ? A mon sens, en raisonnant de plus en plus en termes de capital humain, c’est-à-dire d’éducation, et de coûts / gains dérivés, ce qui est difficile : comment évaluer le coût total d’un actif comme la somme de son prix de vente, des obligations auxquelles ils nous contraint, de son impact futur sur l’environnement et sur la société, etc. Tristan Nitot traite déjà d’un aspect du problème, en expliquant que le bas prix des produits fabriqués en Chine que nous retrouvons chez nous est notamment dû aux faibles coûts du transport, ce qu’une hausse inconsidérée des prix du pétrole pourrait remettre en cause. Il en profite pour parler de l’environnement, un coût caché récurrent (billet à venir).

Chr.

Publié dans Finance | Marqué avec , , , | Commentaires fermés sur Le gratuit et le payant : les prix, les coûts et la valeur

Réflexions – Traduttore traditore

Je suis en train de travailler sur la traduction d’un manuel de finance américain et cela m’inspire quelques réflexions et réminiscences. Dans la précédente édition, j’avais conclu la préface des traducteurs-adaptateurs par les mots suivants :

Brealey et Myers concluent leur ouvrage en citant Mark Twain. Nous citerons l’académicien Edmond Jaloux, en espérant le contredire : Les traductions sont comme les femmes : quand elles sont belles, elles ne sont pas fidèles ; quand elles sont fidèles, elles ne sont pas belles.

Je me rends compte de la vanité de mon propos (« en espérant le faire mentir »).

  • D’abord parce qu’un ouvrage de finance, aussi réputé soit-il, ce n’est jamais de la grande littérature.
  • Ensuite parce que, de la même manière que Vladimir Volkoff dit dans L’interrogatoire (Livre de Poche n° 6642, p. 221) que à la sortie de la machine, on trouve une mixture de jus d’interrogateur et de jus d’interrogé : cela s’appelle les aveux », une traduction demande autant de transpiration aux traducteurs qu’elle en a demandé aux auteurs. Mais si on améliore le texte en traduisant, le lecteur dira « ah, ces auteurs américains, qu’est-ce qu’ils sont clairs et pédagogiques ! » et si l’on traduit scrupuleusement un texte confus, le lecteur dira « ah, que ces traducteurs ont dénaturé la pensée claire des auteurs américains ».
  • Enfin, parce que tout est une question de goût personnel. Si Edmond Jaloux était encore de ce monde, je lui demanderais « définissez ce que vous entendez par traduction fidèle (voire traduction belle) »

En termes de goût, voici quelques réactions personnelles sur des traductions :

  • Dans Blade runner, au moment où Deckard apprend qu’il doit aller éliminer Rachel, l’inspecteur Gaff dit « Too bad she won’t live ! But then again, who does ? », phrase éminement métaphysique selon moi (Dommage qu’elle ne vive pas plus ! Mais finalement, qui parmi nous prétendrait vivre ?), qui a été traduite par le plat « Dommage qu’elle doive mourir. Mais qui n’en est pas là… » (Je sais, je sais, les contraintes des sous-titres sont drastiques, mais j’ai le droit d’exprimer mon esthétique).
  • Dans Zen and the art of motorcycle maintenance, Robert Pirsig dit (je cite de mémoire) In a TV series, the scientist that mutters « the project is a failure, we have discovered nothing » is mostly suffering from a bad scriptwriter est devenu, dans Traité du zen et de l’entretien des motocyclettes le scientifique qui dit « ce projet est un échec, nous n’avons rien trouvé » n’est pas crédible.
  • Je me souviens aussi d’un autre passage, que je trouve taoïste, ou bouddhiste zen, que la traduction française a aplati, ou ignoré. Le jeune narrateur se retrouve en Corée ou en Chine, à apprendre l’anglais à des pêcheurs locaux, tandis que ceux-ci lui enseignent leur langue. Au cours d’un pique-nique avec eux, il dit « c’est quand même étonnant que, rien qu’avec 26 lettres, on puisse exprimer toutes les choses ». Les pêcheurs aquiescent de la tête, et disent « Non ». Le narrateur pense avoir mal compris, il reformule une phrase plus longue, plus détaillée, et obtient la même réponse : un assentiment de la tête ; le mot « Non ».

Des limites du langage. Cela me fait sourire. Je retourne à ma traduction.

Publié dans Réflexions | Marqué avec , , | Commentaires fermés sur Réflexions – Traduttore traditore

Citation – Mystique de l’actionnaire

Je suis dans Les naufragés de l’autocar, de Steinbeck, et un passage m’a amusé :

M. Pritchard avait besoin de péchés. Il n’y en avait aucun dans sa vie d’homme d’affaires, car dans ce secteur-là, les cruautés étaient étiquetées et classées sous la rubrique nécessité et responsabilité envers les actionnaires. M. Pritchard avait besoin de péchés personnels et de repentir personnel.
in John Steinbeck, Les naufragés de l’autocar, Folio n°861, p. 254.

Cela m’amuse parce que ces pauvres actionnaires – entité ô combien abstraite, mouvante, et difficilement appréhendable – on leur en fait voir des vertes et des pas mûres, ils sont d’autant plus menaçants qu’ils sont absents du tableau. Mais ce n’est pas vraiment mon propos, je ne souhaite pas défendre ici les actionnaires, ou les condamner, on en reparlera. Ce qui m’intéresse plus, c’est ce fameux intérêt des actionnaires, qui est brandi à tout propos, pour justifier tout et son contraire en terme de décisions stratégiques. Ce n’est pas vraiment une incantation, c’est plutôt une scie ressassée à tel point qu’elle en perd son sens. Mais cela sent à chaque fois la patate chaude qu’on se repasse : « je l’ai fait dans l’intérêt des actionnaires (qui n’en demandaient probablement pas tant), donc je ne suis plus responsable de mes actes, ou de mon éthique. »
Je vais me faire des amis, c’est parfait.

Publié dans Citations | Marqué avec , , , | Commentaires fermés sur Citation – Mystique de l’actionnaire

Finance – Et Dieu dans tout ça ?

(Billet rédigé le 23 janvier sur ma version alpha de blog sous blogspot, puis migré ici)
Je tombe sur un billet de Free Money Finance, portant sur l’investissement (au sens de placement) vu par la Bible. On connaît la controverse sur le placement à intérêts : dans certaines religions, dont l’Islam, le prêt à intérêts est sacrilège, car on fait payer le prix du temps, et le temps (n’)appartient (qu’)à Dieu. Voyons voir ce que la Bible pense de tout ça : – la détention patrimoniale n’est pas condamnée, mais les intentions qu’il y a derrière :

Jésus dit : « Gardez-vous de toute avidité ; ce n’est pas du fait qu’un homme est riche qu’il a sa vie garantie par ses biens » et plus loin « Voilà donc ce qui arrive à celui qui amasse un trésor pour lui-même au lieu de s’enrichir auprès de Dieu »(Luc 12 : 15 et 21) on retrouve aussi cela dans l’Ecclésiaste : « Qui aime l’argent ne se rassasiera pas d’argent, ni du revenu celui qui aime le luxe » (Ecclésiaste 5 : 9)

– ce que j’en comprends, c’est que le fait de gagner de l’argent n’est pas mal vu, pour peu que l’on procède derrière à des redistributions :

Conseils aux riches (1ère épître à Timothée, 6 : 18) « Qu’ils fassent le bien, s’enrichissent de belles oeuvres, donnent avec largesse, partagent avec les autres. »

D’autres passages de la Bible ne doivent pas être pris au pied de la lettre, selon moi , par exemple les paraboles où un homme donne de l’argent / des biens à ses héritiers ou agents, et leur recommande de gérer ce patrimoine tant qu’il est absent. En règle générale, le prudent (qui a épargné) est puni tandis que l’entrepreneur (qui a fait fructifier) est récompensé (ex : la parabole des talents (Mathieu 25 : 14 et s.) ou du prince et des mines (Luc 19 : 12 et s.). Je pense qu’il s’agit de métaphores sur le devoir à accomplir (on t’a demandé de faire fructifier, alors fais-le) et les richesses spirituelles.

Note : je n’ai pas le sentiment d’être religieux, probablement même pas croyant. Je prends la Bible comme un livre de sagesse et de réflexion. (la bible dont sont tirées ces citations est une TOB, c’est-à-dire une traduction oecuménique).

Publié dans Finance | Marqué avec , , | Commentaires fermés sur Finance – Et Dieu dans tout ça ?

Livre lu : Siri Hustvedt – Tout ce que j’aimais

(Billet rédigé le 20 janvier sur ma version alpha de blog sous blogspot, puis migré ici)
Je viens de finir de lire Tout ce que j’aimais de Siri Hustvedt. C’était le premier que je lisais, et en ce qui me concerne, le dernier avant quelque temps. J’ai souffert, et je lorgnais sur Les naufragés de l’autocar de Steinbeck, qui consisterait en ma récompense si j’arrivais à finir ce roman. Revenons à Siri Hustvedt. Elle est écrivain, et je n’aurais rien lu d’elle si je n’avais su qu’elle était la seconde femme de Paul Auster, écrivain que j’apprécie fort. J’ai donc acheté ce roman de Siri Hustvedt, traduit en français chez Actes Sud. Mon sentiment sur le livre :

  • c’est comme du Paul Auster, en moins bien. Il y a des jeux sur le langage, la création artistique, les dédoublements de personnalité, mais cela apparaît, pour quelqu’un qui connaît Paul Auster, comme un avatar, un clone.
  • l’écriture alterne entre des moments durs, ou troublants, avec le sentiment d’être ancré dans la réalité, et des réflexions qui (pour moi) sont intellectuelles, ou plutôt, intellectualisantes. J’aime Bill quand il fume, quand il crée, j’aime Violet quand elle pose pour lui ou qu’elle lui écrit, mais je n’aime pas le narrateur, parce qu’il me paraît être une victime, sans esprit critique (il y a des moments où la suite des événements est vraiment prévisible, mais aucun ne s’en rend compte, le narrateur se contente de phrases du type « nous aurions dû nous en douter, bien sûr, mais »). J’ai du mal à m’intéresser à son sort. Pour établir une comparaison, le narrateur de ce livre a le même âge que le narrateur de Brooklyn Follies, de Paul Auster, mais en comparant ces deux personnages de papier, je préfère mille fois celui de Paul Auster.
  • je ne peux pas dire que je me sois tout le temps ennuyé : le personnage de Mark restera une énigme pour moi, et à la fin du roman, je suis frustré de ne pas en savoir plus sur lui. Dans ma frustration, je reconnais d’ailleurs le travail de l’écrivain, qui m’a amené jusque là. En revanche, il y a eu de nombreux moments où je m’ennuyais.

Ce que je retiendrai de ce roman (dédié à Paul Auster, rien n’est le fait du hasard), ce sont les oeuvres de Bill, qui sont – selon moi – une transposition au monde de la peinture / sculpture de ce que sont les oeuvres de Paul Auster en littérature. Notamment, le voyage de O est une référence aux jeux de Paul Auster sur les lettres de l’alphabet, qu’il a commencés avec Cité de verre. On sent chez Bill la même liberté créative, le même enthousiasme novateur que je retrouve dans les oeuvres de Paul Auster. Et je retiendrai aussi un certain malaise vis-à-vis du personnage de Mark.

Publié dans Livres | Marqué avec , | Commentaires fermés sur Livre lu : Siri Hustvedt – Tout ce que j’aimais

Mes contributions passent sous licence Touchatougiciel (anythingware)

(Billet rédigé le 20 janvier sur ma version alpha de blog sous blogspot, puis migré ici)
Depuis 1995, je contribue à Internet, en mettant en ligne des textes (lexique), données, feuilles de tableur, des cas ou exercices, graphiques, etc. Le credo, à l’époque, était : Internet vous permet de récupérer gratuitement des données/produits que les autres ont mis en ligne, aussi, si vous récupérez quoi que ce soit, vous avez le devoir moral de poster aussi des choses utiles aux autres. (ce qui est souvent évoqué, dans d’autres contextes, par don’t be a leecher, ne soyez pas une sangsue / un parasite). C’est ce qui m’a conduit, dès 2000, à poster des supports de cours, des
graphiques et des feuilles de tableur concernant la finance : je voulais participer à cet effort de partage des connaissances (une sorte de Wikipedia avant l’heure). Le problème est de fixer la license sous laquelle mes contributions peuvent être utilisées. Jusqu’à plus ample informé, je suis partisan de conserver le copyright, et de mettre mes contributions en utilisation libre. Mais certains utilisateurs satisfaits m’ont contacté pour savoir s’ils pouvaient me faire un don / m’encourager. Or, dans le milieu des développeurs informatiques (c’est une analogie, je me considère peu comme un développeur), il existe différents systèmes :

  • le gratuiciel (freeware), programme qu’on peut utiliser sans rien donner à l’auteur ;
  • le partagiciel (shareware), programme que l’on peut utiliser pendant un temps limité, ou avec des fonctionnalités limitées, avant de décider de payer l’auteur. Quand on paie l’auteur (i.e. quand on achète le logiciel), celui-ci envoie une clé pour « débloquer » le logiciel. C’est le principe « essayez d’abord, et si vous êtes satisfait, payez-moi après » ;
  • le x-giciel (x-ware), programme qui utilise un autre mode de rémunération comme par exemple le cardware (si on est satisfait, envoyer une carte postale à l’auteur du logiciel), le beerware (si on est satisfait, envoyer une bière à l’auteur du logiciel – pourquoi pas une bière opensource 😉 ), etc. La liste des x-ware est infinie, car elle a pour seule limite l’imagination du demandeur (une liste de référence peut-être trouvée ). Notez que la plupart du temps, le x-ware permet d’utiliser le logiciel gratuitement (pas de blocage ou de limitation des fonctionnalités).
  • le touchatougiciel (anythingware), terme que je forge pour l’occasion : si vous êtes satisfait(e) d’une de mes contributions, envoyez-moi ce que vous voulez : un petit mot, une carte postale, une bière, un jambon cru, une pensée, un chèque, un livre, une clé usb, un cheveu, un pot de miel, une bouteille de Mercurey, une photo, etc. Rappelez-vous néanmoins : le but est de me faire plaisir, avant de vous faire plaisir. Donc n’envoyez pas de petit chat, de petit chien, de petit putois, et en cas de doute, consultez-moi.

Voilà, mes contributions (soyons clair : celles qui sont téléchargeables depuis un de mes sites, la racine étant à www.thibierge.net) sont désormais sous license touchatougiciel / anythingware. Si jamais je reçois quelque chose, je mettrai peut-être en ligne une liste de souhaits (certains le font sur le site d’Amazon…)

Publié dans Informatique et Internet | Marqué avec , , | Commentaires fermés sur Mes contributions passent sous licence Touchatougiciel (anythingware)

Citation – La qualité et la beauté

(Billet rédigé le 19 janvier sur ma version alpha de blog sous blogspot, puis migré ici)
Je tombe sur Flickr sur une photo assortie d’une citation :

« A picture is the expression of an impression. If the beautiful were not in us, how would we ever recognize it? »
Ernst Haas
Une photo est l’expression d’une impression. Si la beauté n’était pas en nous, comment pourrions-nous la reconnaître en tant que telle ?

Ernst Haas (1921-1986), comme je l’apprends à cette occasion, est un photographe célèbre, qui a notamment travaillé pour Magnum et Life (plus d’infos sur wikipedia fr). La question qu’il évoque me renvoie à un livre que j’apprécie, Zen and the art of motorcycle maintenance (Traité du zen et de l’entretien des motocyclettes) où, entre autres histoires, un professeur appelé Phèdre essaie de déterminer ce qui détermine la qualité (remplacez par beauté si vous le souhaitez) d’un objet, par exemple, un texte littéraire ou une copie d’examen. Après quantité d’expériences pédagogiques et de réflexions philosophiques, Phèdre en conclut que la qualité est en nous, elle ne peut être ni définie ni circonscrite, nous savons que quelque chose est beau (ou a de la qualité), nous ne savons pas comment nous arrivons à cette sensation. Phèdre a le problème que se posent beaucoup de professeurs : que dois-je enseigner ? des techniques, une approche critique, un savoir-faire ? Phèdre teste différentes possibilités (non remise des notes en cours de semestre, auto-évaluation des étudiants entre eux), avec leurs lots de frustrations et de tâtonnements. Cela sonne un peu comme une phrase de boy-scout, mais

  • je trouve réconfortant de penser que certains domaines ne peuvent être enseignés, juste appréhendés, ou découverts ;
  • cela m’aide régulièrement de savoir que l’appréciation de la beauté (et/ou la qualité, la perfection) se trouve en nous.

Publié dans Citations | Marqué avec , , | Commentaires fermés sur Citation – La qualité et la beauté

Lancement de ce blog, en version beta

Bonjour,
après plusieurs essais sous différentes plates-formes, et surtout, après tests en moi-même pour vérifier que c’était utile de faire un blog, je me lance, en version beta pour l’instant.

La vocation de ce blog

  • Traiter de sujets plus variés que la finance, comme les livres que je lis, les réflexions que j’ai, voire les oeuvres que je produis.
  • Pouvoir écrire ici des choses que je ne m’autorise pas à écrire sur les pages web de mon site professionnel. Non pas que l’école qui m’emploie y trouve à redire (encore que, je n’ai même pas demandé), mais pour éviter les confusions de genre, et garder ma liberté d’expression.
  • Profiter d’un outil plus dynamique que des pages web statiques pour rédiger des brouillons ou des billets « à la volée »

Pourquoi ai-je décidé, là maintenant, de commencer ce blog, après avoir hésité pendant des mois ?

  • Réponse vraie : je ne sais pas vraiment, sincèrement.
  • Réponse vraiment vraie : j’ai bien une petite idée, mais je n’ai pas envie de le dire.
  • Réponse officielle : parce que je pense que je peux avoir quelques idées, et que je suis assez favorable aux outils collaboratifs. J’ai découvert Netvibes et je ne peux plus me passer de cette page d’accueil, qui me sert à noter des idées, des pense-bêtes, des liens intéressants, des flux RSS. Je conçois ce blog (version beta) comme l’étape suivante : garder mes idées et textes accessibles partout où il existe un ordinateur connecté, les hiérarchiser, mettre des liens, des fichiers, les trier par catégorie, etc.

Sous quelle plate-forme tourne ce blog ?

  • Sous Dotclear, avec un hébergement chez 1and1, et le nom de domaine en .com qui va bien
  • Quelques jours auparavant, j’étais en effet tombé sur Dotclear, que j’avais implanté sur un site personnel sous Free, avec une adresse de redirection fournie par New.fr. Mais la redirection, ce n’est point transparent, ni esthétique, et ce n’est pas aussi mnémotechnique qu’on le prétend
  • En version alpha, j’avais testé Blogger, le site de blogs de Google, qui avait l’avantage d’être connu, indexé par Google, et facile d’emploi (c’est notamment la solution choisie par ESCP-EAP Running, mon association de jogging), mais qui présentait l’inconvénient de ne pas faire de classement par catégories. Et puis bidouiller de l’html ou de la syntaxe wiki, c’est tellement plus fun ;-).

Qu’est-ce que j’attends de vous, lecteurs/lecteuses ?

Chr.

Publié dans Blog | Marqué avec | Commentaires fermés sur Lancement de ce blog, en version beta